Maroc : la Cour des comptes pointe la « gestion hasardeuse » de la Caisse de dépôts

Dans son dernier rapport, la Cour des comptes marocaine a relevé plusieurs dysfonctionnements à la Caisse de dépôts et de gestion, le bras financier de l’État, qui souffre selon elle d’une gestion approximative.

Le président de la Cour des comptes, Driss Jettou, lors d’une conférence de presse à Helsinki le 7 avril 2006, lorsqu’il état chef du gouvernement. © KALLE PARKKINEN/AP/SIPA

Le président de la Cour des comptes, Driss Jettou, lors d’une conférence de presse à Helsinki le 7 avril 2006, lorsqu’il état chef du gouvernement. © KALLE PARKKINEN/AP/SIPA

Publié le 8 janvier 2019 Lecture : 3 minutes.

Une fois de plus, c’est un rapport accablant qu’a publié la Cour des comptes en début de cette semaine. Les magistrats de Driss Jettou ont rendu visite au bras financier de l’État, la CDG, et ils ont relevé plusieurs problèmes qui pèsent lourdement sur le bon fonctionnement de cette institution.

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« La mission avait pour objectif d’apprécier les aspects institutionnels et de gouvernance, le pilotage stratégique, la mobilisation et l’investissement des ressources ainsi que la politique de filialisation », explique notamment le rapport de le Cour des comptes de 97 pages, qui pointe notamment le fait que la CDG n’est pas encore dotée d’un conseil d’administration dûment constitué et siégeant en véritable organe de décision, d’administration et de contrôle du groupe.

Concentration des pouvoirs

En conséquence, c’est le directeur général qui cumule des pouvoirs de gestion très étendus, allant de l’investissement à la création de nouvelles filiales ou activités en passant par les recrutements et les nominations. « Cette concentration de pouvoirs entre les mains d’une seule personne n’est pas en adéquation avec les règles de bonne gouvernance universellement admises. Elle ne favorise pas l’instauration d’une maîtrise des risques, indispensable à la sécurisation des ressources confiées à l’établissement », pointent les rédacteurs du rapport.

Les experts ont en outre constaté que la Commission de surveillance de la CDG – composée de deux membres de la Cour suprême, du ministre de l’Économie, du ministre des Finances et du Gouverneur de la Banque du Maroc, ou de leur représentant – n’a aucun pouvoir décisionnel sur l’ensemble des activités de la CDG, ne pouvant que délivrer des conseils.

Les auteurs du rapport regrettent aussi que cette instance soit restée la même depuis 1959, sans que les décideurs n’aient pris l’initiative de moderniser sa structure, malgré la diversification de ses activités et une explosion du nombre de filiales et participations – de 80 en 2007 à 143 en 2017.

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Risques élevés

La CDG a, en effet, commencé comme un organisme collecteur de l’épargne et investisseur en bons du Trésor, avant de devenir un groupe multi-métiers. Elle est peu à peu devenue un opérateur actif qui investit dans des activités plus risquées, notamment en matière de développement territorial, et a lancé énormément de projets ces deux dernières décennies. Mais selon la Cour des comptes, les mécanismes de suivi ont été insuffisants et le degré d’atteinte des objectifs fixés par les plans stratégiques n’a pas été correctement évalué.

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« L’examen de l’emploi des ressources par la CDG a permis de relever des observations liées notamment au processus de prise de décision, au cadrage des opérations d’investissement, ainsi qu’aux conditions de gestion et au rendement des différents portefeuilles », déplore le rapport.

Résultat, une situation déséquilibrée de la structure des actifs détenus et des risques élevés. Une politique qui, in fine, a amené la CDG à consommer ses fonds propres en accéléré. Le bras financier de l’État se retrouve avec un rendement du portefeuille en baisse, une remontée de dividendes faible et non régulière et une situation financière alourdie par le poids des charges d’intérêts.

Refondre le cadre juridique

La Cour des comptes pointe en outre les résultats mitigés des différentes filiales et participations : si CDG-établissement public, Fipar-Holding et la banque CIH contribuent positivement aux chiffres du groupe, ce n’est pas le cas de la CDG-Développement et de la CGI, qui sont dans le rouge.

En conclusion, la Cour des comptes conseille de procéder à la refonte du cadre juridique et institutionnel régissant la Caisse de dépôts et de gestion, de manière à ce qu’il puisse se conformer aux meilleures pratiques de gouvernance d’entreprise. L’institution doit aussi renforcer le dispositif de contrôle interne et mettre en place un dispositif de gestion des risques à l’échelle du groupe.

Il est aussi recommandé à la CDG d’assortir ses choix stratégiques de plans opérationnels réalisables selon un échéancier précis et  de mécanismes d’évaluation et de suivi.

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