Sus aux pirates tunisiens !

En Tunisie, où près de 70 000 commerces proposeraient des copies illégales de films, les salles de cinéma ferment les unes après les autres.

Publié le 26 mars 2007 Lecture : 2 minutes.

Pour de nombreux jeunes Tunisiens, majoritairement âgés de 15 à 25 ans, le piratage de DVD est devenu une simple routine, voire un sport national. « Pourquoi payer une place de cinéma quand on peut voir le même film gratuitement chez soi ? », s’interroge Nabil, 23 ans, qui assure n’avoir jamais mis les pieds dans une salle obscure. Comme lui, ils sont des milliers à se débrouiller – soit en copiant eux-mêmes, soit en achetant à bas prix (environ 2 dinars, soit à peine plus de 1 euro), les dernières productions internationales. Pour cela, il suffit d’aller se fournir dans l’un des nombreux commerces de DVD pirates du pays.
Du récent Rocky Balboa au dernier James Bond, Casino Royale, on peut tout trouver dans l’échoppe d’Abdelkader, située à La Goulette, dans la banlieue de Tunis. « Il suffit de commander et, en moins de vingt-quatre heures, je fournis une copie de très bonne qualité », précise le commerçant. « Sans compter qu’avec Internet, on peut télécharger la plupart des films », renchérit Nabil. Ce piratage artisanal s’est considérablement développé en Tunisie. Alors qu’il concernait essentiellement les films américains, il touche aussi et de plus en plus les nouvelles réalisations tunisiennes. « J’ai regardé le documentaire VHS-Kahloucha de Néjib Belkadhi chez moi grâce à une copie DVD piratée pour 1,5 dinar », avoue Nabil. Idem pour les films Making Off de Nouri Bouzid et La télé arrive de Moncef Dhouib. Tous ont été piratés et commercialisés en format DVD.
Réunis le 9 février dernier à Tunis, les réalisateurs et producteurs du pays ont tiré la sonnette d’alarme. D’Ahmed Bahaeddine Attia à Moncef Dhouib en passant par Néjib Ayed, le message est le même : trop, c’est trop. « Si on ne réagit pas, il n’y aura plus de films tunisiens dans les salles », affirme le réalisateur Néjib Belkadhi. Et de pointer du doigt une situation inquiétante puisque le nombre de salles de cinéma est passé de 180 en 1956 à 15 en 2007. Alors qu’on dénombrerait aujourd’hui environ 70 000 commerces de DVD pirates sur le territoire tunisien, dont la moitié dans le Grand Tunis.
À titre d’exemple, si un film est vendu à hauteur de deux copies par boutique, on se retrouve avec 140 000 films achetés et 280 000 dinars (163 000 euros) de manque à gagner. Pourtant, il existe en Tunisie des lois contre les contrevenants, passibles d’amendes pouvant aller de 500 à 5 000 dinars (290 à 2 900 euros). « Mais les sanctions ne sont pas toujours appliquées par les autorités », pestent certains réalisateurs. Signe, peut-être, que les temps commencent à changer : en 2006, le ministère de la Culture a identifié plus de 700 vendeurs de copies illégales de films et enregistré 579 délits. 162 avertissements ont été délivrés, et 98 magasins fermés. « C’est un premier pas, mais il faudra faire davantage », estiment les professionnels du secteur.

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