Le Sénégal vu par une Marocaine
Je n’y suis pas arrivée en souriant. Et pourtant, j’en suis repartie en pleurant. Ce qui est vrai pour le nord de la France – c’est le propos du célèbre film Bienvenue chez les Ch’tis – l’est aussi pour le pays que j’aime et où j’ai vécu cinq courtes années. Assurément, le charme opère très vite au Sénégal, là où j’ai ressenti les plus fortes émotions qu’il m’a été donné de vivre. J’ai surfé entre le meilleur (souvent), et le moins bon (rarement)Â Mais ce sont les meilleurs souvenirs qui restent !
Le moins bon, sur lequel je passerai très vite, vient des inconvénients d’un pays « en voie de développement » : pauvreté, tourisme de masse irresponsable, mauvais état des routes et éternelles coupures d’électricité Quant au meilleur, une page ne suffirait pas pour le décrire Marocaine de cÂur je suis – et je resterai -, mais aussi sénégalaise d’adoption. Un cheikh que j’ai rencontré au tout début de mon séjour me l’avait affirmé : « Le Sénégal vous ensorcellera On ne l’oublie jamais. Vous verrez : vous y reviendrez après l’avoir quitté ! »
Le Sénégal, c’est d’abord le pays de la Téranga, l’hospitalité légendaire, où l’étranger participe au quotidien de ses hôtes tout en étant traité comme un invité de marque. La convivialité et la palabre sont au cÂur de la vie sociale et s’expriment souvent autour d’un plat unique réunissant petits et grands. La cérémonie du thé, l’ataya, est également un moment important de la journée, surtout pour les jeunes.
La Téranga, la tradition et les femmes
Chez les Sénégalais, chaleureux et accueillants, prêts à faire découvrir aux visiteurs leur pays, les sourires et la générosité sont spontanés. Ils ouvrent facilement leur porte – comme leur cÂur – et vous trouverez toujours sur votre route quelqu’un pour vous aider. Le minimum que vous puissiez espérer est que l’on vous offre un peu de son temps. Un temps d’une autre dimension, que chacun prend pour soi mais aussi pour les autres. « Sénégal, no stress » peut-on lire sur les tee-shirts vendus à la sauvetteÂ
La Téranga vient de loin, puisque le pays est depuis longtemps devenu le carrefour de multiples ethnies – Wolofs, Sérères, Mandingues, Peuls, Toucouleurs et autres Diolas, pour ne citer qu’eux – comme celui de nombreuses communautés étrangères – libanaise, mauritanienne ou marocaine. Cette dernière, en particulier, est très appréciée en raison d’une amitié sénégalo-marocaine séculaire. Accueillant, le Sénégal l’est aussi pour les religions. Il est très courant d’y trouver, au sein d’une même famille, plusieurs confessions. Les mariages interreligieux sont nombreux et parfaitement tolérés. D’autant que ce qui fonde la solidarité familiale, c’est la tradition.
Celle-ci prône d’abord le respect des anciens : quiconque est plus âgé que vous mérite votre attention et vos égards. On doit faire traverser la chaussée à une personne âgée et la faire passer devant soi dans une file d’attente On qualifie respectueusement l’aîné de « Grand », ou de « Vieux », selon son âge. Et puis, il y a aussi le respect de la femme : la maman est sacrée, on lui rend grâce tous les jours d’avoir donné la vie. « Merci maman ! » peut-on lire sur les minibus très colorés qui sillonnent en trombe Dakar. On doit protéger sa sÂur – ou les femmes de sa famille – de la même manière que sa voisine. La condition féminine est peut-être l’une des meilleures d’Afrique. Bref, le respect de ces valeurs concourt à faire du pays une mosaïque de personnes, de religions et de coutumes qui cohabitent dans un esprit de paix et de tolérance inoubliable.
Si un jour ma famille et moi avons quitté le Sénégal – à regret -, le pèlerinage annuel au pays de Senghor reste un rituel incontournable. D’abord Dakar et le bonheur de retrouver, dès notre descente d’avion, des sensations anciennes et profondément ancrées dans nos cÂurs Le plaisir de sentir la foule qui se presse, les odeurs de la mer, les couleurs des boubous Cette impression étrange de n’être jamais partie, que le temps, ici, s’est arrêté dans mon souvenir Et quel plaisir de voir mes enfants baragouiner en wolof, palabrer tranquillement avec les gens en leur tenant la mainÂ
Dieuredieuf Yalla* de m’avoir donné la chance de connaître le Sénégal !
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