La Somaca cherche de nouveaux débouchés

Pour la deuxième année consécutive, la Société marocaine de constructions automobiles bat son record de production. Et veut exporter dans les pays voisins.

Publié le 21 décembre 2007 Lecture : 4 minutes.

Le soleil brille sur la Société marocaine de constructions automobiles (Somaca). Propriété de Renault à 80 %, la seule usine automobile du Maghreb avait battu, en 2006, un record de production qui remontait à 1975, avec 29 600 véhicules assemblés. Elle fera mieux encore en 2007, avec 40 000 unités environ.
Pour l’essentiel, cette progression est due au changement de statut de la Somaca sur l’échiquier industriel. Depuis sa création à l’initiative du gouvernement marocain, en 1962, l’entreprise avait pour fonction de répondre aux besoins du marché intérieur. Mais, en 2007, pour la première fois de son histoire, la Somaca est devenue exportatrice : 8 000 Logan ont quitté les chaînes de montage de Casablanca pour être vendues en France et en Espagne. Un mouvement qui devrait s’amplifier en 2008 avec une probable commande de 20 000 Kangoo supplémentaires.
Si, de surcroît, le marché marocain poursuit sa progression (+ 19 % en 2007), l’usine de Casablanca pourrait produire 60 000 véhicules en 2008. Elle devra, dans cette perspective, recruter 300 personnes environ, et recourir à une organisation en trois équipes. « Rien n’est signé, mais toutes les études ont été faites, explique Philippe Cornet, directeur général de Renault Maroc. Si, demain, Renault demande à la Somaca des Logan supplémentaires pour l’Allemagne ou le Benelux comme il en est question, nous sommes prêts. »
Pendant longtemps, pourtant, la Somaca a vécu dans l’angoisse du lendemain. Son tort : avoir été conçue selon un schéma qui n’a plus cours depuis la fin des années 1970. Jusqu’à récemment, il s’agissait d’une petite usine d’envergure nationale (8 482 unités assemblées en 1995), protégée par une fiscalité privilégiée. Or l’époque est au démantèlement des barrières douanières et aux grosses unités à vocation internationale, comme Renault-Tanger, qui produira 200 000 voitures en 2010 et 400 000 au-delà

15 000 logan pour le Maroc
Dans l’attente de jours meilleurs, le gouvernement marocain a porté la Somaca à bout de bras. Ils sont arrivés en 2005, lorsque Renault a sorti de son chapeau un projet inédit : la Logan, modèle familial et à bas prix, donc forcément produit au plus près des clients afin de réduire les coûts d’acheminement. Dès lors, Renault avait besoin d’unités de production partout dans le monde. D’où le retour en grâce de la Somaca
Mais l’automobile n’est pas une science exacte, surtout sur le continent africain. Selon le plan initial de Renault, la Somaca devait assembler 30 000 Logan par an : 15 000 pour le Maroc et 15 000 pour d’autres pays méditerranéens. Problème : la première partie du contrat a été remplie, pas la seconde. Certes, les accords d’Agadir, entrés en vigueur en mars dernier, prévoient bien l’instauration d’une zone de libre-échange entre le Maroc, la Tunisie, l’Égypte et la Jordanie, ce qui avait conduit la Somaca à programmer, pour 2007, l’exportation de 4 000 Logan vers l’Égypte. Elle avait également bon espoir du côté de la Tunisie. Mais les portes de l’Égypte et de la Tunisie sont restées closes

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Passer par Barcelone pour livrer Alger
Autre anomalie : les 10 000 Logan diffusées cette année en Algérie arrivent de Roumanie. Elles pourraient, bien sûr, être livrées de Casablanca. Mais les frontières économiques entre le Maroc et l’Algérie étant fermées, elles devraient transiter par Barcelone, voire Marseille. Reste une question : pourquoi produire pièces de carrosserie et moteurs en Roumanie pour les assembler à Casablanca, puis les ramener dans un port européen pour, enfin, les réexpédier en Algérie ? L’affaire n’a, en effet, aucune rationalité
Certes, tout raisonnement économique est vain s’il ne prend pas en considération le poids des raisons politiques. Mais à signer des accords de libre-échange qu’ils n’appliquent pas, les pays du Maghreb ne vont pas dans le sens de l’histoire. La pérennité de la Somaca, de ses 1 500 emplois directs et de ses 1 000 emplois liés à la sous-traitance (28 % des pièces de la Logan sont fabriquées au Maghreb) passe, en effet, par l’exportation chez ses voisins maghrébins.
Ce débouché est d’autant plus vital que les accords de libre-échange signés avec l’Union européenne prévoient le démantèlement des barrières douanières avec le Maroc en 2012. En clair : à partir de cette date, les véhicules assemblés à Casablanca ne bénéficieront plus d’une fiscalité privilégiée par rapport aux modèles importés d’Europe. Leur abaissement a déjà inversé le rapport des forces : en 2007, les ventes de véhicules importés au Maroc (+ 25 %) ont progressé plus vite que celles des véhicules assemblés par la Somaca (+ 9 %). Malgré une progression à deux chiffres depuis cinq ans, le marché marocain ne pourra pas absorber les 80 000 véhicules par an qu’est capable de produire l’usine de Casablanca. Faute de pouvoir exporter, pour l’instant, dans les pays arabes, la Somaca s’est tournée vers l’Europe. Mais, à terme, il faudra bien que le Maghreb constitue une zone de libre-échange, comme l’Europe a commencé à le faire il y a plus d’un demi-siècle. Mais le débat dépasse le simple cas de la Somaca

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