[Chronique] Nigeria : haro sur les voleurs de slips destinés à des rituels maléfiques
Au Nigeria, les voleurs de sous-vêtements seront-ils désormais inculpés pour tentative de meurtre ? Le délit est moins anodin qu’il n’y paraît.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 10 janvier 2019 Lecture : 2 minutes.
C’est la police nigériane qui vient de s’emparer publiquement, et sans rire, de cette affaire de recrudescence de vols de slips et de caleçons. Cette poussée d’autorité fait suite à l’arrestation, la semaine dernière, d’un détrousseur à Akure, dans l’État d’Ondo.
Dans un message Instagram, c’est avec un ton grave qu’une des porte-parole de la police, Dolapo Badmos, a confirmé que l’homme interpellé détenait un sac en nylon rempli de lingerie et de serviettes hygiéniques. Il aurait échappé de peu à un lynchage populaire. Ajoutant encore de la dramaturgie au scénario, la policière a précisé que les voleurs de dessous pourraient dorénavant être accusés de tentative de meurtre et non de vol, dans ce pays qui fait gonfler les statistiques des condamnations à la peine de mort.
Les brigades du slip en action
La fascination des déviants pour les sous-vêtements n’est pas un phénomène spécifiquement africain. Les cordes à linge du monde entier sont souvent délestées de leurs habits les plus intimes. Dans la région française de Vendée, un groupe Facebook « Mes sous-vêtements m’appartiennent » avait même été créé. Pourtant, contrairement à ce que promet la police nigériane, les fétichistes américains ou européens sont, en général, condamnés à des peines réservées aux petits délits comme le larcin ou le voyeurisme.
Certains propriétaires des vêtements intimes seraient effectivement morts prématurément
Destinés à des rituels maléfiques ?
Si les « brigades du slip » sortent aujourd’hui de leurs gonds, c’est que les sous-vêtements dérobés ne sont pas simplement utilisés comme ersatz d’étreintes charnelles. Les voleurs pris la main dans le slip avouent généralement avoir utilisé les culottes pour des rituels maléfiques. Or, certains propriétaires des vêtements intimes seraient effectivement morts prématurément.
Les enjeux apparaissent alors d’une tout autre dimension que celle de l’onanisme honteux. Ils suscitent la constitution de réseaux de cambrioleurs allant d’enfants dépouilleurs de jardins à du personnel de maison spécialisé dans la collecte des linges après rapports sexuels de leurs propriétaires.
La préméditation d’assassinat n’est-elle pas avérée, pour peu que le manipulateur croit à la force de la magie noire ?
Les plus cartésiens ergoteront qu’il est surréaliste de provoquer le décès d’un individu par la simple manipulation à distance de son caleçon et qu’il est donc insensé d’inculper un voleur de slip pour meurtre. Mais la préméditation d’assassinat, elle, n’est-elle pas avérée, pour peu que le manipulateur croit à la force de la magie noire ? « C’est l’intention qui compte », déclarait, il y a peu, les gens déçus par leurs cadeaux de Noël. De toute façon, la promesse de Dolapo Badmos sur les réseaux sociaux ne cadre, pour l’instant, avec aucune procédure conforme à la Constitution nigériane.
Aux États-Unis, fin 2013, le dénommé Denver Lee St Clair avait bel et bien été assassiné par son beau-fils Brad Lee Davis qui l’avait asphyxié avec l’élastique d’un slip. Dans le doute, boycottons les sous-vêtements…
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