Législatives anticipées en Israël : vers un cinquième mandat pour Benyamin Netanyahou ?

Les élections législatives anticipées en Israël auront lieu mardi 9 avril, après une violente campagne bousculée par le blocus de la bande de Gaza et les affaires de corruption du Premier ministre Benyamin Netanyahou.

Une affiche électorale montrant le Premier ministre Netanyahou serrant la main du président américain Donald Trump, en février 2019 à Tel-Aviv. © Yasushi Kaneko/AP/SIPA

Une affiche électorale montrant le Premier ministre Netanyahou serrant la main du président américain Donald Trump, en février 2019 à Tel-Aviv. © Yasushi Kaneko/AP/SIPA

Arianna Poletti

Publié le 8 avril 2019 Lecture : 4 minutes.

Si son parti remporte les élections législatives prévues le 9 avril prochain, celui que ses supporters appellent melekh yisrael – roi d’Israël – deviendra le Premier ministre qui aura présidé le plus longtemps aux destinées du pays, devançant le père fondateur David Ben Gourion. Mais la victoire ne va pas de soi pour Benyamin Netanyahou.

À la tête de l’État hébreu depuis 2009 – après avoir gouverné entre 1996 et 1999 – éclaboussé par plusieurs scandales de corruption, l’actuel chef du gouvernement (69 ans) est favori de tous les sondages, même si son dauphin, l’ancien chef d’état-major Benny Gantz (Bleu Blanc, centre), le talonne de près. Le scrutin aura donc valeur de test pour cet homme politique controversé qui joue son va-tout, et devra quoi qu’il arrive nouer des alliances. « Cette campagne électorale se résume ainsi : Netanyahou au gouvernement ou Netanyahou à la porte. C’est un référendum sur sa personne », déclare à Jeune Afrique Denis Charbit, politologue franco-israélien de l’Open University de Tel-Aviv.

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Si les législatives étaient initialement prévues pour novembre 2019, les dirigeants de la coalition au gouvernement ont décidé à l’unanimité de dissoudre le Parlement et de retourner aux urnes début avril à cause des désaccords sur un projet de loi obligeant les juifs ultra-orthodoxes à effectuer le service militaire. Soutenue par la droite nationaliste et religieuse, la coalition dirigée par le parti Likoud (droite) de Netanyahou a alors cédé : elle n’avait plus qu’un seul siège pour bénéficier de la majorité depuis que le ministre de la Défense, l’ultra-nationaliste Avigdor Lieberman, et son parti, ont claqué la porte du gouvernement, en novembre 2018, pour protester contre le cessez-le-feu signé avec le Hamas.

« Chasse aux sorcières »

L’avancement de ce calendrier électoral a permis à Netanyahou de se présenter, même avec trois chefs d’inculpation sur le dos. En effet, en février, le procureur confirmait les soupçons de corruption, fraude et abus de confiance pesant sur lui : en plus d’avoir supposément reçu des milliards de shekels (centaines de millions d’euros) en produits de luxe de la part de plusieurs personnalités influentes, en échange de faveurs financières et personnelles, Netanyahou aurait payé différents médias pour une couverture médiatique plus favorable.

Une dernière audition doit avoir lieu avant le dépôt formel des accusations, ce qui n’arrivera pas avant les élections. « Le choix de dissoudre le Parlement est stratégique. Netanyahou pense que sa réélection pourra le légitimer et pousser les autorités judiciaires à faire marche arrière », explique Denis Charbit.

Pour son électorat, le bilan de Netanyahou ne peut être que positif : économiquement le pays va bien, et les relations entre Israël et les États-Unis n’ont jamais été aussi bonnes

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Son prédécesseur, Ehud Olmert, avait, lui, démissionné avant d’être officiellement inculpé en 2008. Mais Netanyahou dénonce une « chasse aux sorcières ». Selon notre spécialiste, « même si pour la justice il est trois fois coupable, Netanyahou reste haut dans les sondages. Pour son électorat, son bilan ne peut être que positif : économiquement le pays va bien, et les relations entre Israël et les États-Unis n’ont jamais été aussi bonnes. Le déplacement de l’ambassade américaine, la reconnaissance par Trump de l’autorité israélienne sur le Golan et le rétablissement des sanctions à l’égard de l’Iran ont eu un impact considérable. »

La question palestinienne au cœur de la campagne

Pendant cette période de campagne électorale, la question palestinienne est revenue au cœur de la propagande de la droite, toujours abordée sous l’angle sécuritaire. « Par rapport aux élections précédentes, la Cisjordanie et notamment Gaza constituent un enjeu central. Dans ce contexte politique national et international, avec Trump comme principal allié, le retrait des Israéliens de la Cisjordanie n’est même plus évoqué », souligne Denis Charbit.

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En effet, pendant la dernière semaine de campagne, Benjamin Netanyahou est allé jusqu’à déclarer qu’il annexera des colonies de peuplement en Cisjordanie en cas de réélection, en espérant attirer les votes de la droite nationaliste. « Vous me demandez si nous passerons à l’étape suivante. Eh bien, la réponse est oui », a-t-il déclaré lors d’une interview diffusée sur les principales chaînes israéliennes. Interrogé sur le même sujet, son adversaire Benny Gantz a affirmé : « Nous ne renoncerons pas à une Jérusalem unifiée ».

Concernant Gaza, Netanyahou est critiqué aussi bien par l’ancien ministre de la Défense Avigdor Lieberman que par le centriste Benny Gantz. « Il est obligé de réagir, mais il sait qu’il ne peut pas se permettre de mener une guerre à Gaza à quelques jours des élections », explique Leïla Seurat, chercheuse au Centre de recherches internationales de Sciences Po Paris (CERI).

>>> À LIRE – Plateau du Golan : « Le positionnement américain pourrait banaliser la question israélo-palestinienne »

Selon cette spécialiste du Mouvement de la résistance islamique (Hamas), les bombardements menés par Israël dans la nuit du 24 au 25 janvier, à la suite d’un tir de roquette lancé depuis le sud de Gaza sur le village de Mishmeret, doivent être perçus dans ce contexte particulier. Si la situation actuelle à Gaza semble favoriser Netanyahou, il s’agit d’un moment décisif également pour le Hamas.

« Le mouvement est clairement en train de faire pression sur le gouvernement israélien pour obtenir des concessions, à court comme à long terme, poursuit Leïla Seurat. Côté Hamas, ce qui se joue est une levée du blocus contre une trêve de longue durée avec Israël. Le tout au détriment de l’autorité de Ramallah. »

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