Législatives sans l’opposition au Bénin : Patrice Talon reste ferme et justifie la poursuite du processus électoral

Le président béninois s’est plié à l’exercice d’un long entretien télévisé, jeudi soir, à la veille de l’ouverture officielle de la campagne pour les législatives du 28 avril, auxquelles aucune liste d’opposition n’a été autorisée à participer.

Les président béninois Patrice Talon, lors de l’émission « Face à Face », le 11 avril 2019. © DR / présidence du Bénin

Les président béninois Patrice Talon, lors de l’émission « Face à Face », le 11 avril 2019. © DR / présidence du Bénin

Fiacre Vidjingninou

Publié le 12 avril 2019 Lecture : 3 minutes.

Une femme vote au Bénin, lors du premier tour de la présidentielle, le 6 mars 2016 (archives). © Valentin Salako / AP / SIPA
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Législatives au Bénin sans l’opposition : les enjeux d’un scrutin inédit

Les Béninois sont appelés aux urnes, dimanche 28 avril, pour des législatives inédites dans le pays depuis l’instauration du multipartisme : aucune liste d’opposition ne participe à ce scrutin. Un « recul de la démocratie et de l’État de droit », pour l’opposition, accusée par la mouvance présidentielle de n’avoir « pas été à la hauteur des exigences des nouvelles lois ».

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C’était un entretien très attendu par les Béninois, alors que le pays s’apprête à des législatives lors desquelles aucun opposant ne sera candidat. Un entretien « sans langue de bois », avaient promis les services de la présidence. Mais en confirmant, une nouvelle fois, la poursuite du processus électoral, Patrice Talon est loin d’avoir répondu aux attentes exprimées par les différentes composantes de l’opposition.

Ferme et sûr de lui face aux deux journalistes qui l’ont interrogé – André Dossa et Ozias Sounouvou -, le président béninois est longuement revenu sur les fondements de la crise électorale, affirmant avoir tenté de l’enrayer. Mais s’il a reconnu que la non-participation de l’opposition au processus électoral était « de nature à discréditer notre modèle démocratique », il a réfuté que le pays se trouvait dans une « impasse ».

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« Ce n’est pas parce que ce qui se passe n’honore pas l’image démocratique du Bénin que cela constitue un blocage du fonctionnement démocratique du pays », a-t-il martelé.

Charge contre les « perversions » du système

Sur le bien-fondé des réformes du code électoral et de la charte des partis politiques, considérées comme étant à l’origine de la crise préélectorale, le président béninois a rétorqué que « la réforme du système partisan n’a pas été une initiative de Patrice Talon. On l’oublie trop souvent et il convient de rétablir cette vérité ».

Les forces politiques présentes au parlement sont en permanence dans des relations incestueuses, perverses avec l’exécutif

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Il n’en a pas moins défendu « une réforme osée, courageuse et nécessaire », et s’est livré à une virulente critique des « perversions » d’un système dont il a jugé que la perpétuation serait synonyme de « suicide collectif ».

« Les forces politiques présentes au parlement sont en permanence dans des relations incestueuses, perverses avec l’exécutif. Ce sont des négociations de couloirs, toutes sortes de marchandage, et chacun négocie son soutien au président de la République en échange de quelque chose et non en fonction d’un idéal », a-t-il notamment dénoncé.

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Quant à l’exclusion de fait de l’ensemble des partis politiques d’opposition du processus électoral, il renvoie la responsabilité à cette dernière, les accusant de vouloir « garder leur fonds de commerce pour négocier avec l’exécutif pour avoir des postes de responsabilité ».

« Nous avions des partis limités à des régions données » a accusé Patrice Talon, affirmant que leur seule issue pour continuer d’exister était « la remise en cause de la réforme ». « Nous voulons construire une Nation et nous continuons à parler de région dans notre pays. C’est un choix difficile je sais mais il faut l’opérer », a-t-il martelé.

Sur l’incapacité des différents acteurs à trouver une solution de sortie de crise, là encore, il a pointé du doigt l’opposition pour avoir « remis en cause ce consensus » en exigeant un « retour en arrière pur et simple ».

Refus de bloquer le processus électoral

Sur l’éventuel recours à l’article 68 de la Constitution, donnant droit au président d’exercer des pouvoirs exceptionnels en attendant une sortie de crise négociée, Patrice Talon réponds par la négative. Ce serait « un coup d’État ».

Il fonce dans le mur et dit être dans son bon droit

Il refuse également l’option de l’organisation d’une conférence nationale, arguant qu’elle constituerait « une remise en cause de l’ordre constitutionnel ». Tout en restant sans appel sur la poursuite du processus électoral, Patrice Talon met également en garde l’opposition : « Il ne faut pas brûler le pays, et je ne le permettrai pas d’ailleurs ».

Un argumentaire qui a reçu peu d’écho au sein de l’opposition, qui continue d’accuser le président béninois de l’avoir volontairement écarté de ces élections. « C’est de la désolation ! Il fonce dans le mur et dit être dans son bon droit », se désolé ainsi Guy Mitokpè, député du parti d’opposition « Restaurer l’espoir » de Candide Azannaï. « Je le répète encore une fois. Ces élections ne se feront pas sans les partis de l’opposition. Nous n’accepterons pas cela, c’est plus que clair. Il peut continuer son discours esseulé, il est inaudible. »

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