Recoller les morceaux
On a frôlé la catastrophe. Le 2 juin dernier, le général « dissident » Laurent Nkunda chasse de Bukavu l’armée gouvernementale, menaçant de faire avorter le processus de pacification en cours. Aussitôt, Kinshasa, qui accuse Kigali de soutenir les militaires rebelles, dénonce une agression caractérisée. Très vite, les discussions diplomatiques cèdent le pas à l’invective. Le gouvernement kinois masse quelque dix mille hommes sur sa frontière avec le Rwanda. Moins de deux ans après la conclusion de l’accord de paix de Pretoria entre le président congolais Joseph Kabila et son homologue Paul Kagamé, le Kivu résonne déjà de nouveaux bruits de bottes.
De cet « incident de parcours », le régime de transition garde des stigmates. Les dirigeants congolais n’ont pu dissimuler la fragilité de leurs institutions, produisant du même coup la preuve que le Kivu reste le véritable talon d’Achille de l’ex-Zaïre. La Mission des Nations unies en RD Congo (Monuc) a, quant à elle, fait l’objet de violentes critiques de la part de la population congolaise, choquée par la passivité des Casques bleus stationnés à Bukavu. Enfin, après de longs mois de laborieux efforts, les relations rwando-congolaises ont connu une nouvelle période glaciaire, et il faudra beaucoup de temps avant que soit levée la méfiance que s’inspirent respectivement les deux pays.
Seule consolation, le tollé suscité par la prise de Bukavu a permis de mesurer la détermination de la communauté internationale à sauver la transition congolaise. De Washington à Pretoria en passant par Paris et Bruxelles, du Conseil de sécurité de l’ONU à l’Union africaine, la réaction unanime des partenaires du Congo démocratique a fait figure d’ultime rempart contre le retour au chaos. Le Nigérian Olusegun Obasanjo, fraîchement investi président du Conseil pour la paix et la sécurité de l’UA, a réuni le 25 juin les frères ennemis, permettant de réamorcer un début de dialogue entre les deux pays. Mais au-delà de la poignée de main échangée dans un palais d’Abuja, un traitement plus global des problèmes de l’Afrique centrale s’impose. L’instabilité de la région des Grands Lacs concerne tous les pays qui, de près ou de loin, ont joué un rôle dans la crise congolaise.
À commencer par les neuf États frontaliers de l’ex-Zaïre et, plus largement, tous ceux qui, au cours de la décennie écoulée, se sont impliqués directement ou non dans les affaires de ce pays. Tous ces protagonistes seront conviés à participer à la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs, qui doit se tenir dans les prochains mois à Dar es-Salaam, en Tanzanie. Organisée sous l’égide de l’ONU par Ibrahima Fall, le représentant spécial de Kofi Annan dans la région, cette grand-messe annoncée de longue date constitue une étape cruciale pour la normalisation de la situation dans la sous-région en général. Et en RDC en particulier.
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