De Gaulle et la Chine
Publié le 27 janvier 2004 Lecture : 2 minutes.
La décision française de reconnaître officiellement, le 27 janvier 1964, la Chine communiste est une décision « historique ». Rarement il est arrivé qu’un pays occidental, européen et capitaliste décide avec une telle sérénité et une telle confiance de frayer la voie aux représentants de l’idéologie la plus hostile à une nation orientale, asiatique et communiste. Les conséquences psychologiques, c’est-à-dire en l’occurrence politiques, ne vont pas se faire attendre. La décision française brise d’un seul coup « l’isolement » chinois à la manière dont un bateau force un blocus : c’est tout un système qui éclate. C’est le système américain.
L’histoire de ce coup de grâce donné au « système » est à rappeler. En octobre 1963, Maurice Couve de Murville, ministre français des Affaires étrangères, fait un voyage à Washington. Au cours de son entretien avec le président John F. Kennedy, il se voit courtoisement reprocher le caractère publicitaire de la fracassante déclaration du général de Gaulle sur la réunification des deux Vietnam. Le ministre français s’attendait à ce reproche et avait des instructions précises. Non seulement il conteste le bien-fondé du reproche, mais il remercie le président américain de lui donner l’occasion de développer le point de vue du général de Gaulle sur plusieurs aspects de la politique des États-Unis.
Jusqu’au dernier moment, les États-Unis ont tout fait pour dissuader la France de reconnaître la Chine avant 1965. L’opinion américaine acceptera très mal, c’est certain, la décision française. Mais ailleurs ? De Gaulle est en fait en train d’atteindre l’apogée de son prestige dans le Tiers Monde. C’est un destin paradoxal pour un général formé dans les milieux les plus réactionnaires de France. Il y a deux mois, l’un des secrétaires du président de la République mexicaine me tenait le propos stupéfiant que voici : « Le seul concurrent sérieux de Castro, du point de vue de la popularité en Amérique latine, c’est de Gaulle. » Après la reconnaissance de la Chine communiste que sera-ce ?
