Vos lettres et emails sélectionnés

Publié le 24 mai 2004 Lecture : 8 minutes.

Justice pour les victimes de la guerre en RDC
Il ne peut y avoir de réconciliation véritable, de stabilité et de paix en RD Congo et dans la région des Grands Lacs qu’à condition que les criminels de guerre soient jugés et condamnés, que la vérité sur les violences soit établie et que les victimes reçoivent des réparations. L’actuel gouvernement de transition de RDC doit pouvoir établir, en étroite concertation avec la société civile congolaise et la communauté internationale, un cadre permettant d’affronter correctement le passé pour que les auteurs des crimes répondent de leurs actes.

Pourquoi pas une rue Jean-Sablon ?
Regrettant de ne pas voir davantage de patronymes africains courir les rues françaises, l’auteur de l’article « Au nom de l’Afrique » (J.A.I. n° 2256) situe, à l’inverse des personnages qu’il souhaiterait voir honorés, Jean Sablon dans la catégorie des personnages « sympathiques » qu’il est difficile de classer dans la catégorie « traditionnelle » des « grands hommes ». Le propos me paraît malheureux, car il vise à instituer en valeur universelle une hiérarchie subjective des disciplines ou des métiers qu’il cherche à faire passer pour objective (notamment en évoquant une supposée catégorie « traditionnelle » des grands hommes). Si certains grands hommes africains comptèrent parmi les brillantes figures du siècle, Jean Sablon eut incontestablement l’une des carrières les plus importantes de son siècle pour un chanteur français. Il se fait simplement que Jean Sablon n’était pas monsieur Houphouët-Boigny, pour prendre cet exemple, et que monsieur Houphouët-Boigny n’était pas Jean Sablon. Tous deux ont vécu dans un monde qui ne pourrait se passer ni d’hommes d’État ni davantage d’artistes. Il se fait aussi que Paris n’est, hélas !, pas assez grand pour célébrer toutes les personnalités qui le mériteraient.
Réponse : Il n’était pas dans notre intention de nier l’apport de Jean Sablon au rayonnement de la chanson française. Au regard de l’Histoire, toutefois, les artistes pèsent en général moins que les hommes d’État.

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La justice a un prix
La base d’une société qui veut vivre dans l’harmonie et dans la paix n’est rien d’autre qu’une justice équitable, impartiale et surtout indépendante. Mais comment immuniser les juges contre la corruption lorsque leurs salaires ne dépassent pas l’équivalent de 80 euros ?

Pas assez de Sud-Sahara…
Fidèle lecteur de J.A.I, je remercie toute l’équipe de son travail. Mais je constate qu’il n’y a pas assez d’actualités concernant les pays d’Afrique subsaharienne dans notre hebdomadaire. J.A.I essayerait-il de se repositionner essentiellement sur les pays maghrébins ? Les Africains noirs ont peut-être un pouvoir d’achat inférieur aux autres, mais J.A. a été et reste un des seuls moyens d’information indépendant et crédible en Afrique noire où certains dirigeants ont la mainmise sur les médias locaux.
Réponse : C’est un reproche que nous font régulièrement les Subsahariens. Mais les lecteurs du nord de l’Afrique nous disent aussi, de leur côté : il n’y en a que pour l’Afrique noire… Il est possible qu’un déséquilibre se crée à un moment ou à un autre en faveur d’une région. En général, c’est l’actualité qui le commande.

Je veux vivre libre !
J’en ai assez. Je suis marocaine et je vois mon pays se dégrader de jour en jour avec la montée des islamistes. Dans les rues, on voit de plus en plus d’hommes portant des barbes et des vêtements qui font penser à ces tyrans de talibans. J’ai 20 ans et je me sens agressée dans mon propre pays. J’ai envie de profiter de ma vie sans qu’on me fasse des remarques sur ma manière de m’habiller. J’ai envie de sortir le soir sans avoir l’impression qu’une bombe va exploser. J’ai envie de me promener en tenant la main de mon fiancé sans qu’un policier vienne vérifier mes papiers. J’ai peur que la jeunesse marocaine s’isole du monde…

