Maroc : le parquet veut faire appliquer la nouvelle loi sur le travail domestique

Dans une circulaire, le ministère public a demandé aux autorités judiciaires de veiller au respect d’une loi offrant de nouveaux droits aux travailleurs domestiques, adoptée en octobre mais très peu appliquée.

Mohamed Abdennabaoui a été nommé chef du parquet en avril 2017. © YouTube/ Kech TV

Mohamed Abdennabaoui a été nommé chef du parquet en avril 2017. © YouTube/ Kech TV

CRETOIS Jules

Publié le 2 janvier 2019 Lecture : 2 minutes.

Le ministère public a émis le 6 décembre dernier une circulaire – rendue publique à la fin du mois – , à l’attention des responsables judiciaires, les exhortant à « prendre les mesures nécessaires pour mettre en application les dispositions de la loi fixant les conditions de travail et d’emploi des travailleuses et travailleurs domestiques », selon le quotidien Le Matin.

La loi qu’il appelle à faire respecter a été adoptée le 2 octobre dernier. « Le Parlement l’a approuvée le 26 juillet 2016, mais les autorités ont retardé son entrée en vigueur pour adopter les décrets d’application correspondants », rappelait alors l’ONG Human Rights Watch (HRW).

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>>> À LIRE – Maroc : la nouvelle loi sur les travailleurs domestiques loin de faire l’unanimité

Depuis octobre, les travailleurs domestiques doivent disposer d’un contrat de travail et ont droit à une couverture sociale. La loi prévoit aussi différentes dispositions : un repos hebdomadaire, fixé à un jour par semaine, ainsi qu’un salaire minimum de 1 542 dirhams (environ 140 euros) par mois. Le texte laisse encore cinq ans de tolérance pour l’emploi des 15-18 ans, avant de le proscrire complètement.

Une centaine de contrats établis en deux mois

Le texte avait été promulgué suite aux dénonciations par une large partie du tissu associatif et de la presse de la situation « catastrophique » des « petites bonnes ». « Certains domestiques mineurs (travaillent) 12 heures par jour, sept jours sur sept, pour un salaire d’à peine 100 dirhams par mois », rapportait en octobre HRW. Les journaux faisaient aussi régulièrement état de terribles histoires, tenant autant du fait divers que du droit social. Le statut précaire des travailleurs domestiques et le maintien de ce secteur dans l’informel ont souvent été pointés du doigt pour expliquer en partie ces mauvaises conditions de travail.

Si la nouvelle loi a été saluée par la société civile et les syndicats, elle ne place cependant pas les travailleurs sur un pied d’égalité en terme de volume horaire et de salaire minimum. Très rapidement après son adoption en octobre, des voix avaient relevé un outillage possiblement inadéquat. Les mécanismes de plainte ou de conciliation ne prévoient notamment pas de délai ou de durée de procédure. La crainte était de voir les employés empêchés, dans les faits, de pouvoir faire respecter leurs nouveaux droits. Ainsi, deux mois après l’entrée en vigueur de la loi, des associations et des médias marocains relevaient que le nombre de contrats dressés était faible, si ce n’est insignifiant, ne dépassant pas la centaine.

La circulaire appelle les substituts du procureur à recevoir les PV d’inspecteurs du travail et les requêtes relatives à l’application de la nouvelle loi

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C’est à ces inquiétudes que le parquet, qui reconnaît que ces travailleuses et travailleurs constituent une « catégorie vulnérable », essaie de répondre. La circulaire appelle à communiquer avec toutes les parties concernées, notamment les inspecteurs du travail, et surtout à charger un ou plusieurs substituts du procureur de recevoir dans chaque tribunal les procès-verbaux et les requêtes relatives à l’application ou des infractions à la nouvelle loi.

Un autre sujet soulevé par la société civile a été que la loi ne prend pas en considération le fait qu’une certaine partie de ces travailleurs domestiques sont étrangers. En 2014, le consul honoraire des Philippines à Casablanca assurait que 3 000 ressortissantes de son pays travaillaient dans des foyers marocains. Des travailleurs étrangers potentiellement effrayés, s’ils venaient à réclamer leurs droits, à l’idée de perdre leur statut de résident ou d’être confrontés à des ennuis avec les autorités.

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