Comment DP World quadrille l’Afrique

En huit ans, le logisticien de dubaï est devenu troisième mondial. En passant par le continent.

Publié le 25 février 2008 Lecture : 3 minutes.

En cette fin novembre 2007, Mohammed Sharaf avait vraiment de quoi se réjouir. Le patron de Dubai Ports World, le nouvel opérateur portuaire géant de Dubaï, sait que l’introduction en Bourse de la société qu’il dirige est un immense succès. L’offre dépasse la demande de quinze fois, attirant même des Américains, et DP World sort valorisée à plus de 21 milliards de dollars. Numéro trois mondial des opérateurs portuaires, derrière Hutchinson et PSA International, le groupe émirati contrôlé par la famille régnante de Dubaï a fait en quelques années une spectaculaire percée sur le globe.

30 000 salariés dans 30 pays
Né en 1999 de la fusion de Dubai Ports Authority et de Dubaï Ports International, alors à la tête seulement de deux ports émiratis, le groupe s’est développé au cours des trois dernières années : opérateur de quatre ports internationaux avant 2004, DP World est présent dans 13 pays au début de 2006 et plus du double deux ans plus tard, gérant 55 terminaux et employant environ 30 000 personnes ! Mais, plus que cette progression spectaculaire, c’est l’aventure américaine du groupe qui l’a fait connaître : en mars 2006, à l’occasion du rachat pour 7 milliards de dollars du britannique P&O, DP World se retrouve en effet à la tête de plusieurs ports américains, dont celui de New York ! La tempête politique provoquée par le fait qu’un groupe des Émirats arabes unis, d’où étaient originaires certaines terroristes du 11 Septembre, aura raison des ambitions de DP World, qui cède ses opérations américaines à un groupe local. Ainsi mis dehors, l’opérateur portuaire a poursuivi son offensive, mais sur d’autres rives.
Des trois grands opérateurs mondiaux, il est le seul à avoir clairement fait de l’Afrique une priorité. Installé à Djibouti un an seulement après sa création, le groupe s’est depuis développé à Maputo au Mozambique, où il gère le terminal à conteneurs et est actionnaire depuis début 2008 de la société gérant le port. En Afrique du Nord, le groupe a mis la main à la fin de 2007 pour 670 millions de dollars sur la société opérant le terminal à conteneurs de Sokhna, le plus proche du Caire. Il entend désormais très clairement décrocher la concession du port algérien de Djen-Djen, amené à être un sérieux concurrent de Tanger-Med. En Afrique de l’Ouest, il a également remporté une bataille difficile, en décrochant la concession du terminal à conteneurs de Dakar mi-2007. Une victoire remportée au nez et à la barbe du français Bolloré, qui était allié pour l’occasion à son compatriote CMA-CGM, auquel il avait vendu début 2006 sa filiale de transport maritime Delmas. Le groupe Bolloré, dont plus de la moitié des employés travaillent en Afrique, s’est en effet recentré sur la logistique terrestre, s’appuyant sur un puissant réseau d’agences. Opérant des chemins de fer au Cameroun et en Côte d’Ivoire, transporteur routier dans la plupart des pays africains, il gère les terminaux à conteneurs des ports d’Abidjan, de Douala, de Tema ou de Lagos-Tincan et semble aujourd’hui très bien placé pour développer celui de Pointe-Noire. Son échec à Dakar est d’autant plus significatif qu’un autre géant, le danois APM Terminals, s’intéresse activement à la zone francophone.
La filiale d’AP Moller-Maersk, qui gère cinquante ports sur quatre continents, est déjà concessionnaire à Douala et à Tema avec Bolloré, mais aussi à Lagos et Onne au Nigeria, ainsi qu’à Luanda, en Angola. Très offensif en Afrique, son engagement est d’autant plus grand que l’une des autres filiales du groupe, Maersk, est le transporteur numéro un de la zone. Le contrôle des ports permet de lui assurer la priorité pour ses bateaux tout en maîtrisant d’autres éléments tels que les coûts et l’efficacité. Fonctionnant sur ce même modèle, le français CMA-CGM est l’autre grand transporteur de la zone et, à ce titre, entend être de plus en plus présent dans la gestion portuaire. C’est le cas à Lomé, où il travaille avec Progosa, qui est, avec Getma, l’un des deux sérieux concurrents de Bolloré dans la région.

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