Afrique du Sud : le fonds de gestion PIC dans la tourmente
Après les accusations d’ingérence politique formulées par un lanceur d’alerte contre quatre de ses membres, le conseil d’administration du plus grand gestionnaire d’actifs du continent a démissionné en bloc. Une enquête a été ouverte à la demande du président Cyril Ramaphosa.
La société publique sud-africaine PIC, qui gère 145 milliards de dollars d’actifs, principalement pour le compte de la caisse de retraite des employés du gouvernement, est sous le coup d’une enquête ordonnée par le président Cyril Ramaphosa, après des accusations émanant d’un lanceur d’alerte et publiées fin janvier dans la presse sud-africaine, notamment Business Day.
Selon ces affirmations, quatre des neuf membres du conseil d’administration de la société seraient impliqués dans des actes répréhensibles. Suite à cette affaire, les membres du conseil d’administration ont démissionné en bloc, dénonçant dans leur lettre de départ, citée par le Financial Times (FT), un « effort concerté visant à [les] discréditer » et une « tentative visant à plonger l’institution dans un état de paralysie ». Ils restent néanmoins en poste jusqu’à la nomination d’un nouveau conseil par le ministre sud-africain des Finances, Tito Mboweni. Une décision qui devrait intervenir la semaine prochaine, affirme le quotidien britannique.
Bonne réputation
Le directeur exécutif de PIC, Dan Matjila, avait quant à lui quitté ses fonctions en novembre 2018, après des allégations selon lesquelles l’institution aurait investi dans des transactions impliquant des personnalités liées au Congrès national africain (ANC) au pouvoir. « Je n’ai jamais été partisan, ni penché vers aucune faction d’un parti politique », a-t-il cependant affirmé dans sa lettre de démission.
PIC, qui contrôle plus d’un dixième de la bourse de Johannesburg, avait jusque là paru échapper aux scandales qui ont émaillé l’ère Zuma
PIC, qui contrôle plus d’un dixième de la bourse de Johannesburg par le biais de participations dans des entreprises cotées en bourse – notamment dans la société Naspers et le minier Anglo American – avait jusque là paru échapper aux scandales qui ont émaillé l’ère Zuma. La société a cependant laissé quelques plumes dans l’effondrement du géant de la distribution Steinhoff, suite à un scandale comptable.
L’enquête ouverte à la demande du président Ramaphosa a également examiné le soutien que PIC a donné à Iqbal Survé, un magnat des médias lié aux alliés de l’ex-chef de l’État Jacob Zuma, par le biais d’opérations telles que le rachat d’une émission supposément grossièrement surévaluée d’actions, rapporte le Financial Times, précisant qu’Iqbal Survé « nie avoir commis un acte répréhensible ».
Soutien des objectifs de développement de l’État
Pour certains analystes, de telles implications montrent l’incapacité de PIC à examiner correctement les transactions au niveau du conseil d’administration, en particulier du fait que son président n’est autre que Mondli Gungubele, adjoint du ministre des Finances (et démissionnaire). « La voix des politiciens est beaucoup plus importante qu’elle ne devrait l’être », a déclaré au FT Khaya Sithole, analyste financier indépendant et comptable agréé. « Il est inévitable que des offres politiquement influencées arrivent à la table. Si vous administrez 2 000 milliards de rands [129 milliards d’euros], vous recevrez beaucoup de demandes, y compris de la part des affiliés politiques. »
La politique est toutefois liée au mandat du PIC, qui comprend une clause de soutien des objectifs de développement de l’État, tels que le rééquilibrage de l’une des sociétés les plus inégalitaires au monde, héritée de l’apartheid. En outre, le PIC est devenu le prêteur de dernier recours à des entreprises d’État en difficulté, notamment Eskom.
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