RDC-Rwanda : l’ONU sollicitée pour « contrecarrer » des rebelles rwandais
Après l’annonce de l’extradition de deux cadres du FDLR réclamés par Kigali, Leila Zerrougui a affirmé que les autorités congolaises ont sollicité l’appui de la Monusco pour « contrecarrer » une rébellion contre le Rwanda voisin. Kigali a de son côté lancé un nouveau mandat d’arrêt contre l’ancien général rwandais Kayumba Nyamwasa, accusé de coordonner des mouvements armés dans l’est de la RDC.
Leila Zerrougui, la chef de la Monusco, a affirmé avoir reçu une lettre du ministre congolais de la Défense, Crispin Atama Tabe, sollicitant l’appui de la Monusco « contrecarrer » une rébellion contre le Rwanda voisin, à partir de la RDC. Lors d’une conférence de presse, mercredi, elle a précisé avoir « alerté les autorités rwandaises », et a « salué l’attitude positive et responsable des autorités congolaises », ajoutant « qu’aucune attaque contre le Rwanda à partir de la RDC n’a été enregistrée » par la Monusco depuis le courrier des autorités congolaises, daté du 18 janvier.
La RDC « ne peut accepter de servir de base arrière »
Officiellement, Kinshasa accuse les rebelles du FDLR de comploter avec d’autres groupes rwandais, dont le parti de l’opposition Rwanda National Congress (RNC) du général Kayumba Nyamwasa, pour déstabiliser le pouvoir de Paul Kagame depuis le territoire congolais.
Dans la correspondance adressée à Leila Zerrougui, la représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies en RDC, Crispin Atama Tabe, le ministre congolais de la Défense, sollicitait d’ailleurs l’appui des forces onusiennes pour « contrecarrer » les rebelles rwandais du FDLR « sollicités par le général Kayumba Nyamwasa afin de déstabiliser le Rwanda depuis le territoire congolais ».
La RDC « ne peut accepter de servir de base arrière pour un quelconque mouvement rebelle étranger contre un État voisin » et réclamait ainsi « l’appui des forces de la Monusco aux FARDC », écrivait le ministre.
Les deux cadres des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), dont le porte-parole du groupe rebelle rwandais, La Forge Fils Bazeye, avaient été arrêtés par les forces armées congolaises le 15 décembre dernier à Bunagana, dans l’est du pays.
Le timing de l’extradition interroge certains observateurs
Transférés quelques jours plus tard à Kinshasa, ils ont finalement été extradés vers Kigali la semaine dernière, en plein bras-de-fer diplomatique entre la RDC et l’Union africaine autour de la visite, finalement annulée, d’une délégation de l’UA à Kinshasa. Une annonce dont le timing a interrogé certains observateurs, les autorités rwandaises réclamant l’extradition des deux cadres depuis leur arrestation le 15 décembre.
« Quand on attrape les criminels sur le territoire national, qu’ils sont étrangers et qu’il existe des accords de coopération judiciaire avec leurs pays d’origine, nous avons le devoir de les extrader vers leur pays pour qu’ils puissent y répondre de leurs actes devant la justice », affirme à Jeune Afrique Lambert Mende Omalanga, porte-parole du gouvernement sortant.
« L’Union africaine n’appartient pas au président rwandais ! », martèle-t-il, affirmant qu’il n’y avait pas lieu de négocier avec l’UA car, selon lui, « que l’Union africaine soit venue à Kinshasa, ou pas, cela n’aurait eu aucun impact sur le choix du peuple congolais « .
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Nyamwasa visé par un deuxième mandat d’arrêt
L’ancien général rwandais, Kayumba Nyamwasa en exil en Afrique du Sud depuis 2010 avait récemment été épinglé par le dernier rapport du groupe d’expert de l’ONU sur le Congo sorti fin décembre. Co-fondateur du Rwanda National Congress (RNC), parti d’opposition en exil partisan d’un renversement par la force de gouvernement rwandais et considéré comme « terroriste » par ce dernier, Nyamwasa est accusé de coordonner « un vaste réseau de recrutement » mis en place pour alimenter un groupe armé appelé « P5 » dans l’est du Congo, entre Fizi et Uvira.
Les anciens combattants interrogés dans le rapport présentent ce mouvement armé comme le « groupe de Kayumba Nyamwasa ». Le P5 est, à l’origine une plateforme regroupement différent parti d’opposition dont le RNC, les Forces Démocratiques Unifiées (FDU) de Victoire Ingabire, le PS-Imberakuri, PDP-Imanzi et Amahoro People Congress. « C’est ce rapport de l’ONU qui motive le mandat d’arrêt », confirme une source officielle rwandaise. Condamné par contumace par une cour militaire en janvier 2011 pour « atteinte à la sûreté de l’État », Nyamwasa faisait déjà l’objet d’un premier mandat d’arrêt, précise cette même source.
Ce mandat d’arrêt intervient alors que l’enquête sur l’assassinat de l’ancien chef des renseignements rwandais Patrick Karegeya est toujours devant la justice sud-africaine. Le 21 janvier, le parquet a établi que des « liens étroits » existaient entre les suspects du meurtre de Karegeya et le « gouvernement rwandais actuel », selon une lettre rendue publique lors de l’audience. La justice doit encore déterminer si des poursuites judiciaires doivent être entamées contre les suspects.
Les autorités rwandaises ont toujours nié leur implication de l’assassinat. Interrogé sur l’hypothèse d’une coopération avec la justice sud-africaine dans l’affaire, le ministre de la Justice Johnston Busingye avait émis des réserves. « Nous verrons comment l’Afrique du Sud se comportera (…) il faut que la coopération marche dans les deux sens. Or nous avions nous-mêmes demandé, sans succès, l’extradition de Kayumba Nyamwasa », nous avait-il confié mi-janvier.
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