[Chronique] Bras de fer Maurice – Royaume-Uni sur les Îles du Chagos : du « Chagoxit » dans le Brexit
Dans un long feuilleton qui oppose Port-Louis à Londres au sujet de la souveraineté sur les îles Chagos, la Grande-Bretagne vient de se faire tirer les oreilles par la Cour internationale de justice.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 26 février 2019 Lecture : 2 minutes.
La colonisation n’en finit pas de finir, notamment celle que le Royaume-Uni épilogue dans certains confettis géographiques qui demeurent des zones stratégiques du globe. L’appétence des îles du nord pour les îles du sud ne se dément pas. Comme Margaret Thatcher s’était battue bec et ongles pour la souveraineté britannique sur les îles atlantiques Malouines, Géorgie du Sud et Sandwich du Sud, l’autre Première ministre de sa Majesté, Theresa May, ne lâche rien sur les îles Chagos de l’Océan Indien.
Mais l’obstination colonisatrice de Londres n’est pas du goût de la Cour internationale de justice… Ce 26 février, la Cour internationale de justice (CIJ) a rendu à La Haye une décision enjoignant Londres de mettre fin « le plus rapidement possible » à son administration de l’archipel. Selon la CIJ, l’occupation britannique est « un acte illicite » contraire à « la décolonisation de Maurice » et à la résolution 1514 des Nations unies.
>>> À LIRE – Îles Chagos : Maurice sur le point de remporter le litige qui l’oppose au Royaume-Uni depuis 50 ans ?
Anachronisme colonial
L’histoire de l’archipel des Chagos est aussi complexe que sa structure – cinquante-cinq îles réparties en sept atolls – et sa situation actuelle frise tout autant l’anachronisme que celle des Comores, autre chapelet de terres confrontées à la présence administrative d’une puissance coloniale largement refoulée des horizons du sud.
Le 8 novembre 1965, les 60 kilomètres carrés des Chagos ont été « détachés » de la colonie britannique de Maurice, qui ne deviendra indépendante que trois ans plus tard. Londres se dédouana avec une compensation financière de trois millions de livres sterling, qualifia la zone de « Territoire britannique de l’océan indien » (BIOT), déporta les Chagossiens et mis l’île de Diego Garcia – la seule habitée de l’archipel – à la disposition de militaires américains pour une durée de cinquante ans à compter de 1966. Le tout mené dans un flou juridique certain, et en l’absence d’« expression libre et sincère des personnes concernées », selon la CIJ.
Isolement croissant
Dès 1998, des recours en justice ont été engagés contre le gouvernement britannique, les uns pour demander un rapprochement avec la puissance occidentale – réclamer la nationalité britannique pour les autochtones -, les autres pour obtenir un éloignement – revendiquer la rétrocession des îles Chagos à Maurice.
Bien sûr, la décision du président de la CIJ, le Somalien Abdulqawi Ahmed Yusuf, n’a été rendue qu’à titre consultatif. Bien sûr, Maurice n’est pas l’Argentine. Bien sûr, le spectre de la guerre des Malouines ne plane pas sur l’Océan Indien.
Pour autant, depuis que l’Assemblée des Nations unies a confié le dossier à la Cour, la Grande-Bretagne semble isolée. La décision tranchée de la CIJ accélère un reflux perceptible de l’influence géopolitique britannique. Reflux souligné, de surcroît, par le manque de solidarité des membres d’une Union européenne traumatisée par la perspective du Brexit. Les îles Chagos pourraient bien se « détacher » de l’île britannique qui cherche à se « détacher » de l’Union européenne…
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