Législatives au Bénin : les députés se réunissent pour sortir de l’impasse

Réunis en plénière le 21 mars, les députés béninois devront examiner les propositions retenues par le comité paritaire pour sortir de l’impasse et parvenir à des élections législatives inclusives tel que souhaité par Patrice Talon le 6 mars dernier. La révision de la Constitution ne fait pourtant pas l’unanimité.

Adrien Houngbédji, le président de l’Assemblée nationale du Bénin. © Vincent Fournier/Jeune Afrique

Adrien Houngbédji, le président de l’Assemblée nationale du Bénin. © Vincent Fournier/Jeune Afrique

Fiacre Vidjingninou

Publié le 21 mars 2019 Lecture : 3 minutes.

Une femme vote au Bénin, lors du premier tour de la présidentielle, le 6 mars 2016 (archives). © Valentin Salako / AP / SIPA
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Législatives au Bénin sans l’opposition : les enjeux d’un scrutin inédit

Les Béninois sont appelés aux urnes, dimanche 28 avril, pour des législatives inédites dans le pays depuis l’instauration du multipartisme : aucune liste d’opposition ne participe à ce scrutin. Un « recul de la démocratie et de l’État de droit », pour l’opposition, accusée par la mouvance présidentielle de n’avoir « pas été à la hauteur des exigences des nouvelles lois ».

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C’est une session décisive qui pourrait mettre un terme à la crise politique. Réunis en plénière jeudi 21 mars, les députés béninois devront débattre sur les propositions retenues par le comité paritaire du Parlement. Objectif : parvenir à un consensus afin d’organiser des élections législatives inclusives, suite à l’exclusion de l’opposition de ce scrutin prévu le 28 avril.

Seuls deux partis proches du président Patrice Talon, le Bloc républicain (BR) et l’Union progressiste (UP), ont été validés par la Commission électorale nationale autonome (Cena) et pourront concourir aux élections.

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Lois dérogatoires

Après deux semaines de tractations et de négociations politiques menées par le président du Parlement Adrien Houngbédji, pouvoir et opposition sont parvenus à un accord censé incarner ce consensus. Différentes propositions ont été assorties de trois lois dérogatoires, qui seront examinées dès ce jeudi en commission avant d’être introduites en séance plénière pour les débats et leur adoption.

Pour le comité paritaire, la solution la plus indiquée pour des élections législatives inclusives passerait par la révision de la Constitution du 11 décembre 1990. Celui-ci propose ainsi une loi dérogatoire modificative et complétive de la loi N° 2018-23 du 17 septembre 2018, qui concerne la charte des partis politiques. La deuxième proposition de loi dérogatoire modificative et complétive concerne la loi N° 2018-31 d’octobre 2018, et porte sur le code électoral. Enfin, la proposition de révision de l’article 80 de la Constitution, devrait entraîner la prorogation du mandat de la 7e législature de 45 jours.

Si elles sont validées, ces propositions permettront aux partis politiques de bénéficier d’un délai supplémentaire de 10 jours afin de se faire enregistrer. Les partis de l’opposition qui n’ont pas pu obtenir le certificat de conformité pourront ainsi se mettre à jour et tenter de participer au jeu électoral.

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Pas l’unanimité

Réviser la Constitution dans le contexte actuel ne semble pourtant pas être accueilli favorablement par une partie de l’opinion publique et de la classe politique. « Nous avons demandé des élections inclusives, pas une modification de la loi fondamentale ! C’est une autre ruse du pouvoir pour nous conduire dans le gouffre », s’indigne le député de l’opposition Guy Dossou Mitokpè.

Certains craignent de voir se répéter les événements de 2006, lorsque les députés avaient modifié l’article 80 de la Constitution pour proroger leur mandat de douze mois. La Cour constitutionnelle avait alors estimé que la révision de la Constitution du Bénin, étant le fruit d’un large consensus national, ne saurait se faire sans un large consensus national.

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« Le large consensus ne peut être obtenu que par la voie référendaire parce que l’Assemblée nationale ne saurait l’incarner à elle seule. Si les députés procèdent de la même manière qu’en 2006, les mêmes causes produisant toujours les mêmes effets, la Cour constitutionnelle prendra la même décision », explique un membre de la Cour constitutionnelle sous couvert d’anonymat.

La formulation du projet de révision laisse également planer des doutes sur sa pertinence, selon certains. « Lorsque le renouvellement à bonne date de l’Assemblée nationale est compromis par des menaces graves à la paix sociale, l’Assemblée nationale peut proroger le mandat en cours d’un délai qui ne peut excéder 45 jours par un vote aux 5/6 des députés composant l’Assemblée nationale », indique le texte.

Une formulation que rejette notamment Victor Topanou, membre du front politique de l’opposition et ancien ministre de la Justice sous le président Thomas Boni Yayi. « Ici, les menaces graves à la paix sociale ne sont pas les causes mais bien les conséquences du non renouvellement à bonne date de l’Assemblée nationale », explique-t-il.

Quid de la campagne électorale ?

Autre point décisif de la session extraordinaire : le calendrier électoral. Celui-ci pourrait être bousculé si les députés arrivaient à s’accorder et décidaient d’une élection inclusive. Si la date du 29 avril retenue pour le scrutin était respectée, la durée de la campagne devra être écourtée. Selon le calendrier conçu par la Commission électorale nationale autonome (Cena), la campagne électorale est prévue pour démarrer le 12 avril 2019.

Les députés ont donc la double responsabilité de faire participer toutes les tendances politiques aux législatives, et de tenir le scrutin dans les délais impartis. Si les discussions échouent, le processus électoral serait davantage mis à mal.

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