Urgences cardio-vasculaires
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En France, l’urgence cardio-vasculaire (UCV), infarctus le plus souvent, est une course contre la montre pour arriver à l’hôpital moins de trois heures après le début des symptômes (la moyenne est encore à cinq heures). Qu’en est-il en Afrique subsaharienne ? Une étude multicentrique récente (Archives des maladies du cur, décembre 2006) apporte des réponses. Ce travail, dont il faut remercier les auteurs, concerne trois hôpitaux en zone de « forêt » (Abidjan, Yaoundé, Libreville) et quatre hôpitaux en zone de « savane » (Dakar, Nouakchott, Ouagadougou, N’Djamena).
Hélas ! le délai avant hospitalisation a été en moyenne de sept jours. La prise en charge pré-hospitalière est exceptionnelle puisque 6 % seulement des patients arrivent en ambulance, dont 2 % peuvent être soignés. Les autres viennent comme ils peuvent, en bus, en taxi, en voiture, à moto, à vélo ou même à pied.
Donnée essentielle, les malades sont jeunes : 51 ans en moyenne contre 65 en France. Surtout, 26 % ont de 20 à 40 ans. Au-delà de 40 ans, la répartition est à peu près homogène dans chaque décennie. Cette répartition au long de la vie résulte de la nature des maladies chroniques sous-jacentes dont les plus fréquentes sont : l’hypertension artérielle (HTA), qui atteint surtout les plus de 40 ans ; les valvulopathies rhumatismales, qui touchent les jeunes de 15 à 40 ans ; et les atteintes du myocarde, observées à tout âge. La maladie coronaire est encore minoritaire alors qu’elle est maintenant très présente au Maghreb.
Ces maladies sous-jacentes sont à l’origine des UCV, qui sont surtout des poussées d’HTA, des insuffisances cardiaques graves (voir J.A. n° 2246) et des accidents vasculaires cérébraux. L’infarctus ne vient qu’en quatrième position (voir J.A. n° 2404). La mortalité a été de 21 % avec, fait notable, des décès proportionnellement plus fréquents entre 20 et 29 ans. Cette mortalité résulte de l’état avancé des maladies sous-jacentes et du retard à l’hospitalisation, mais aussi de l’insuffisance de l’équipement des services d’accueil en matériel lourd et, parfois, en matériel courant et en médicaments.
On a noté quelques différences entre savane et forêt. En particulier, les malades sont plus jeunes en savane où les valvulopathies rhumatismales sont plus fréquentes. L’HTA prédomine en forêt. Les organisations internationales ont longtemps négligé les affections cardio-vasculaires en Afrique subsaharienne, prétextant parfois qu’il s’agit de maladies de « riches ». Or, parmi les patients reçus pour UCV, 38 % sont sans travail et plus de la moitié gagnent moins de deux fois le salaire minimum (de 45 à 75 euros par mois selon les pays).
Il est évident que la prise en charge des UCV doit être améliorée en informant mieux la population, en organisant des services d’ambulances médicalisées et en équipant mieux les services d’accueil. Pour les prévenir, il faut mieux traiter les maladies chroniques sous-jacentes. Plus particulièrement, on doit voir disparaître les cardiopathies rhumatismales en traitant par la pénicilline (peu chère) les angines qui en sont la cause.
* Doyen honoraire de la faculté de médecine d’Abidjan, directeur de l’Institut de cardiologie d’Abidjan (1976-1989).
Une étude détaillée peut-être trouvée dans la thèse du Dr Brigitte Sangline-Vidal à Marseille.
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