Élections locales en Guinée : pourquoi le RPG peine encore à contrôler Conakry

L’installation des exécutifs communaux à Conakry devait prendre fin le 15 décembre. Mais Matoto, fief traditionnel du parti au pouvoir, remporté de justesse par l’opposition, est au cœur d’une contestation qui traduit les difficultés pour le RPG à s’imposer dans la capitale.

La Ceni, lors de la proclamation des résultats des élections du 4 février en Guinée. © Diawo Barry pour Jeune Afrique

La Ceni, lors de la proclamation des résultats des élections du 4 février en Guinée. © Diawo Barry pour Jeune Afrique

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Publié le 18 décembre 2018 Lecture : 4 minutes.

Dix mois après les élections communales du 4 février 2018, la Guinée continue d’installer ses élus sur fond de contestations. À Conakry, l’élection des maires devaient prendre fin le samedi 15 décembre par le vote dans les conseils communaux des deux plus grandes communes de la capitale : Ratoma, fief traditionnel de l’opposition, et Matoto, acquis à la mouvance présidentielle.

Processus interrompu à Matoto

À Ratoma, le maire sortant, Souleymane Taran Diallo, de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG, de Cellou Dalein Diallo) a été reconduit sans encombre par 30 voix sur 45.

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À Matoto, Kalémodou Yansané, candidat de l’UFDG, l’a remporté d’une très courte tête face à Mamadouba Toss Camara, candidat du RPG Arc-en-ciel (au pouvoir), par 23 voix contre 22 voix. Mais le processus a été interrompu, suite à l’intervention de Moussa Keïta, administrateur du marché de Tannerie situé à un jet de pierre de la mairie et militant du RPG, visiblement mécontent du résultat. Et dans la foulée, chaque candidat a revendiqué la victoire.

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« Le vote s’est déroulé devant la presse. J’avais le bulletin rouge et mon concurrent le jaune. Après le décompte, j’ai eu 23 voix sur 45, la majorité », assène Kalémodou Yansané. Et de marteler : « Je ne me considère pas comme le maire, je suis le maire de Matoto. Cela est incontestable ». Mamadouba Toss Camara n’a, pour sa part, pas répondu aux sollicitations de Jeune Afrique.

« Tout ce que je sais, c’est qu’il y a eu de la pagaille. La meilleure chose à faire, c’est de reprendre les élections dans un cadre mieux sécurisé, comme l’a demandé le ministre », estime pour sa part Amadou Damaro Camara, président du groupe parlementaire de la mouvance présidentielle, faisant écho aux déclarations de Bouréma Condé, le ministre de l’Administration du territoire.

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Des indépendants devenus faiseurs de rois

Si le statu quo demeure à Matoto, le principal parti de l’opposition guinéenne totaliserait trois communes, sur les cinq que compte Conakry. Outre Ratoma, l’UFDG a en effet déjà été déclaré vainqueur à Dixinn (proche banlieue) contre une liste commune du parti au pouvoir et de l’Union des forces républicaines (UFR) de Sidya Touré.

À Kaloum, la commune qui abrite la présidence de la République et la plupart des départements ministériels, Aminata Touré, fille du premier président guinéen Sékou Touré, a été installée maire avec, il est vrai, l’appui du chef de l’État.

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Matam est pour sa part dirigée depuis le 16 novembre par Seydouba Sacko, candidat de l’UFR, qui a bénéficié du soutien du RPG Arc-en-ciel. Malgré sa démission de son poste de Haut représentant d’Alpha Condé, Sidya Touré s’était, en échange de cette aide à Matam, engagé à soutenir le candidat du RPG à Matoto. Mais les sept sièges de l’UFR n’ont pas été suffisants pour garantir la victoire à son ancien allié, arrivé au coude-à-coude avec l’UFDG à l’issue du scrutin du 4 février, avec 14 sièges chacun. Dans ce contexte, ce sont les représentants des petits partis – dont le Bloc libéral de Faya Millimouno et le PEDN de l’ancien Premier ministre Lansana Kouyaté – qui, forts de leurs 10 sièges sur les 45 du Conseil municipal, sont devenus pour l’occasion les faiseurs de rois.

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Alpha Condé tape du poing sur la table

Ces résultats interviennent dans un contexte où le RPG a également été bousculé par l’UFDG dans plusieurs villes de la Basse-Guinée. Les deux formations sont arrivées à égalité à Kindia (17 sièges chacun), Boké (9 sièges) et Gaoual (10 sièges). L’émergence des candidatures indépendantes a rendu la tâche difficile au RPG jusque dans son fief traditionnel en Haute-Guinée, où la commune urbaine de Faranah a été remportée par une liste indépendante. Même chose dans deux communes rurales de la préfecture de Siguiri, pourtant l’un des bastions du RPG.

En tournée dans la région, le président Alpha Condé y a annoncé le 8 décembre la restructuration prochaine de son parti et dénoncé ceux qui considèrent le RPG comme « leur bien personnel ». « J’ai dit au bureau politique national du RPG que l’élection présidentielle et celle communale font deux. Je lui ai demandé de voir où il y a confusion, et de demander l’avis des citoyens sur leur choix. Ils n’ont pas respecté cette consigne. La conséquence, c’est que les gens ont voté pour les listes indépendantes », a déploré le chef de l’État.

Avec l’éloignement de Sidya Touré, les lendemains s’annoncent plus difficiles pour le RPG. Ce n’est pas la première fois que la capitale guinéenne lui file entre les doigts. Lors des législatives de 2013, l’UFDG de Cellou Dalein Diallo et l’UFR de Sidya Touré, alors alliés, s’étaient ainsi partagés les communes de Conakry, après une bataille rude à Matoto, déjà. Lors du scrutin communal, le parti au pouvoir, en proie à des querelles au sein de sa direction, n’avait pas désigné de têtes de listes. De quoi désorienter les électeurs, appelés à voter pour le parti et non pour des candidats identifiés.

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