Rwanda-Ouganda : polémique autour de la fermeture d’un poste-frontière
En pleine tension diplomatique entre Kampala et Kigali, les autorités ougandaises accusent le Rwanda d’avoir fermé sa frontière en violation des règles en vigueur au sein de l’East African Community. Le gouvernement rwandais dément et impute ces difficultés à des travaux de construction tout en déconseillant à ses concitoyens de se rendre en Ouganda.
Situation confuse à la frontière entre l’Ouganda et le Rwanda. Depuis jeudi 28 février, le porte-parole du gouvernement ougandais, Ofwono Opondo, accuse les autorités rwandaises « de refuser l’entrée en Ouganda aux véhicules privés et publics » ainsi qu’aux civils rwandais qui souhaitent se rendre en Ouganda. Il a donc réclamé des explications sur ce qui constitue selon lui une violation des règles de l’East African Community, l’organisation régionale dont le président rwandais Paul Kagame a pris la tête début février, succédant à son homologue ougandais Yoweri Museveni.
Tensions diplomatiques
La Rwanda Revenue Authority (RRA), l’autorité fiscale rwandaise, avait préalablement adressé un courrier à son homologue ougandaise pour préciser « qu’à compter du 28 février 2019, tous les camions lourds transportant des marchandises à destination et en transit par Gatuna [nord du Rwanda, ndlr] seront temporairement détournés vers les postes-frontières de Kagitumba [plus à l’Est, ndlr] ». Une décision prise afin « d’accélérer les travaux de construction en cours à Gatuna et d’améliorer la fluidité des flux de marchandises et de services », assure la RRA. Des explications qui n’ont, semble-t-il, pas convaincu les autorités ougandaises. « Les postes-frontières n’ont pas été fermés aux voyageurs », assure à Jeune Afrique une source diplomatique rwandaise.
Cette polémique autour de la situation frontalière intervient après plusieurs mois de tensions entre Kigali et Kampala. Les deux gouvernements s’accusent régulièrement d’espionnage et les autorités rwandaises se sont insurgées à plusieurs reprises contre des cas d’arrestations et expulsions de Rwandais accusés de travailler en Ouganda pour le compte de Kigali. Kampala a récemment expulsé plusieurs hauts responsables de la société de télécommunications MTN, dont un ressortissant rwandais, les accusant de compromettre sa sécurité nationale. Les rumeurs de collaboration entre Kampala et des groupes rebelles rwandais ont également contribué à détériorer les rapports entre les deux pays.
Pas de « chasse aux sorcières » selon Kampala
« Il n’y a pas de chasse aux sorcières contre les Rwandais en Ouganda. Personne au Rwanda n’est détenu par les autorités ougandaises pour quelque raison que ce soit », a assuré vendredi 1 mars Ofwono Opondo, à l’occasion d’une nouvelle conférence de presse. Selon Olivier Nduhungirehe, secrétaire d’État au ministère des Affaires étrangères du Rwanda, qui a réagi sur Twitter, il y aurait pourtant une quarantaine de Rwandais détenus par les services ougandais et plus de 800 autres « expulsés d’Ouganda ou qui se sont vus refuser l’entrée dans ce pays depuis janvier 2018 ».
This statement is factually and demonstrably incorrect. There are more than 40 #Rwanda-n citizens languishing in cells of Uganda's Chieftaincy of Military Intelligence (#CMI) and more than 800 Rwandans who were deported from or refused entry to #Uganda since January 2018. https://t.co/BL7lNEEiMr
— Olivier J.P. Nduhungirehe (@onduhungirehe) March 1, 2019
« Il est fortement déconseillé aux Rwandais de se rendre en Ouganda », a précisé sur Twitter Richard Sezibera, le ministre rwandais des Affaires étrangères, citant les « récents cas d’arrestations et de harcèlement ».
1. As explained to many journalists, all Rwanda's borders are open. Trucks and heavy vehicles are advised to use Kagitumba due to ongoing construction at Gatuna. Rwandans are strongly advised NOT to travel to Uganda due to ongoing arrests, harassment, torture,
— Richard Sezibera (@rsezibera) March 1, 2019
Le 21 février, le chef de la diplomatie rwandaise a reçu la haute représentante de l’Ouganda au Rwanda, Oliver Wonekha. Une rencontre d’une vingtaine de minutes qui a été l’occasion pour les deux diplomates d’aborder les cas d’arrestations en Ouganda et d’échanger afin d’établir de meilleurs canaux de communication à propos de ces détentions, critiquées à plusieurs reprises par Kigali.
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