L’âge de raison

Trente ans après son accession à l’indépendance, l’ancienne colonie française a trouvé une certaine stabilité. Et la voie du développement.

Publié le 27 novembre 2007 Lecture : 3 minutes.

L’accession de Djibouti à la souveraineté, dans la nuit du 26 au 27 juin 1977, a clos trois cents ans de présence française sur le continent africain. En 1862, le sultan de Rahayto avait cédé à la France la rade d’Obock contre 10 000 thalers d’argent. Mais la présence tricolore était restée limitée jusqu’en 1884, date à laquelle le gouverneur Léonce Lagarde prit effectivement possession des lieux, après avoir signé d’autres traités avec des chefs afars et somalis. Il délaissa Obock dès 1892, au profit de Gabouti, une localité située au sud-est du golfe de Tadjourah, rebaptisée Djibouti. Le trafic portuaire, dopé par la construction du chemin de fer djibouto-éthiopien long de 784 kilomètres et inauguré en 1917, a été à l’origine de la prospérité de la Côte française des Somalis, devenue, en 1958, Territoire d’outre-mer. Rebaptisée Territoire français des Afars et Issas (TFAI) en 1967, après les premières manifestations de velléités indépendantistes, la colonie est, pendant dix ans, en proie à l’agitation politique et sociale. La Ligue populaire africaine pour l’indépendance, créée en 1975 et dirigée par Hassan Gouled Aptidon, remporte le référendum d’autodétermination du 8 mai 1977, puis les législatives. Le TFAI prend le nom de Djibouti, se choisit « Unité, Égalité, Paix » pour devise et devient enfin un pays indépendant.

Un contexte dramatique
Le jeune État naît dans un contexte régional dramatique, marqué par la guerre entre l’Éthiopie et la Somalie, qui se déchirent au sujet de l’Ogaden et du leadership régional. Pour résister aux tentatives d’annexion, Djibouti passe un accord de défense avec la France, qui maintiendra une base militaire permanente de 4 500 hommes. Début 1978, la rupture entre le président Aptidon, issu de la communauté Issa, et son Premier ministre, l’Afar Ahmed Dini Ahmed, fragilise la jeune République. Un an plus tard, Hassan Gouled fonde le Rassemblement populaire pour le progrès (RPP), transformé deux ans plus tard en parti unique. L’adhésion à la Ligue arabe et à l’Organisation de la Conférence islamique (OCI) permet au pays de bénéficier de l’aide arabe. Le roi Fahd d’Arabie saoudite finance la route de l’unité, longue de 180 kilomètres, qui relie la capitale à Tadjourah. L’économie, adossée aux rentes portuaire et militaire, rate le tournant de la diversification. Djibouti consomme beaucoup mais ne produit rien. La population croît à une vitesse exponentielle. À l’accroissement naturel s’ajoutent les flots de réfugiés, Éthiopiens et Somaliens, chassés par la famine et les guerres. À partir du milieu des années 1980, la dette atteint un niveau préoccupant.

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Négociations avec les Afars
La chute du mur de Berlin et la fin de la guerre froide provoquent une onde de choc puissante en Afrique de l’Est. Le régime communiste du négus rouge éthiopien Mengistu s’effondre en 1990, vaincu par les rébellions tigréenne et érythréenne. Au même moment, la Somalie de Siyad Barré se disloque et sombre dans l’anarchie. À Djibouti, la contestation afar se radicalise avec la création, en 1990, du Front pour la restauration de l’unité et de la démocratie (Frud), qui, un an plus tard, se transforme en rébellion armée. La guerre civile est une catastrophe humaine et économique. Un premier accord de paix est signé en 1994 avec une fraction du Frud, mais il faut attendre mai 2001, date de la conclusion des négociations avec Ahmed Dini Ahmed, qui avait pris la tête de la branche armée, pour un règlement définitif du conflit. Entre-temps, en 1999, Hassan Gouled s’était éclipsé de la scène politique, et son directeur de cabinet, Ismaïl Omar Guelleh, était devenu le deuxième président de la République djiboutienne, à la faveur des premières élections pluralistes.
Un multipartisme limité à quatre formations fut instauré en 1992, en guise de réponse politique aux revendications du Frud. Djibouti bascule dans l’ère du multipartisme intégral en 2002. Le pays connaît ses premières élections régionales en 2006, un scrutin marquant le coup d’envoi de la décentralisation. Élu sur un ambitieux programme de transformation économique et sociale, Ismaïl Omar Guelleh parvient à séduire les investisseurs du Golfe, et en premier lieu ceux de Dubaï, qui décident la construction d’un port à conteneurs ultramoderne sur le site de Doraleh, ainsi que d’une raffinerie et d’un hôtel de luxe. Djibouti, dont la valeur et l’intérêt géostratégique ont été redécouverts après les attentats du 11 septembre 2001 et le début de la traque de l’organisation terroriste transnationale Al-Qaïda, affirme sa vocation de hub d’affaires régional et international.

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