Réforme du régime carcéral

Publié le 25 avril 2005 Lecture : 3 minutes.

« Des responsables tunisiens nous ont affirmé qu’à partir de ce jour, il n’y aurait plus de prisonniers en cellule d’isolement plus de dix jours, quelles que soient les circonstances », a déclaré Eric Goldstein, directeur de recherches à Human Rights Watch (HRW), au cours d’une conférence de presse, le 20 avril, au siège de la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH). Ces assurances ont été données par un « haut responsable tunisien » aux représentants de l’organisation américaine de défense des droits de l’homme, venus présenter leur rapport. « Bien entendu, nous vérifierons l’application de cet engagement verbal au cours des prochaines semaines », a ajouté Goldstein. Bien que les autorités aient admis qu’elles avaient placé quelques prisonniers en cellule d’isolement, elles ont néanmoins nié qu’ils l’aient été contre leur gré, affirmant que lesdits détenus ont été placés en isolement à leur demande pour être séparés des autres ou comme punition pour une durée n’excédant pas dix jours.

La conférence de presse s’est déroulée en présence de Sarah Leah Whitson, directrice de HRW pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, Me Mokhtar Trifi, président de la LTDH, des responsables d’ONG locales, des diplomates accrédités à Tunis et d’anciens détenus, comme Zied Douletli et Ali Laaridh, dirigeants du parti islamiste Ennahdha (non autorisé), libérés en novembre dernier. Dans le document de 39 pages, qui reproduit des témoignages de détenus récemment libérés, HRW accuse le gouvernement de « recourir à l’isolement cellulaire pour écraser les dirigeants d’Ennahdha et anéantir leur mouvement ». Sur les quelque cinq cents prisonniers politiques que compte la Tunisie, estime HRW, une quarantaine sont en isolement prolongé depuis plusieurs mois, plusieurs années, voire depuis plus de dix ans pour certains, et nombre d’entre eux ont dû mener des grèves de la faim pour protester contre leurs conditions de détention. C’est le cas notamment de Hamadi Jebali, en grève de la faim depuis le 9 avril dans la prison de Sfax pour exiger la fin de son isolement.
Selon le rapport, les détenus en isolement sont interdits de contact avec les autres prisonniers et privés d’activités socioculturelles et physiques. Leur communication avec le monde extérieur et leur accès aux livres sont très réduits. Quant aux contacts avec leurs proches, ils sont limités à « une seule et courte visite hebdomadaire, souvent à travers une barrière de séparation ». Cette pratique de l’isolement de longue durée, ajoute le rapport, est une violation de la loi tunisienne, qui limite cette forme de sanction à un maximum de dix jours.

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« Les responsables de HRW pourront visiter les prisons, lors de leur prochain déplacement en Tunisie, nous ont assuré les autorités, a également annoncé Eric Goldstein. Cela fait plusieurs années que nous faisons cette demande. Nous espérons que la promesse sera suivie d’effet. » Le responsable de HRW a indiqué, par ailleurs, que les autorités l’ont assuré que l’accord autorisant le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à visiter les prisons sera signé « très prochainement ». Aucune ONG, depuis la LTDH en 1991, n’avait obtenu un droit de visite des prisons tunisiennes. Les représentants de l’ONG américaine, qui ont pu recueillir des témoignages d’anciens détenus, de familles de prisonnier et de militants associatifs, ont affirmé avoir travaillé dans de très bonnes conditions. Ils ont pu aussi s’entretenir avec des responsables des départements concernés auxquels ils ont remis une copie de leur rapport. « Lors d’une précédente mission, en 1996, a rappelé Goldstein, les gens évitaient de nous parler, car ils craignaient des représailles. Cette fois, nous avons pu recueillir des témoignages, même par téléphone. »

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