Soudan : huit morts dans des protestations contre la hausse du prix du pain
Huit manifestants sont morts jeudi 20 décembre au Soudan dans des affrontements avec les forces de l’ordre lors de protestations après l’annonce par le gouvernement de la hausse du prix du pain. C’était le deuxième jour d’un mouvement de contestation à travers le pays, dans un contexte de difficultés économiques croissantes.
« Il y a eu six morts » et un nombre indéterminé de blessés à Al-Gadaref, a déclaré jeudi à une télévision soudanaise un responsable local, Al-Tayeb al-Amine Tah, sans préciser comment ils sont décédés.
Parmi eux, un étudiant dont la mort a été annoncée plus tôt par sa famille et un autre responsable. De nombreux étudiants participent à ces manifestations qui ont éclaté après l’annonce par le gouvernement mardi d’une hausse du prix du pain dans un pays où le coût de certaines denrées a plus que doublé ces derniers mois.
Dans la ville d’Atbara, à 400 km à l’est de Khartoum, deux manifestants ont péri, a indiqué un porte-parole du gouvernorat, Ibrahim Moukhtar.
En soirée, les manifestations ont cessé dans la plupart des villes, un couvre-feu nocturne ayant été instauré dans quatre cités selon les autorités locales.
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— Sudan News (@Sudan_tweet) December 20, 2018
Mais des protestations se poursuivaient dans certains quartiers de Khartoum, où des centaines d’étudiants ont bloqué dans la journée les rues menant à leurs universités. Les forces anti-émeutes ont en outre dispersé à coups de gaz lacrymogènes des manifestants scandant « le peuple veut la chute du régime » près du palais présidentiel, selon des témoins.
Des manifestants en colère ont également mis le feu au siège du Parti du congrès national du président Omar el-Béchir dans les villes d’Al-Gadaref (est) et de Dongola (nord), ont précisé les témoins.
Des violences la veille
Les protestations ont commencé mercredi dans les villes de Port-Soudan, principal port du pays situé à 1 000 km à l’est de Khartoum, d’Atbara, et de Nhoud (ouest), avant de s’étendre jeudi à d’autres régions dont la capitale Khartoum et sa ville jumelle d’Oumdourman.
Dans la ville d’Al-Gadaref, un couvre-feu a été instauré de 18H00 à 06H00 locales (16H00 à 04H00 GMT), après que le député de la région, Moubarak al-Nour, a déclaré que « la situation dans la ville est hors de contrôle ».
Il a appelé les autorités « à ne pas recourir à la force face aux manifestants » et ces derniers « à exercer leur droit de manifester de manière pacifique ».
Selon un habitant de la ville, des centaines de manifestants « ont lancé des pierres sur les banques et ont détruit des voitures ».
Ils ont ensuite mis le feu au siège du parti au pouvoir avant de se rassembler devant le commissariat où ils ont scandé « Liberté, Liberté », et « le peuple veut la chute du régime ».
Dans la ville de Dongola, à 500 km au nord de Khartoum, les manifestants, dont des étudiants, ont « attaqué le siège du parti au pouvoir et y ont mis le feu ».
Crise économique
Dans un contexte de difficultés économiques croissantes avec une inflation de près de 70% et une plongée de la livre soudanaise face au dollar américain, le gouvernement a augmenté le prix du pain de 1 à 3 livres soudanaises (environ 2 centimes d’euros à 6 centimes d’euros) ou de 1 à 5 livres selon les régions.
Depuis trois semaines, une pénurie de pain touche les villes du Soudan, dont Khartoum. Il était également fréquent de voir depuis le début de l’année de longues files d’attente pour trouver de l’essence, du pain ou d’autres produits alimentaires dans la capitale.
En janvier, des manifestations contre la hausse du coût des denrées alimentaires avaient été rapidement matées par les autorités.
Jusqu’à l’indépendance du Soudan du Sud en 2011, le Soudan disposait d’importantes réserves d’or noir. Mais avec la scission, le pays a été amputé des trois quarts de ces ressources.
Le Soudan, autrefois gros exportateur agricole, importe désormais des millions de tonnes de blé et d’autres céréales.
En octobre 2017, la levée de sanctions imposées par les États-Unis au Soudan avait suscité un espoir de relance économique. Mais le maintien du pays sur la liste noire américaine des « États soutenant le terrorisme », ainsi que des « opportunités manquées » de réformes, ont empêché le redressement tant espéré, selon des hommes d’affaires soudanais.
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