Douloureux accord

Après près d’un an de négociations, le gouvernement devrait enfin trouver un terrain d’entente avec le Fonds monétaire international.

Publié le 26 avril 2004 Lecture : 4 minutes.

Signera ? Signera pas ? Attendu depuis le mois de septembre 2003, l’accord entre le Gabon et le Fonds monétaire international (FMI) pourrait être conclu dès la fin mai prochain. En tout cas, du côté de Bercy, comme on appelle couramment à Libreville l’immeuble qui abrite le ministère de l’Économie et des Finances, on se dit optimiste sur l’issue des négociations. À la suite de la mission du FMI qui s’est rendue à Libreville à la fin du mois de février, certains estiment proche le retour en grâce du Gabon auprès des autorités de Bretton Woods. Il pourrait peut-être même intervenir durant la seconde quinzaine du mois de mai, soit quasiment un an après la signature de la lettre d’intention par le gouvernement.
« Depuis le mois de juin 2003, le fil du dialogue n’a jamais été rompu avec les experts du FMI, explique un proche du dossier. En revanche, nous avons rencontré des obstacles au niveau de son conseil d’administration. Les représentants américains, britanniques et danois ont fait savoir qu’ils ne voulaient pas « signer un chèque en blanc » en notre faveur. Ils ont demandé que l’on nous impose une nouvelle période probatoire. Depuis, les conditions fixées ont été satisfaites : les arriérés qui devaient être apurés l’ont été, la Commission nationale de lutte contre l’enrichissement illicite a été installée, et le budget a été exécuté conformément aux prévisions. »
Parmi les exigences de Bretton Woods figurait également l’avancée des privatisations. Les actifs d’Agrogabon (palmier à huile), d’Hévégab (hévéa) et de l’ex-Sogadel (Société gabonaise d’élevage) ont été cédés en bloc au groupe belge Siat (Société d’investissement pour l’agriculture tropicale). Pour cette transaction, le repreneur a dû signer un chèque d’environ 3 milliards de F CFA (4,5 millions d’euros). Peu de temps auparavant, l’Office des ports et rades du Gabon (Oprag) a vu une partie de ses activités transférées, pour une durée de vingt-cinq ans, à la Société d’investissement et de gestion des ports et rades du Gabon (Sigeprag), filiale du groupe espagnol Progosa Investment/Puertos de Las Palmas. Quant à l’ouverture du capital de Gabon Télécom, elle est imminente : le lancement de l’appel d’offres est prévu pour le mois de juin.
Une fois son dossier validé par le Fonds, le Gabon devrait bénéficier d’un premier programme d’une année. À l’issue de celui-ci, un second – de trois ans – avec, à la clé, l’accès aux dispositions d’allégement de la dette arrêtées au sommet du G8 d’Évian en juin 2003, en faveur des pays à revenu intermédiaire (PRI). Cet accord triennal sera appuyé par une facilité de crédit élargi, et permettra au pays de renégocier avec le Club de Paris sa dette bilatérale, dont l’encours est estimé à plus de 2,5 milliards de dollars (1 500 milliards de F CFA), et dont environ la moitié reste due à la France. Le concours financier du FMI pourrait atteindre 135 millions de dollars (78 milliards de F CFA) décaissés sur trois ans, en fonction de l’avancée des réformes.
Les restructurations macroéconomiques semblent sur la bonne voie, et les perspectives de croissance relativement encourageantes. La hausse du PIB prévue pour 2004 pourrait atteindre 2 % en 2004, contre 2,5 % l’année précédente. Toutefois, la production pétrolière continue de baisser (13 millions de tonnes en 2003), entraînant une diminution des revenus liés aux hydrocarbures. Selon la loi de finances 2004, pour la première fois depuis bien longtemps, les recettes non pétrolières du pays seront supérieures aux recettes pétrolières : 465 milliards de francs CFA pour les premières, contre 431 milliards pour les secondes. Une véritable révolution pour cet « émirat » qui a longtemps profité de l’or noir comme d’une manne inépuisable.
Compte tenu de cette nouvelle donne, l’objectif de contenir la masse salariale de la fonction publique au niveau de 7 % du PIB conduira certainement les autorités à faire des sacrifices. Sur les 45 000 agents que compte l’État, près de 5 000 devront être licenciés à moyen terme. Pour éviter que la potion ne soit trop amère, le gouvernement a voulu étaler ce chantier sur la durée. Dans un premier temps, il s’est attaché à faire accepter par les agents de l’État la baisse de certaines rémunérations ainsi que la disparition de primes et d’autres avantages réservés à la fonction publique. Les premiers dégraissages n’interviendront sans doute pas avant décembre 2005.
Quant à la campagne électorale qui s’annonce, on sait que ce genre de période est propice à tous les dérapages budgétaires. Et que cette perspective pourrait retarder d’autant la signature d’un accord avec le FMI. Pourtant, les conseillers de Paul Toungui, le ministre de l’Économie et des Finances, sont confiants. « Mieux vaut signer cet accord avant la présidentielle : si le pays est sous programme d’ajustement durant la campagne, cela peut lui éviter de renouveler les excès du passé. »

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