Bénin : après le constat d’échec à l’Assemblée, l’absence de l’opposition aux législatives semble inéluctable

L’absence de listes d’opposition aux législatives du 28 avril semble désormais acquise. Après l’échec des discussions menées à l’Assemblée nationale, les forces en présence s’accusent mutuellement de multiplier les stratégies dilatoires. Et les regards se tournent vers le président Patrice Talon.

Le président béninois Patrice Talon et le président de l’Assemblée nationale (à droite) Adrien Houngbédji, le 6 mars. © RODRIGUE AKO/Présidence du Bénin

Le président béninois Patrice Talon et le président de l’Assemblée nationale (à droite) Adrien Houngbédji, le 6 mars. © RODRIGUE AKO/Présidence du Bénin

Fiacre Vidjingninou

Publié le 2 avril 2019 Lecture : 3 minutes.

Une femme vote au Bénin, lors du premier tour de la présidentielle, le 6 mars 2016 (archives). © Valentin Salako / AP / SIPA
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Législatives au Bénin sans l’opposition : les enjeux d’un scrutin inédit

Les Béninois sont appelés aux urnes, dimanche 28 avril, pour des législatives inédites dans le pays depuis l’instauration du multipartisme : aucune liste d’opposition ne participe à ce scrutin. Un « recul de la démocratie et de l’État de droit », pour l’opposition, accusée par la mouvance présidentielle de n’avoir « pas été à la hauteur des exigences des nouvelles lois ».

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« Je voudrais faire constater que nous sommes en fin de session et que nous n’avons pas encore reçu une proposition de lois de la part de l’opposition. L’ordre du jour se trouve épuisé… Je vais être obligé de clôturer la quatrième session extraordinaire », lance, visiblement dépité, Adrien Houngbédji, président de l’Assemblée nationale, sur un ton de dépit. Lundi, c’est sur ce constat d’échec que s’est clôt la session parlementaire ouverte le 18 mars pour trouver des solutions à la crise préélectorale. Au cœur de la polémique : la non-participation des partis de l’opposition aux législatives du 28 avril. Et à moins d’un mois du scrutin, les perspectives d’élections législatives inclusives s’éloignent inéluctablement.

Stratégies dilatoires

Malgré une dizaine de jours de négociations, députés de la mouvance et de l’opposition ne sont pas parvenus à s’entendre sur les voies de sortie de crise. Le comité mis en place par le président de l’Assemblée nationale, dans lequel siègent deux députés de la mouvance et deux députés de l’opposition, a bien étudié les propositions des divers partis politiques et proposé deux « lois dérogatoires et complétives » au nouveau Code électoral et à la nouvelle Charte des partis politiques, à l’origine de l’impasse actuelle.

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Ces propositions comportent une révision de l’article 80 de la Constitution, à savoir une prorogation du mandat des députés actuels, afin de donner le temps de trouver un consensus. Soumises à la plénière des députés, jeudi 28 mars, elles ont toutes deux été rejetées à l’unanimité des parlementaires présents, moins une abstention.

De nouvelles discussions devaient s’engager dès le lendemain pour donner une nouvelle chance au compromis. Mais les deux camps s’accusent mutuellement de multiplier les stratégies dilatoires.

Les députés de la mouvance, qui disent avoir vainement attendu leurs homologues de l’opposition à l’hémicycle tout au long de la journée du vendredi, ont « solennellement [pris] acte du défaut du consensus tant attendu ». Affirmant que « l’opposition n’est aucunement dans la logique de la recherche du consensus », la majorité a donc appelé les Béninois à se rendre aux urnes, dimanche 28 avril.

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Lundi, l’opposition a rétorqué que c’est au contraire la majorité parlementaire qui est « responsable de l’échec du consensus », et s’est déclarée « ouverte à toutes négociations pour une issue consensuelle ».

La campagne démarrera le 12 avril

Après la fermeture des portes du dialogue au Parlement, les regards sont désormais tournés vers le chef de l’État, Patrice Talon, qui continue ses concertations. Lundi, il a reçu le collectif des présidents des institutions constitutionnelles (Parlement, Cour constitutionnelle, Cour suprême, Haute cour de justice, Conseil économique et social, Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication). Une rencontre à laquelle ont également participé le médiateur de la République et le président de la Commission électorale nationale autonome (CENA).

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Le texte rendu public à l’issue des discussions appelle à la « poursuite du processus électoral et à la tenue des élections à bonne date », renvoyant de fait la résolution du conflit mettant aux prises le pouvoir et l’opposition à après les élections, et plaide pour la « poursuite du dialogue pour améliorer la qualité des textes en vigueur dans la perspective des échéances ultérieures » à après le scrutin.

Sur le terrain, les deux seuls partis de la mouvance présidentielle dont les listes ont été acceptées pour le scrutin – le Bloc républicain (BR) et l’Union progressiste (UP) – sont résolument engagés dans la préparation de leur campagne.

La CENA maintient son calendrier et clôt, ce mardi, la formation du personnel électoral. Le démarrage officiel de la campagne électorale est pour sa part fixée au 12 avril. À moins d’un revirement spectaculaire, les prochaines législatives auront donc lieu sans l’opposition. Une première depuis l’instauration du multipartisme, en 1990, dans ce pays réputé pour son expérience démocratique et l’organisation pacifique de ses élections.

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