Les Lettons nous font la leçon
L’élargissement de l’Union européenne de quinze à vingt-cinq membres est une occasion de découvrir les particularités de chaque État. C’est ainsi que j’ai appris que la Lettonie, petit pays de 2,3 millions d’habitants, était l’exemple même d’une démocratie jeune et moderne : la moyenne d’âge des membres du gouvernement est d’à peine 40 ans et, lors du Conseil des ministres, les blocs-notes cèdent la place aux ordinateurs portables. C’est un exemple pour l’Afrique. Pour que nos dirigeants décident enfin de mettre en place des dispositifs d’accueil et d’intégration des jeunes cadres sortis des grandes écoles occidentales. Le développement de l’Afrique ne se fera qu’avec sa jeunesse. Notre continent a besoin de sang neuf !

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Excessif, donc insignifiant
J’ai été surpris de voir publier un courrier aussi navrant à l’occasion de l’inauguration de l’esplanade Habib-Bourguiba à Paris (J.A.I. n° 2260). Sur le fond, les propos, qui comparaient le 20 mars, date de l’indépendance, avec l’abdication du traité de Bardo, étaient insultants pour les martyrs et les militants qui se sont sacrifiés pour que la Tunisie soit indépendante. Sur la forme, critiquer Bourguiba, de Gaulle ou Churchill n’est pas un problème ; c’est la rançon de la gloire. Mais permettez-moi de préférer la critique structurée et le débat d’idées. Il est vrai qu’il est plus facile de s’attaquer à un mort, il ne peut ni vous répondre ni vous faire arrêter.

Bourguiba : un grand homme
J’ai lu dans le n° 2260 le courrier du docteur M’Hallah Abdesselam intitulé « Bourguiba, fils adoptif de la France ». Que monsieur M’Hallah veuille exprimer son point de vue c’est tout à fait légitime. Mais il ne parle pas au nom des Tunisiens quand il déclare : « Pour les Tunisiens, il [Bourguiba] est un imposteur. » Avec le recul historique, je conteste ces propos que je trouve très ingrats vis-à-vis d’un homme qui, malgré les erreurs qui ont entaché son parcours, a fait beaucoup pour la Tunisie. Les Tunisiens dans leur grande majorité saluent la mémoire de ce grand homme.

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Qu’a fait Diallo Telli ?
La démission de François Fall est un tournant majeur dans la vie politique et socio-économique guinéenne. Nous étions jusqu’alors habitués à des hommes politiques qui ne s’opposent au pouvoir qu’après avoir perdu leurs privilèges. Le plus illustre d’entre eux, Diallo Telli, ne s’est jamais opposé officiellement au pouvoir dictatorial de Sékou Touré. Alors qu’il était secrétaire général de l’Organisation de l’unité africaine, il est resté à son poste sans broncher, pendant que d’anciens ministres, officiers, hauts fonctionnaires étaient pendus à Conakry sans aucune forme de procès. Pis, il a même accepté d’être le ministre de la Justice de Sékou Touré, occupant ainsi le poste d’une des victimes des nombreuses purges auxquelles il n’a pas cru bon de s’opposer.

Bush et le caméléon
Dans son livre intitulé Aspects de la civilisation africaine, le savant malien Amadou Hampâté Bâ évoque la prudence du caméléon qui dit : « J’envoie ma langue tâter le terrain, avec au moins la ressource de la ramener si je ne peux ramener la proie. » George W. Bush et ses alliés devraient tirer profit de cette sagesse africaine pour mettre fin au massacre de leurs soldats embourbés en Irak.

Pas touche à La Mecque !
Dans le J.A.I. n° 2259, vous évoquez la réussite du groupe Mecca Cola. Je suis indigné de voir le nom de La Mecque, le plus haut lieu de l’islam, associé à une boisson, fût-elle gazeuse. Par ailleurs, figure sur la canette la mention « ne pas mélanger à des spiritueux ». Hypocrisie, quand tu nous tiens !

