Lettre ouverte à Tony Blair

Publié le 26 janvier 2004 Lecture : 3 minutes.

Monsieur le Premier ministre, On dit souvent, pour vous défendre, que vous avez accepté de participer à la guerre de George W. Bush en Irak en échange d’une promesse du président américain de contribuer à régler une fois pour toutes le conflit israélo-palestinien. S’il y a eu effectivement un tel engagement, il n’a pas été tenu, et la Grande-Bretagne et vous-même, vous ne vous en tirez pas à votre honneur.
Vous avez jugé bon de faire payer un prix très lourd à notre pays pour votre allégeance aux Américains. Vous avez été traité personnellement de menteur, votre crédibilité a été profondément atteinte, vous avez exposé les intérêts britanniques au terrorisme (rappelez-vous Istanbul), et sans la moindre récompense politique. Le seul fait nouveau sur la question de la Palestine a été un recul. La feuille de route est morte et enterrée. Rien de positif ne peut être attendu de cette administration américaine, surtout en période électorale. L’expansion des colonies israéliennes et la construction des routes continuent dans les Territoires occupés. Dans les mois à venir, le rideau de fer d’Ariel Sharon enlèvera aux Palestiniens tout espoir d’État viable, ce qui est l’intention évidente du Premier ministre israélien. L’avenir est de plus en plus sombre. La colère arabo-musulmane est à son paroxysme, le terrorisme retrouve de nouvelles munitions, et la seule garantie qui attend Israël, c’est l’insécurité.

Sur l’Irak, vous avez été induit en erreur sur deux points essentiels par les services de renseignements. Vous semblez avoir été convaincu que les prétendues armes de destruction massive irakiennes représentaient une menace imminente. Ou bien vos services vous ont trompé, ou bien, pire encore, vous avez décidé de nous tromper, nous tous ! Vous ne paraissez pas avoir compris le véritable programme des conspirateurs-fauteurs de guerre de Washington. Ils étaient bien décidés à renverser Saddam Hussein et à occuper l’Irak quelles que fussent les preuves fournies et la position du Conseil de sécurité et du reste du monde, une décision prise de longue date, comme on le voit maintenant.
Ils étaient la proie d’un fantasme de science-fiction selon lequel mettre la main sur l’Irak changerait la géopolitique de la totalité du Moyen-Orient au profit des États-Unis et d’Israël. On serait curieux de savoir ce qu’on vous a dit à cet égard et ce que vous pensez vraiment.
Vous et votre ministre des Affaires étrangères, Jack Straw, avez dit et répété que vous souhaitiez l’émergence d’un État palestinien indépendant, coexistant avec Israël dans la paix et la sécurité. Pourtant, en faisant la guerre en Irak, vous vous êtes alliés avec les néoconservateurs américains, qui sont totalement opposés à l’autodétermination palestinienne, et par conséquent très dangereux pour les perspectives d’avenir israéliennes. C’est la contradiction flagrante qui est au coeur de votre très imprudente politique au Moyen-Orient.

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Vous devez vous libérer de ces contacts douteux en défendant un règlement juste et équilibré du conflit du Moyen-Orient. Entretenir de bonnes relations avec les États-Unis et Israël, comme vous semblez y tenir a0de l’extrême droite d’Israël et de ses arrogants amis américains.
Le conflit israélo-arabe est la principale cause de la violence terroriste actuelle. C’est la première source de tension entre l’Occident et le monde islamique. Les parties en présence sont manifestement incapables de résoudre le problème à elles seules. Crever cet abcès améliorerait la sécurité dans le monde, comme ne cessent de le répéter les gens bien informés.
Vous devez prendre l’initiative et ne pas laisser la Grande-Bretagne se plier aux quatre volontés de l’Amérique. Vous ne devez pas vous abriter derrière la vieille excuse que les États-Unis sont les seuls à être écoutés par Israël. Vous devez battre le rappel de vos grands partenaires de l’Union européenne, affirmer que l’Europe a un rôle central à jouer pour ramener la paix dans une région vitale pour sa sécurité et sa prospérité.
Par-dessus tout, vous devez agir immédiatement pour arrêter la construction du mur de Sharon. Vous avez déclaré qu’il était « illégal », mais vous en êtes resté là. Une fois qu’il sera construit, le problème peut devenir insoluble sans une inimaginable violence, et vous porterez alors personnellement la responsabilité des conséquences apocalyptiques du bourbier dans lequel les Américains ont plongé le monde arabe avec votre aide enthousiaste.

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