Renvoyés spéciaux

Avec le départ de Kofi Annan, ce sont plusieurs dizaines de représentants personnels nommés à tour de bras qui devront rapidement plier bagage.

Publié le 2 janvier 2007 Lecture : 2 minutes.

« J’ai décidé d’offrir mes bons offices et, à l’issue de consultations avec les gouvernements de la région, j’ai décidé de nommer X au poste d’envoyé spécial » Ainsi commençaient invariablement les lettres de nomination adressées par Kofi Annan au Conseil de sécurité de l’ONU durant son règne de dix ans (du 1er janvier 1997 au 31 décembre 2006). Le Ghanéen a utilisé son pouvoir discrétionnaire – quasiment sans limites – comme aucun de ses six prédécesseurs. Il a désigné plus de deux cents personnalités politiques des cinq continents comme « représentant personnel », « représentant spécial », « haut représentant », « envoyé spécial », « conseiller spécial », « coordinateur de haut niveau ».
Parmi les élus, 93 étaient encore en place au 31 décembre 2006 : 29 en Afrique, 11 en Europe, 10 en Asie, 9 au Moyen-Orient, 5 aux Amériques et 29 chargés de questions transversales ou multilatérales, comme, par exemple, la représentante spéciale pour les enfants et les conflits armés (Radhika Coomaraswamy, du Sri Lanka), ou encore le haut représentant pour les pays les moins avancés (PMA), les pays en développement sans littoral et les États insulaires en développement (Anwarul Karim Chowdhury, du Bangladesh).
En tant que « plus haut fonctionnaire de l’Organisation », le secrétaire général avait toute latitude pour recruter librement des « contractuels ». Payés au per diem pendant des semaines, des mois, voire des années, ces « envoyés spéciaux » étaient chargés de rédiger des rapports que le secrétaire général transmettait au Conseil de sécurité pour « attirer [son] attention sur toute affaire qui, à son avis, pourrait mettre en danger le maintien de la paix et de la sécurité internationales ». C’était une fuite en avant ; plus la situation dans un pays se compliquait, plus Kofi Annan multipliait missions et nominations. Le Kosovo a compté jusqu’à 8 représentants ; la Côte d’Ivoire, 4 ; le Liberia, le Soudan, Haïti, l’Afghanistan et l’Irak, 3.
Ces hommes et ces femmes exerçaient leur mission parfois en plus de leurs fonctions officielles. Le coût de la « galaxie Annan » est impossible à évaluer, le mode de rétribution étant indirect (frais de mission), la durée de mission, aléatoire Outre cet aréopage de conseillers, Annan a nommé une dizaine de secrétaires généraux adjoints et formé un « Conseil de gestion » (Senior Management Group) de trente-deux membres issus des différents départements.
Vu l’ampleur de la tâche, son successeur, le Sud-Coréen Ban Ki-moon, s’est donné deux mois pour évaluer avec précision « qui fait quoi, où et comment, et à quoi ça sert ». Ceux dont le mandat ne s’achève pas le 31 décembre – contractuels et autres chargés de mission – ont jusqu’à la fin de février 2007 pour plier bagage. Ceux qui sont fonctionnaires permanents de l’ONU reviendront à leurs fonctions antérieures, jusqu’à nouvel ordre. Des grincements de dents en perspective. BKM, comme on le surnomme déjà, souhaite faire table rase du passé pour redorer le blason de l’institution, terni notamment par les scandales de corruption (contrats « Pétrole contre nourriture » en Irak), d’écoutes téléphoniques (installées par les services américains) et de murs (pendant les opérations de maintien de la paix). L’ONU sort très affaiblie de son affrontement avec les États-Unis après le refus du Conseil de sécurité d’avaliser la guerre de Bush contre l’Irak.

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