Start-up de la semaine : en Tunisie, DataVora scrute les prix et les tendances sur le web pour les sites de e-commerce
Trois ans après sa création, la start-up tunisienne, basée à Tunis, a levé plus de 2,2 millions de dinars (761 000 euros). Elle permet à ses clients d’ajuster leur offre à la concurrence sur le web.
Cofondée en juin 2016 par Hédi Zaher, Oussama Messaoud et Aymen Ferchichi, trois Tunisiens âgés d’une quarantaine d’années, DataVora permet aux e-marchands d’optimiser leur offre sur le web. Chaque jour, elle scrute 2 200 sites de e-commerce et permet ainsi à ses clients de savoir en temps réel quels produits vendent leurs concurrents, à quel prix, à quelle heure et dans quelle zone. « S’ils ajustent quotidiennement leur catalogue et leurs prix à partir de nos données, ils peuvent augmenter leur chiffre d’affaires de 20 à 30 % », estime Hédi Zaher, directeur général de DataVora.
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La recette technologique de la start-up tunissoise a déjà convaincu une vingtaine de clients. Parmi eux, la start-up française Volpy, le site tunisien de e-commerce T-discount ou encore la marque tunisienne de prêt-à-porter Zen ainsi que des multinationales européennes et américaines. Tous bénéficient d’un accès automatique aux données brutes extraites et stockées par DataVora en souscrivant à un abonnement mensuel dont le tarif varie en fonction du volume de données utilisées. « Nous sommes très agressifs : si notre concurrent scrute 200 sites, nous en scrutons 2000. Et nous concentrons tout notre effort commercial sur l’étranger », explique Hédi Zaher, fier de proposer à l’international un produit 100 % tunisien.
Répatriation
En 2011, lorsqu’éclate la révolution tunisienne, le directeur général de DataVora est en France, où il travaille en tant que chercheur à l’Université technologique de Troyes (UTT). « J’ai regretté de ne pas être là. J’avais envie participer à ce qui se décidait dans le pays », raconte ce docteur en informatique qui a débuté ses études d’ingénieur à l’École nationale des sciences de l’informatique (Ensi) en Tunisie. Au lendemain de l’élection de l’Assemblée constituante du 23 octobre 2011, sa décision est prise. Deux mois plus tard, il atterrit à Tunis, où il décroche un poste de directeur technique au sein d’IM Dev, un éditeur de logiciel.
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Début 2015, par l’intermédiaire d’un ami, Aymen Ferchichi, rencontré via les réseaux sociaux lors de la révolution, il fait la connaissance d’Oussama Messaoud. Ce dernier dirige alors une société qu’il a créée, MH Distribution, spécialisée dans la vente de matériel de santé. Autour d’un café, les trois Tunisiens explorent des pistes de collaboration : « Nous réfléchissons ensemble à un marché global, en croissance mais pas encore consolidé, où faire du big data », raconte Hédi Zaher. Après trois heures de discussion, ils en restent là.
Premier million
Le temps d’un week-end, au mois de mai, la même année, Hédi Zaher se penche à nouveau sur la question : « Écoutez, j’ai réfléchi. Nous pourrions aller récolter les prix sur les milliers de pages des sites de e-commerce et proposer des analyses aux e-marchands », leur écrit-il par mail. Le projet répond à leurs critères et séduit aussitôt ses deux acolytes. En décembre 2015, Hédi Zaher veut tester un prototype pendant la période de Noël où les prix varient beaucoup. Il écrit le code permettant de collecter et de stocker les données d’une vingtaine de sites dans quatre des plus gros marchés européens (Allemagne, Espagne, France, Italie). Le 22 décembre, le pilote est lancé, et il marche. Forts de leurs succès, les trois start-upeurs commencent à démarcher des investisseurs.
Début février 2016, à l’occasion d’une rencontre organisée entre entrepreneurs et investisseurs, Oussama Messaoud salue Mohamed Salah Frad, directeur général du capital-investisseur UGFS-North Africa. Il n’a pas le temps de finir son pitch. « Vous avez besoin de combien ? », l’interrompt l’homme d’affaires. « Un million ! », répond le start-upeur, pas certain du montant. Le dimanche soir, le DG de UGFS-North Africa, lui envoie un mail : rendez-vous est pris le mardi suivant.
« La rencontre a durée trente minutes, nous sommes très rapidement entrés dans le concret », raconte Hédi Zaher. Deux mois plus tard, début avril 2016, le deal est bouclé : les trois cofondateurs de DataVora lèvent 1,056 million de dinars (soit 358 000 euros) auprès de Capitalease II, le fonds d’amorçage de UGFS-North Africa et du fonds qatari IntilaQ – 23 autres associés apportent 250 000 dinars (soit 85 000 euros) de love money. Et travaillent désormais, à temps plein, sur le projet. En juin 2016, la société anonyme est officiellement créée.
70 % du chiffre d’affaires à l’export
Lors du Web Summit de Lisbonne, en novembre 2016, DataVora expose la première version de son produit qui couvre 200 sites de e-commerce. La start-up française Volpi, présente à l’événement, l’achète. « Ça a été notre première source de revenus en devises étrangères », insiste Hédi Zaher. Le dinar n’étant libre de change, ce contrat a permis à la start-up de concrétiser ses ambitions puisqu’aujourd’hui, elle réalise plus de 70 % de son chiffre d’affaires à l’export.
En décembre 2017, DataVora a levé 1,2 millions de dinars (environ 403 000 euros) auprès des mêmes investisseurs. Avec un chiffre d’affaires qui double, voire triple, d’une année à l’autre, la start-up se prévaut d’un historique de données à présent suffisant pour faire « de la bonne intelligence artificielle » et ainsi, augmenter la valeur de ses données.
« Nous pouvons déterminer des tendances ‘by design’ et établir des prévisions de prix », explique Hédi Zaher qui compte développer ce type de services. Pour soutenir sa croissance, DataVora prévoit d’ouvrir en 2019 deux filiales, l’une en Europe, la seconde en Amérique du Nord. Pour financer ses projets, la start-up tunisienne lance une troisième levée de fonds, en série A, pour laquelle elle vise entre deux et cinq millions de dollars.
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