« La voix du Cap-Vert » s’est tue

Publié le 25 octobre 2004 Lecture : 2 minutes.

Il chantait les travers de la société et la liberté. Malade depuis plusieurs années, Ildo Lobo, marié et père de trois enfants, s’est éteint le 20 octobre, à l’âge de 51 ans, terrassé par une crise cardiaque, à son domicile de Praia, alors qu’il préparait la sortie de son album Incondicional.
Surnommé par ses compatriotes « la voix du Cap-Vert », Ildo Lobo n’avait pas fait de carrière internationale et ne comptait que deux albums solo à son actif. Pourtant, il était l’un des piliers de la chanson capverdienne, l’égal d’un Bana ou d’une Cesaria Evora. Né à Pedra de Lum, dans l’île de Sal, Lobo avait goûté à la musique dès son plus jeune âge. Son père, Antoninho, à qui il rendit hommage dans l’album Nos morna (1996), était un chanteur reconnu. Grâce à cet héritage, aux textes des plus grands compositeurs, dont Manoel de Novas, Lobo a su tirer le meilleur du patrimoine musical capverdien et émouvoir ses compatriotes en leur susurrant les histoires simples de leur quotidien. Sa morna était poétique, sa coladera gouailleuse. À l’image du personnage.

C’est avec le groupe Os Tubaroes (les Requins), au début des années 1970, qu’il s’impose sur la scène musicale. Devant le micro, il défie les colons portugais, exalte la guerre de libération, chante la gloire du révolutionnaire Amilcar Cabral. Dans « Labanta braço », devenue un classique de la musique capverdienne, il exhorte ses compatriotes à lever les bras et à crier leur liberté. Ildo Lobo n’a jamais caché son engagement politique. D’ailleurs, les membres du groupe passeront longtemps pour les porte-drapeau du nouveau régime marxiste, sorte d’ambassadeurs itinérants du pouvoir dans les manifestations internationales. Ce n’est qu’après la dissolution de Os Tubaroes que Lobo signera chez Lusafrica – le même label que Cesaria Evora – et entamera, à partir de 1996, une carrière solo.
Adulé par le peuple, qui le considérait comme l’un des siens, il habitait la capitale et continuait d’exercer son métier de douanier, par nécessité. La bouteille lui a souvent brouillé la vue mais sans jamais lui faire perdre sa voix avec laquelle il savait embellir les grandes joies et les petites peines du quotidien. Il y a quelques années, lors d’une interview à la radio, il déclarait ne pas aimer les honneurs posthumes et fustigeait ces hommes politiques qui abandonnent les artistes à leur dénuement et s’empressent de rebaptiser les rues à leurs noms après leur mort. Ildo Lobo n’avait besoin ni de médailles ni de rues à son nom. Son plus grand titre de gloire, le peuple du Cap-Vert le lui a offert.

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