La faim n’est pas inévitable

Publié le 25 août 2003 Lecture : 3 minutes.

La faim n’est pas quelque chose de nouveau dans le monde. C’est, en effet, un problème dominant dans les communautés rurales des pays secs, pas seulement en Afrique, mais dans toutes les régions du monde, du fait du recul des terres arables et de leur vulnérabilité face à la sécheresse. La dégradation de l’environnement, souvent causée par la coupe des arbres et l’accroissement de la population, a entraîné la diminution de moitié de la production de grain en Haïti par rapport à ce qu’elle était il y a quarante ans. En Afrique de l’Ouest, 36 % des enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition parce que la désertification réduit progressivement la superficie des terres arables et pâturables disponibles dans la sous-région.
Quatorze millions de personnes risquent de mourir de faim en Éthiopie, en raison d’une sécheresse sévère qui a dévasté la production agricole. En Afrique australe, 60 millions de personnes sont également menacées par la famine. En Inde, 2,5 millions d’hectares deviennent peu à peu désertiques chaque année en raison de la déforestation et de périodes de sécheresse. Dans le monde entier, les terres arables sont passées de 0,32 hectare par personne au début des années 1960 à 0,21 hectare à la fin des années 1990. Et on s’attend à ce que cela diminue encore pour atteindre 0,16 hectare en 2030, posant une sérieuse menace pour la sécurité alimentaire et pouvant déclencher des conflits à propos des rares ressources.
De fait, la vie d’environ 1,2 milliard de personnes, dépendant pour la plupart de la terre pour leurs besoins, et plus globalement les pauvres du monde dans 110 pays sont menacés par la désertification. En conséquence, 135 millions de personnes – l’équivalent des populations de la France et de l’Allemagne réunies – risquent d’être déplacées. Parmi elles, les quelque 60 millions de personnes qui vivent en Afrique subsaharienne seront probablement contraintes de quitter les zones désertiques pour aller en Afrique du Nord ou en Europe dans les vingt prochaines années. Entre 700 000 et 900 000 Mexicains quittent chaque année leurs terres d’origine appauvries, pour devenir travailleurs immigrés aux États-Unis. Du moment que la cause première de la faim restera la dégradation des terres, les communautés rurales seront perpétuellement accablées par l’insécurité alimentaire. L’aide alimentaire ne peut être qu’une solution rapide qui exacerbe la dépendance face à l’extérieur et qui n’est ni durable, ni conductrice de solutions définitives à ces problèmes.
Il y a neuf ans, en 1994, la Convention des Nations unies pour la lutte contre la désertification (UNCCD) a adopté des recommandations pour l’ensemble de la communauté internationale. Depuis, beaucoup de projets couronnés de succès ont été implantés ici et là. Les leaders mondiaux ont reconnu que la Convention est « un instrument clé dans l’éradication de la pauvreté et le développement durable » lors du Sommet mondial pour le développement durable à Johannesburg en 2002. Mais, toutefois, pour atteindre l’objectif du Millenium du développement des Nations unies, qui est de réduire de moitié la proportion de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté d’ici à 2015, beaucoup de choses restent à faire.
Les dirigeants mondiaux, parlementaires, intellectuels, politiques, représentants d’Organisations non gouvernementales et internationales sont réunis pour deux semaines à La Havane, à Cuba, (25 août-5 septembre) dans le but de poursuivre les efforts entrepris. Il s’agit de la plus importante réunion rassemblant des hauts responsables officiels et des experts, afin de discuter des meilleures manières de combattre la désertification et de la question de la sécurité alimentaire, de la coopération entre science et technologie, des moyens d’améliorer les mécanismes de financement des projets antidésertification, etc. C’est aussi une occasion pour la communauté internationale de réaffirmer son union pour combattre enfin la dégradation des terres, qui affecte les deux tiers des terres agricoles mondiales, en tant que cause et conséquence de la pauvreté. Car la faim n’est pas inévitable. C’est notre rôle à tous, au niveau international, national ou local, en tant que simple citoyen ou en tant que décideur, de lui trouver des solutions radicales.

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