Ghislain Moundounga, dans l’ombre des géants
Rares sont les nationaux à avoir créé leur société dans la filière pétrolière. Ghislain Moundounga a sauté le pas. Il y a six ans, il a créé GM Energy. Et ça marche.
Pour Ghislain Moundounga, les affaires marchent bien. À bientôt 40 ans, il fait partie des rares Gabonais à diriger une entreprise de la filière pétrolière dans le pays. Et depuis sa création, en 2008, sa société, GM Energy, est de plus en plus courtisée par les majors du secteur. La raison de ce succès ? Avant de lancer son projet, l’ingénieur a su identifier une niche particulièrement porteuse. En effet, sa PME sous-traite pour les opérateurs internationaux, avant la mise en exploitation des puits, une étape complexe et cruciale de la phase de forage : le traitement des fluides (eau, sel, boues) et la filtration des saumures (impuretés).
Avec une vingtaine de puits forés chaque mois au Gabon, ce type de savoir-faire extrêmement pointu et technique est précieux. « La demande est très forte », confirme Ghislain Moundounga, qui insiste pour que les Gabonais qualifiés se lancent eux aussi dans la sous-traitance pétrolière : « C’est dans leur intérêt et dans celui des compagnies. »
Fierté
En six ans, GM Energy, basé à Port-Gentil, est déjà intervenu sur une quarantaine de sites, décrochant des contrats avec des opérateurs tels que Vaalco, Perenco, StreamOil, ou encore Maurel and Prom. L’entreprise compte désormais vingt employés, « un personnel 100 % gabonais », précise Ghislain Moundounga, non sans fierté. Sa PME a aussi développé ses activités à l’étranger et ouvert des bureaux à Pointe-Noire (Congo), à Douala (Cameroun), à N’Djamena (Tchad), à Casablanca (Maroc) et à Alger.
Au départ, je me suis battu seul. J’ai parfois dû bluffer auprès des opérateurs pour les convaincre
Après des études d’ingénieur en mathématiques à l’université de Metz (est de la France), puis à l’University Technical College (UTC) du Nottinghamshire (Royaume-Uni), en fluides de forage, le jeune Gabonais commence sa carrière au Texas, à Houston (États-Unis), auprès de Schlumberger, numéro un mondial des services pétroliers. Au sein du groupe, il passe ensuite huit années sur des puits de forage entre le Gabon, le Congo, la Guinée équatoriale et la Côte d’Ivoire, avant de rejoindre la branche exploration-production d’hydrocarbures pour l’Afrique centrale d’IHS Energy. Il est d’ailleurs toujours expert-consultant pour cette société américaine d’études et de conseil.
Pas de cadre
En 2008, âgé de 34 ans et doté d’un solide CV, il a finalement décidé de se mettre à son compte. « Au départ, je me suis battu seul pour décrocher des contrats. C’était difficile, principalement parce qu’il n’y avait pas de cadre légal ni d’encouragement de la part du gouvernement. J’ai donc dû parfois bluffer auprès des opérateurs pour les convaincre », explique Ghislain Moundounga.
Bien que le pays produise du pétrole depuis les années 1960, les Gabonais restent largement absents de ce secteur stratégique, qui contribue pourtant à plus de 60 % des recettes de l’État. Il a fallu attendre 2011 pour que soit créée la première compagnie pétrolière nationale, Gabon Oil Company. Et, comme le soulignait récemment le ministre du Pétrole et des Hydrocarbures, Étienne Ngoubou, moins de 20 % des PME gabonaises sont actives aujourd’hui dans la sous-traitance pétrolière.
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Châine de sous-traitance
Ghislain Moundounga estime même que cette part est encore plus faible. « Nous ne sommes pas plus de 5 % à 7 % à travailler dans la véritable sous-traitance de l’industrie pétrolière. Ce qui signifie signer des contrats directement avec les opérateurs et intervenir entre la phase d’exploration et la phase de commercialisation. » Or c’est là que s’effectue 80 % du chiffre d’affaires de la filière… « Pour le moment, poursuit-il, les Gabonais sont surtout présents avec des entreprises intervenant plus bas dans la chaîne de sous-traitance, sur des activités qui rapportent peu de valeur ajoutée. »
En effet, de nombreux obstacles empêchent encore l’entrée des nationaux sur ce marché, au premier rang desquels le déficit abyssal de formation et donc de compétences dans le secteur, ainsi que le souligne une étude réalisée en 2013 par le ministère du Pétrole. Autre problème régulièrement mis en avant par les entrepreneurs locaux : les difficultés d’accès au financement pour le démarrage de leurs activités.
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