Meurtre de Falikou Coulibaly en Tunisie : l’association des Tunisiens en Côte d’Ivoire rejette les amalgames
Le meurtre du président de l’association des Ivoiriens en Tunisie, poignardé lors d’un vol à l’arme blanche qui a mal tourné, dimanche 23 décembre, a relancé le débat sur le racisme en Tunisie. De leur côté, les Tunisiens de Côte d’Ivoire mettent en garde contre les amalgames.
Pour de nombreux Subsahariens résidant en Tunisie, Falikou Coulibaly est devenu le symbole des mauvais traitements qui leur sont infligés dans leur pays d’accueil. Au lendemain de son assassinat, le 23 décembre, plusieurs manifestations ont été organisées à Tunis, avec comme mot d’ordre : « Trop c’est trop ! »
Une nouvelle voix s’est faite entendre dans ce débat le 27 décembre, provenant cette fois de Côte d’Ivoire : celle des Tunisiens qui y ont élu domicile.
« Pas d’amalgames »
Dans un communiqué, l’association des Tunisiens en Côte d’Ivoire met en garde contre les amalgames qu’a engendré le décès de Falikou Coulibaly. « Le crime qui a endeuillé la famille de feu Coulibaly aurait également pu frapper n’importe quel citoyen tunisien », précise notamment ce texte.
Si l’association fait part de sa « consternation et de son incompréhension » face au meurtre, elle refuse de lui attribuer pour autant un quelconque caractère raciste.
Et pour cause : un climat d’insécurité de plus en plus préoccupant règne en Tunisie ces dernières années. Le ministère de l’Intérieur rapportait ainsi en septembre que le nombre de braquages enregistrés lors des six premiers mois de l’année 2018 est équivalent à celui de l’ensemble de l’année 2017. La criminalité, dans sa globalité, a également augmenté de 20 % lors du premier semestre 2018, par rapport à l’année précédente.
Des membres de la famille ont été reçus par le ministre chargé des Droits de l’homme
L’association rappelle notamment que l’affaire a été traitée au plus haut sommet du gouvernement, lors d’un conseil ministériel qui s’est tenu le 26 décembre. Des membres de la famille de Falikou Coulibaly ont été reçus, dès le lendemain du crime, par le ministre chargé des Droits de l’homme. Le même jour, la justice tunisienne a appréhendé les cinq individus impliqués dans l’agression, obtenant les aveux du meurtrier lors de sa garde à vue.
Nécessité d’un dialogue
« Au lendemain du drame, le comité exécutif de l’association a tout de suite essayé d’en savoir plus sur les circonstances de l’agression. Nous avons su, par l’intermédiaire d’amis ivoiriens en Tunisie, que ce crime crapuleux n’avait pas de motifs racistes. Face à la précipitation de certains médias dans la qualification xénophobe de ce crime, cela méritait d’être clarifié », confirme à Jeune Afrique, Mahrez Karoui, vice-président de l’association des Tunisiens en Côte d’Ivoire.
L’association estime toutefois que ce drame relance opportunément le débat quant au climat raciste qui persiste dans le pays.
Nous souhaitons initier une mobilisation contre les préjugés qui persistent de part et d’autre du Sahara
« En Tunisie, il n’existe pas de parti qui revendique ouvertement une idéologie xénophobe, et pourtant le racisme persiste dans l’espace public. Avec les autres membres de l’association, nous avons profiter de l’occasion pour rappeler les autorités à leurs responsabilités afin qu’elles mettent en place toutes les mesures à même de faciliter l’application de la loi contre les discriminations », poursuit le vice-président.
« Depuis Abidjan, nous avons lancé un dialogue avec les associations présentes ici. Nous souhaitons initier une mobilisation contre les préjugés qui persistent de part et d’autre du Sahara », conclut Mahrez Karoui.
Ras-le-bol
L’agression a réveillé un sentiment de malaise chez une grande partie des résidents subsahariens en Tunisie. L’ambassade de la Côte d’Ivoire dans le pays a été prise d’assaut, lundi 24 décembre, par des manifestants qui réclamaient justice. Et l’arrestation du meurtrier et de ses complices n’a pas réussi à calmer les esprits.
Du côté de la société tunisienne, le débat est relancé. Des articles dénonçant le racisme – notamment la lettre ouverte d’une étudiante malienne, datant de 2014 – réapparaissent sur les réseaux sociaux.
Depuis la révolution de janvier 2011, la lutte contre les discriminations envers les minorités ethniques ou sexuelles s’est démocratisée. C’est au terme d’un travail de longue haleine que la société civile a réussi à imposer une loi pénalisant les discriminations, en octobre 2018.
Malgré leur persistance, celles-ci sont aujourd’hui dévoilées et critiquées. Elles font régulièrement l’objet de reportages ou d’enquêtes dans la presse locale et internationale.
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