Ces brevets qui assassinent l’Afrique
Les industries pharmaceutiques détournent leur regard des pays du Tiers Monde à cause du faible pouvoir d’achat de leurs habitants. Le paludisme, notamment, ravage l’Afrique dans l’indifférence la plus totale. Des milliers de vies humaines sont sacrifiées sur l’autel du mercantilisme. Seule l’ONG Médecins sans frontières a tiré le signal d’alarme. Pour le bien de l’humanité, l’Organisation mondiale du commerce ferait bien d’abolir la règle des brevets et permettre la fabrication massive de produits génériques, providentiels pour tout un continent.

Merci à Oriana Fallaci
Faisant suite à votre article sur le nouveau livre d’Oriana Fallaci (J.A.I. n° 2259), et quoique ne partageant pas totalement certaines de ses outrances, je trouve néanmoins étrange votre réaction au sujet des passages du livre où elle semble souligner les moments de l’Histoire où les chrétiens ont réagi face à l’Islam conquérant.
Je comprends tout de même votre point de vue de musulman. Mais en ce qui me concerne, étant chrétien et fier de l’être, je me félicite du triomphe des Rois Catholiques, qui ont achevé dans la gloire de la prise de Grenade une reconquête qui a duré sept siècles. Tout protestant que je suis, c’est à genoux que je leur dis encore et cela par-dessus les âges : Merci.
Réponse : Vous êtes évidemment libre de vos opinions, mais non d’interpréter à votre guise celles d’autrui. Pour ma part, n’étant pas chrétien, moins encore musulman et pas davantage juif, mais résolument incroyant, c’est au nom d’une certaine idée de la civilisation que j’ai déploré la destruction par les Rois Catholiques de la merveilleuse synthèse andalouse, qui conduira notamment à la persécution des juifs et des « morisques ». Mais, je le répète, à Maïmonide ou Averroès, vous êtes libre de préférer le grand inquisiteur Torquemada, confesseur de ces Rois Catholiques que vous semblez tant admirer.

Guinée : les leçons d’une démission
François Fall a agi courageusement en démissionnant de son poste de Premier ministre (J.A.I. n° 2260). Mais pourquoi les grandes figures politiques, après avoir quitté le pouvoir, se réfugient-elles en Occident ? Elles donnent ainsi l’impression de ne pas se sentir à l’aise dans leur pays. Leur comportement ressemble à celui des experts étrangers qui, une fois leur temps de mission écoulé, plient bagage et prennent le large. Je suis également étonné de lire que Lansana Conté a fait de la Guinée sa propriété privée. Si les choses étaient ainsi, il la protégerait avec soin. C’est justement parce que la Guinée ne lui appartient pas qu’il se comporte avec elle sans scrupule.

Il faut que les jeunes s’engagent
Je suis choqué de l’indifférence de la jeunesse en général, et de celle d’Afrique en particulier, pour le débat politique. Comment allons-nous sortir du sous-développement dans lequel nous maintiennent la plupart de nos dirigeants si nous ne nous impliquons pas de façon individuelle et collective dans le jeu politique ? La politique ne doit plus rester l’affaire des politiciens, car c’est le peuple qui paie le prix de leurs égarements et de leurs choix, qui sont le plus souvent égoïstes et hasardeux. C’est notre responsabilité d’élire les dirigeants qu’il faut.

Une école pour enseigner la démocratie
Je voudrais rendre un ultime hommage à Nelson Mandela à l’occasion du dixième anniversaire de la fin de l’apartheid en Afrique du Sud et lui demander de rendre un autre service à l’Afrique : la création d’une école où l’on apprendra à quitter le pouvoir à la fin de son mandat en faisant confiance à un autre de ses concitoyens. Une école qui enseignera que les intérêts du pays passent avant le sort du chef de l’État. Madiba pourra recruter les enseignants parmi de grandes figures dont l’Afrique peut être fière : Alpha Oumar Konaré, Abdou Diouf, Jerry Rawlings…

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