Afrique centrale : les dirigeants de dix établissements bancaires sanctionnés par l’autorité régionale
La Commission bancaire d’Afrique centrale (Cobac) à infligé des blâmes aux présidents et directeurs des filiales de six banques et d’un institut de microfinance. En cause, la « détention injustifiée des devises à l’extérieur », mais aussi des violations des règles liées à la lutte anti-blanchiment et le non respect des normes prudentielles.
Abbas Mahamat Tolli, le président de la Commission bancaire d’Afrique centrale (Cobac), par ailleurs gouverneur de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac), a infligé des blâmes aux dirigeants de dix établissements qui font partie de l’échantillon constitué par le régulateur pour recevoir des contrôles entre juin et juillet 2018. Ces sanctions administratives, infligées le 22 septembre 2018, viennent d’être rendues publiques.
Les filiales des groupes BGFI au Cameroun, au Gabon et en Guinée équatoriale), d’Afriland First Group au Cameroun et en Guinée équatoriale), d’Ecobank au Cameroun et en Centrafrique sont concernées, ainsi qu’UBA Cameroun et Citibank Gabon.
Le président du conseil d’administration et le directeur général adjoint du Crédit communautaire d’Afrique (CCA), une institution de microfinance à l’époque des faits n’y échappent pas, car les établissements de ce type sont obligés de passer par des banques pour des opérations avec l’extérieur. Mais la nouvelle directrice générale de CCA Bank – qui a entre-temps obtenu un agrément bancaire – est épargnée.
Des pratiques qui se sont intensifiées ces deux dernières années
Les responsables de Société générale de Guinée équatoriale reçoivent un simple avertissement, la Cobac ayant reconnu leur bonne foi face aux infractions à la réglementation de change.
Il est reproché entre autres aux dirigeants sanctionnés un défaut de rapatriement des devises, une détention injustifiée d’avoirs extérieurs, la non constitution de dossiers de domiciliation au moment des exportations et des importations de fonds ainsi qu’une violation des règles liées à la lutte anti-blanchiment, et le non-respect des normes prudentielles, notamment celles portant sur le contrôle interne et les positions de change.
Ces pratiques se sont intensifiées ces deux dernières années, au moment où la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) connaissait une tension sur ses réserves de change depuis 2014 et le début de la crise économique.
Comportement spéculatif
Ce comportement des banques se double du peu d’empressement des États à rapatrier leurs recettes d’exportation. Une préoccupation soulevée le 25 octobre 2018 par le président de la Cemac, Daniel Ona Ondo, lors du sommet extraordinaire de la Communauté, à Ndjamena. « Le réserves de change se situent en-deçà des trois mois d’importation requis, malgré la remontée des cours du pétrole et les appuis budgétaires reçus des bailleurs », déplorait-il.
Pour faire le point, Halilou Yerima Boubakary, le secrétaire général de la Cobac, a donc envoyé des missions de contrôle dans ces banques durant les mois de juin et de juillet derniers. « Les résultats montrent que toutes sont en infraction, car elles ont profité de cette pression sur les réserves pour adopter un comportement spéculatif », relève une source proche du dossier.
En fait, les établissements ont l’obligation de rapatrier les devises mises à leur disposition par les opérateurs économiques (les exportateurs principalement) et les résidents de la zone dans un délai de trente jours, pour les remettre à la banque centrale. Or les délais n’ont fait que s’allonger, les banques profitant également de l’absence d’un dispositif de surveillance au sein de la Beac.
D’autres contrôles en cours
Pour corriger le tir, Abbas Mahamat Tolli a mis sur pied dès octobre une cellule spécialisée au sein de la banque centrale. Et un logiciel dédié est en cours d’acquisition. Par ailleurs, d’autres contrôles sont en cours auprès d’une dizaine de banques, congolaises, tchadiennes et centrafricaines notamment.
Entre temps, un règlement communautaire a été adopté le 21 décembre 2018 pour compléter les sanctions administratives à l’égard des dirigeants par des sanctions financières.
Les effets des premières mesures se ressentent déjà. « Les banques ont fait des efforts pour rentrer dans la norme. Les ressources de notre compte d’opérations évoluent positivement et viennent même d’atteindre 5 milliards d’euros, chose que nous n’avions plus observée depuis trois ans », souligne notre source.
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