Bush et le terrorisme

Publié le 25 août 2003 Lecture : 3 minutes.

Qu’auriez-vous fait après le 11 septembre ? me demande-t-on. Ma première réponse est que l’option militaire a été une erreur. Le bilan de l’intervention en Afghanistan est nul. Les seigneurs de guerre sont de retour et Oussama Ben Laden court toujours, alors que nos opérations militaires ont été précisément déclenchées parce que les talibans refusaient de le livrer.
L’Irak répond encore moins à l’objectif affiché. S’embarquer dans une guerre totale pour se débarrasser des terroristes équivaut à chasser un frelon avec un tank Sherman. Lorsque le tank détruit la maison où s’abrite le frelon, ce dernier se réfugie dans le grenier de la maison voisine.
L’endiguement aurait pu être une meilleure stratégie en Irak. Il se serait certainement heurté à une horde de contretemps annexes (en particulier si l’on ne trouvait pas d’armes de destruction massive), mais il aurait pu se conjuguer avec une collaboration policière à l’échelle mondiale. Il existe un certain nombre de pays suffisamment exposés au terrorisme pour être prêts à participer à une opération de grande envergure, dont la première étape aurait pu être, de fait, l’Afghanistan. Certes, les obstacles sont évidents : les services de renseignements ne partagent pas facilement leurs informations de peur de trahir leur source. Mais 20 % seulement d’un vaste programme n’aurait pu faire pire pour ce qui est de la capture de Ben Laden. Et aurait pu faire mieux.

Bien entendu, on ne peut pas plus éliminer totalement le terrorisme qu’on ne peut se débarrasser d’une souche de bactéries avec des antibiotiques. Sur les marges, d’autres souches, plus virulentes, plus résistantes, se développent. Mais on peut limiter les dégâts, alors que la guerre provoque nécessairement une nouvelle mutation du terrorisme. C’est du moins la théorie que je défends.
Évidemment, je ne peux pas me porter garant à 100 % de ce que je propose. Le terrorisme total est une nouvelle maladie de l’humanité. L’agressivité personnelle, à ce niveau, confirme la formule d’Engels : la quantité change la qualité. Avec sa cruauté actuelle, le terrorisme est inhumain. Si nous avions commencé par une opération de police internationale incluant l’Afghanistan et si elle n’avait pas pleinement atteint ses objectifs, la guerre aurait paru un nouveau recours plus logique. Il n’aurait pas été nécessaire de manipuler l’opinion américaine pour l’y embarquer. Nous aurions pu aussi avoir une véritable coalition.

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Tout cela était sûrement exclu. Powell et le département d’État auraient probablement pu travailler avec l’ONU, mais il y avait d’autres fers au feu dans l’administration et ils étaient entre les mains de gens plus proches de Bush. Les forces qui rêvaient de l’empire mondial – faut-il penser à Rumsfeld et à Cheney ? – défendaient avec acharnement une intervention unilatérale des États-Unis en Irak, avant de passer à la Syrie, à l’Iran et au Pakistan, étapes suivantes, à leurs yeux, de l’instauration de la domination américaine sur le globe. C’était pour eux la meilleure solution internationale. Seule l’Amérique pouvait mener à bien une entreprise aussi immense et aussi noble. Ce qui se passe aujourd’hui en Irak porte un coup plutôt dur à leurs projets – il faut du temps pour injecter de la démocratie dans le coeur des fondamentalistes.
Bush et son conseiller Karl Rove, qui veulent se ménager une forte majorité républicaine à long terme parmi les électeurs masculins blancs, ont fait une démonstration de notre puissance militaire. Ajoutez-y le lénifiant prêchi-prêcha de Bush pour montrer comment le Bien peut venir à bout du Mal. Autant renoncer à faire de la politique si on ne peut pas mentir un peu pour ramasser des voix, mais Bush a abusé du privilège. Et c’est ainsi que l’Amérique doit aujourd’hui subir les conséquences d’une politique où l’on dit n’importe quoi pour faire la guerre en Irak et où l’on raconte de telles balivernes que le quart du pays croit encore que Saddam Hussein est le mauvais génie du 11 septembre.

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