[Tribune] La jeunesse africaine mérite un musée qui reflète son histoire et son identité

Si la décision du président français d’enclencher un retour du patrimoine africain à l’Afrique est une bonne décision pour l’architecte nigériane Olajumoke Olufunmilola Adenowo, cette dernière appelle désormais à la création d’un musée pour accueillir ces œuvres.

Au Musée du Quai Branly, des statues en bois du 19e siècle originaires du royaume du Dahomey (aujourd’hui le Bénin). © Michel Euler/AP/SIPA

Au Musée du Quai Branly, des statues en bois du 19e siècle originaires du royaume du Dahomey (aujourd’hui le Bénin). © Michel Euler/AP/SIPA

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Publié le 11 février 2019 Lecture : 3 minutes.

En 2016, Emmanuel Macron avait déclaré vouloir « un retour du patrimoine africain à l’Afrique ». Ce n’était pas une promesse en l’air. Le rapport d’étude qu’il a par la suite commandé sur la restitution du patrimoine culturel africain a montré que près de 90 % du patrimoine culturel du continent se trouve actuellement au-delà de ses frontières. Selon les auteurs, entre 1885 et 1960, environ 46 000 des 90 000 œuvres africaines conservées au Musée du quai Branly ont été « acquises » par des Européens. Celles-ci, selon les conclusions du rapport, devront probablement être rendues à leur pays d’origine.

Il y a peu d’endroits sur Terre dont l’histoire et la culture ont été autant ignorées. Au cours de l’ère coloniale, le continent a systématiquement été dépouillé de ses trésors artistiques. Des trônes et des portes élégantes ont été retirés des palais et des lieux de culte. Des sculptures ont été arrachées des murs. Certaines de ces œuvres d’art ont été traitées comme un « butin de guerre » ; d’autres volées par des opportunistes ou « achetées » à des prix absurdement bas ou sous la menace des armes.

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La décision du président français de restituer 26 œuvres au Bénin est donc la bienvenue. Ce n’est que récemment que ses homologues du Royaume-Uni, d’Allemagne et d’autres pays européens ont commencé se pencher sur l’héritage du colonialisme exposé dans leurs musées et leurs galeries d’art.

La jeunesse africaine a été privée d’accès aux sources les plus profondes de sa culture

Le British Museum, à lui seul, contient 700 œuvres du Bénin, mais leur leur mode d’acquisition est souvent délibérément occulté. Un vol reste un vol. Le retour de ces œuvres par la France se doit de n’être qu’une première étape, avant d’être imité par les autres pays.

Le retour de ces œuvres serait une opportunité unique pour les jeunes d’Afrique de découvrir et de se connecter à leur histoire et à leur identité. Sur un continent où plus de 60 % de la population a moins de 25 ans, cela revêt une importance capitale. Cette jeunesse – l’avenir de notre continent – a été privée d’accès aux sources les plus profondes de sa culture.

Mais pour que ce vœu se réalise, les œuvres restituées doivent être exposées et promues dans un environnement qui les honore : un musée qui reflète et célèbre l’histoire culturelle africaine. Il devra être conçu et construit par ceux qui ont une perspective uniquement africaine – des gens d’éducation, d’inspiration et d’aspiration africaines. Un tel musée devra refléter une compréhension de l’esprit de l’Afrique et une compréhension des réalités technologiques, économiques et sociales de la vie sur le continent. En d’autres termes, il faut célébrer ce que signifie être africain – d’un point de vue africain.

Ce musée serait un lieu d’histoire, de culture et d’identité

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Trop longtemps, le « récit africain » a été concentré sur les horreurs de la période coloniale, alors que les pays qui peuplent ce continent ont une histoire riche et complexe, qui remonte à un temps bien antérieur à l’arrivée des européens.

En dépit de la croyance populaire occidentale, l’humanité s’est développée en Afrique subsaharienne. La jeunesse africaine doit en avoir conscience et en être fière, car méconnaître ses racines, c’est perdre le sens de son identité.

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Ce musée que j’appelle de toutes mes forces – un lieu d’histoire, de culture et d’identité – aurait des répercussions positives sur tout le continent, façonnerait et nourrirait les perspectives afin que les générations futures puissent trouver des solutions aux défis africains. Plutôt que de se tourner vers l’Occident pour trouver un modèle à suivre et répéter les mêmes erreurs.

Au-delà du symbole, l’exposition de ces œuvres  permettra aux jeunes Africains de rétablir un lien avec leur continent et leurs racines. Ils pourront se réapproprier leur perspective uniquement africaine sur le monde. Ils pourront trouver des sources de fierté profonde en ce qu’ils sont et d’où ils viennent.

Et le plus important : ils pourront relever les défis d’aujourd’hui et de demain avec confiance et passion.

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