Les banques frôlent la surchauffe

Convenablement capitalisés et disposant de ressources confortables, les trois géants marocains prennent des risques. Peut-être un peu trop.

Publié le 25 février 2008 Lecture : 2 minutes.

L’agence internationale de notation Standard & Poor’s a publié, le 18 février, à Londres, un rapport d’une quinzaine de pages sur les progrès accomplis par le système bancaire marocain au cours des cinq dernières années. Il met en exergue nombre de points forts mais soulève quelques problèmes. Première bonne nouvelle, la qualité de la supervision : le secteur, qui comprend seize banques, est bien régulé par la Banque centrale du pays, Bank al-Maghrib. À quoi s’ajoute le faible interventionnisme de l’État dans le management (il ne contrôle que 15 % des actifs). L’agence note également la solidité des fonds propres, la disponibilité des actionnaires marocains et étrangers à intervenir en cas de besoin et, enfin, l’abondance des ressources de la clientèle : 60 % des dépôts ne sont pas rémunérés et 25 % de l’ensemble des dépôts arrivent en devises (les transferts des travailleurs marocains à l’étranger ont atteint 5 milliards d’euros en 2007, contre 4,4 milliards en 2006).
Côté pile, la clientèle bancable dans le pays est limitée et les banques se font une guerre sans merci pour attirer les meilleurs clients en rognant sur leurs marges. Résultats, les prêts aux particuliers augmentent à un rythme effréné : 13 % en 2005, 16 % en 2006 et 20 % en 2007. Ils ont atteint 113,7 milliards de dirhams (10 milliards d’euros) au 31 octobre 2007 (dernière statistique connue), contre 49 milliards au 31 décembre 2003 (+ 130 %, voir graphique). Leur remboursement est certes garanti sur le salaire (pour les prêts à la consommation) et sur les hypothèques (pour les prêts immobiliers).
Conséquence, les banques ne sont pas à l’abri d’un retournement de la conjoncture. La spéculation est grande à la Bourse de Casablanca (dont l’indice a progressé de 125 % en deux ans) et l’inflation des prix est forte. Un mouvement de correction du marché n’est donc pas à exclure. Les prêts non-performants risquent de gonfler à 25 %, voire 40 % du portefeuille, contre 10 % en 2007. Le marché bancaire est trop concentré : trois établissements sur seize – Attijariwafa Bank, Groupe Banques populaires et BMCE Bank – contrôlent les trois quarts des actifs, soit 460 milliards de dirhams (sur un total de 612 milliards) au 30 septembre 2007. En raison de l’étroitesse du marché, elles sont décidées à s’implanter ailleurs, notamment au Sénégal, en Tunisie, en Algérie et en Libye. Ce mouvement, qui a commencé en 2005 avec l’acquisition de la Banque du Sud, en Tunisie, va se poursuivre. Il est encore trop tôt pour en évaluer les résultats, mais les risques sont bien ouverts, note Standard & Poor’s.

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