Burundi : Bujumbura sous pression au sommet de l’EAC
Le 20e sommet des chefs d’État de l’EAC s’est ouvert vendredi à Arusha, en Tanzanie, après avoir été plusieurs fois repoussé. Point central de la rencontre : le rapport du facilitateur du dialogue interburundais Benjamin Mkapa, alors que le Burundi campe sur ses positions et entend réclamer une discussion sur les tensions avec le Rwanda.
La troisième tentative est finalement la bonne. Prévu le 30 novembre mais reporté au 27 décembre en raison de l’absence du président Pierre Nkurunziza, le 20e sommet des chefs d’État de l’EAC avait finalement été ajourné une seconde fois. Il s’est ouvert vendredi 1er février en présence de quatre chefs d’État : John Magufuli pour la Tanzanie, l’Ougandais Yoweri Museveni, actuel président de l’East African Community, le Kényan Uhuru Kenyatta et le Rwandais Paul Kagame. Le Soudan du Sud est représenté par son ministre du Commerce Paul Mayom Akech.
Une nouvelle fois, comme il le fait depuis 2015 et le début de la crise burundaise consécutive à son troisième mandat, Pierre Nkurunziza a choisi de ne pas se rendre en personne au sommet de l’EAC. Il sera représenté par son premier vice-président Gaston Sindimwo. Si aucune raison officielle n’a été donnée à cette absence, Nkurunziza se sait sous pression au sein du bloc régional, comme en témoigne les échanges épistolaires houleux avec Yoweri Museveni suite au premier report.
Quel avenir pour la médiation ?
La crise au Burundi ne figure pas à l’ordre du jour officiel du sommet mais Benjamin Mkapa, le facilitateur du dialogue interburundais débuté fin 2015 – et resté au point mort depuis – doit présenter son rapport lors du hui-clos des chefs d’État.
L’Union africaine, agacée par l’absence de Pierre Nkurunziza lors du sommet du 30 novembre, pourrait également reprendre la main sur le dossier
À l’issue de cette présentation ces derniers décideront de la suite à donner à cette médiation menée sous l’égide du président ougandais Yoweri Museveni : pousser Pierre Nkrunziza à la table des négociations avec l’opposition où mettre un terme à la tentative de dialogue.
Dans une organisation où l’unanimité est la règle, les bons rapports préservés avec la Tanzanie pourrait s’avérer précieux. L’Union africaine, agacée par l’absence du dirigeant burundais lors du sommet du 30 novembre, pourrait également reprendre la main sur le dossier.
Après le référendum constitutionnel de mai 2018 et le boycott du dernier round des discussions fin octobre par les autorités burundaises, Benjamin Mkapa avait annoncé qu’il renonçait à poursuivre sa mission.
Bujumbura n’a pas l’intention de rester les bras croisés lors du sommet. Gaston Sindimwo aura notamment la charge de soutenir l’idée d’un sommet dédié à ce que Pierre Nkurunziza appelle le « conflit ouvert entre le Burundi et le Rwanda ».
Tension Kigali-Kampala
Dans une lettre datée du 4 décembre, adressée au président en exercice de l’EAC Yoweri Museveni, le dirigeant burundais accusait le Rwanda d’être à l’origine de la crise qui secoue le pays depuis trois ans et de servir de base arrière à des mouvements déstabilisateurs.
Selon une source officiel rwandaise, un tel sommet « n’a pas lieu d’être. » « Il servirait simplement à faire diversion et détourner l’attention des problèmes internes du Burundi », ajoute-elle.
Le Rwanda et l’Ouganda entretiennent également des rapport délicats depuis plusieurs mois. L’arrestation mi-décembre en RDC de deux cadres FDLR soupçonnés de revenir d’un rendez-vous des personnalités haut-placées à Kampala a renforcé les tensions entre Kigali et Kampala.
C’est donc dans ce contexte tendu que le bloc régional tentera de faire avancer, comme à chaque sommet, l’agenda de l’intégration. L’EAC devra aussi se choisir un nouveau président pour succéder à Yoweri Museveni. Selon le principe de rotation en vigueur dans l’organisation c’est le président du Rwanda Paul Kagame qui devrait prendre la suite du dirigeant ougandais, mais l’agenda chargé pour l’année à venir, avec la préparation du sommet des chefs d’État du Commonwealth à Kigali en 2020 et la poursuite des réformes pourrait pousser le Rwanda à passer son tour.
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