Soudan : l’armée promet une déclaration « importante », Khartoum en ébullition
L’armée soudanaise a promis jeudi une « déclaration importante bientôt », déclenchant de nouvelles scènes de liesse devant le quartier général des militaires à Khartoum, où des milliers de manifestants campent en réclamant le départ du président Omar el-Béchir.
La foule déterminée avait défié toute la journée de mercredi le régime devant ce siège de l’armée, dont les intentions, tout comme celles de la police, restent pour l’instant incertaines. « L’armée soudanaise va diffuser une importante déclaration bientôt. Attendez-la », a dit un présentateur sur la télévision d’Etat jeudi matin.
« Trente ans de répression, c’est assez »
La télévision d’Etat n’a pas donné davantage de détails et diffusait des chants militaires, alors que la contestation populaire entrait dans sa sixième journée consécutive. « Nous attendons de grandes nouvelles. Nous ne partirons pas d’ici tant que nous saurons pas ce que c’est », a indiqué un manifestant devant le siège de l’armée.
« Mais nous savons que Béchir doit partir. Nous avons eu assez de ce régime. Trente ans de répression, de corruption, d’abus de droits. C’est assez », a-t-il poursuivi. Plusieurs véhicules militaires transportant des troupes sont entrés dans le complexe qui abrite le QG de l’armée dans les premières heures de la journée de jeudi, ont déclaré des témoins.
Mercredi, le parti du Congrès national (NCP) du président Béchir avait appelé l’ensemble de ses membres à un rassemblement de soutien au chef de l’Etat jeudi à Khartoum, signe que le président ne semblait pas prêt à céder. Mais, mercredi soir, ce rassemblement a été reporté sine die.
« Protéger les citoyens »
« Des hommes et des femmes de toutes les coins de Khartoum et d’autres villes viennent pour ce qu’ils appellent le service de nuit », a de son côté souligné un manifestant mercredi soir, pour marquer la détermination des protestataires. Depuis samedi, les manifestants ont essuyé à plusieurs reprises les assauts du puissant service de renseignement NISS, qui a tenté en vain de les disperser à coups de gaz lacrymogène, selon les organisateurs du rassemblement.
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Mardi, 11 personnes dont six membres des forces de sécurité ont été tuées lors de manifestations à Khartoum, a rapporté mercredi le porte-parole du gouvernement Hassan Ismail, sans préciser les circonstances de leur mort, selon l’agence officielle Suna. En tout, 49 personnes sont mortes dans des violences liées aux manifestations depuis que ces rassemblements ont commencé en décembre, de sources officielles.
Agitant des drapeaux nationaux et entonnant des chansons révolutionnaires, les contestataires ont appelé l’armée à rejoindre leur mouvement de contestation, né en décembre mais qui a connu un net regain de mobilisation samedi. Aucune tentative de dispersion n’a été rapportée pour la journée de mercredi. « Il semble que la police soit avec nous aussi », a estimé un manifestant.
Mardi, la police avait annoncé avoir ordonné à ses forces de ne pas intervenir contre les contestataires. Elle a aussi dit vouloir l’union du « peuple soudanais (…) pour un accord qui soutiendrait un transfert pacifique du pouvoir ».
Concernant les militaires, le général Kamal Abdelmarouf, chef d’état-major de l’armée, avait précisé lundi que celle-ci continuait « d’obéir à sa responsabilité de protéger les citoyens ».
« Transition crédible »
L’étincelle de la contestation a été la décision du gouvernement de tripler le prix du pain le 19 décembre. A travers le pays, des milliers de Soudanais ont appelé au départ de M. Béchir. Le président a tenté de réprimer la contestation par la force, puis a instauré le 22 février l’état d’urgence à l’échelle nationale.
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Mardi, des capitales occidentales ont appelé les autorités à répondre aux revendications « d’une façon sérieuse ». Le pouvoir doit proposer « un plan de transition politique crédible », ont écrit les ambassades des Etats-Unis, du Royaume-Uni et de la Norvège dans un communiqué conjoint à Khartoum.
Mercredi, Washington a exhorté le pouvoir à respecter le droit de manifester. « Nous appelons le gouvernement du Soudan à respecter les droits de tous les Soudanais à exprimer leurs doléances pacifiquement », a tweeté Tibor Nagy, secrétaire d’Etat adjoint chargé de l’Afrique.
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