Dette cachée du Mozambique : l’Afrique du Sud refuse la libération de l’ex-ministre des Finances
La justice sud-africaine a refusé vendredi la libération de l’ex-ministre mozambicain des Finances Manuel Chang, détenu depuis la fin 2018 dans le cadre d’une affaire de corruption, qui a engendré l’arrestation de cinq autres personnes le 14 février.
« Je ne peux pas accorder de liberté sous caution au requérant [Manuel Chang, ndlr] car cela ne servirait pas les intérêts de la justice », a tranché le 15 février la juge Sagra Subroyen au terme d’une audience au tribunal de Kempton Park, près de Johannesburg.
Comme le parquet, la magistrate a mis en doute les garanties de représentation de l’accusé, Manuel Chang, ex-ministre des Finances mozambicain détenu depuis la fin 2018 dans le cadre de l’affaire de la « dette cachée » du Mozambique. Il fait depuis l’objet de demandes d’extradition des États-Unis et du Mozambique.
« Même si ses passeports lui ont été confisqués, cela ne garantit pas qu’il ne puisse pas en obtenir d’autres et prendre la fuite », a-t-elle souligné, ajoutant soupçonner l’ex-ministre de disposer « de comptes bancaires qu’il a cachés au tribunal ».
5 millions de dollars de pots-de-vin
Manuel Chang a été arrêté fin décembre à l’aéroport de Johannesburg sur demande d’un procureur américain. Il est accusé d’avoir autorisé des entreprises publiques à contracter des prêts secrets d’un montant de 2 milliards de dollars pour acheter des bateaux, notamment militaires, auprès du groupe du milliardaire franco-libanais Iskandar Safa.
Selon l’acte d’accusation de la justice américaine, Manuel Chang est soupçonné d’avoir touché 5 millions de dollars de pots-de-vin pour avoir autorisé ces prêts lorsqu’il était ministre. Un audit indépendant a estimé à 500 millions de dollars la part de ces prêts, délibérément cachés au Parlement et aux bailleurs de fonds internationaux, détournés au profit d’industriels, de banquiers et de dirigeants mozambicains.
Cinq arrestations le 14 février
Depuis son arrestation, le parquet général de Maputo a donné un coup d’accélérateur à son enquête. Le 14 février, il a ordonné l’arrestation de cinq personnes. « Je confirme que cinq personnes ont été arrêtées à ce jour », a déclaré à l’AFP une source judiciaire. Il s’agit de Gregorio Leao, l’ancien directeur des services de renseignements, d’Ines Moiane, l’assistante de l’ex-chef de l’État Armando Guebuza, d’Antonio do Rosario, l’ex-patron de trois sociétés publiques, de Teófilo Nhangumele, un homme d’affaires, et de Bruno Tendane, un officier des services secrets, a ajouté cette source. Les charges dont ils sont accusés seront précisées vendredi par le parquet, a-t-elle poursuivi.
L’affaire embarrasse l’actuel président mozambicain Filipe Nyusi, ministre de la Défense à l’époque des faits et candidat à un nouveau mandat à la tête du pays lors des élections générales prévues le 15 octobre prochain.
La révélation de cette « dette cachée » a plongé le Mozambique dans sa pire crise financière depuis son indépendance en 1975. La plupart des bailleurs de fonds du pays ont suspendu leur aide et Maputo a été contraint d’interrompre le remboursement de sa dette.
L’opposition et des ONG refusent que le pays rembourse un centime de cette « dette cachée » aux banques. Parmi ces organisations figure la Fondation pour le développement communautaire de Graça Machel, l’épouse mozambicaine de l’ex-président sud-africain Nelson Mandela.
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