Tunisie : polémique autour de financements d’Ennahdha aux municipales de 2018

La Cour des comptes a épinglé Ennahdha pour avoir bénéficié de dons suspects, qui auraient été versés par des personnes décédées, et utilisés pour financer la campagne du parti aux élections municipales de 2018. Ennahdha évoque de son côté des « erreurs » dans les noms des donateurs.

Les élections municipales tunisiennes ont eu lieu le 6 mai 2018. © Ilyess Osmane/AP/SIPA

Les élections municipales tunisiennes ont eu lieu le 6 mai 2018. © Ilyess Osmane/AP/SIPA

Wided

Publié le 26 avril 2019 Lecture : 3 minutes.

Le parti Ennahdha a-t-il bénéficié entre 2016 et 2018 de dons versés par des personnes décédées, utilisés pour financer sa campagne aux élections municipales de 2018 ? C’est en tout cas ce qu’a révélé la Cour des comptes dans un rapport publié le 24 avril. Si le document détaille les financements reçus par les partis et les listes indépendantes durant ce scrutin, ceux relatifs à Ennahdha ont largement retenu l’attention.

Au total, 68 dons sur les 135 569 que le parti islamiste a obtenus durant 2016 à 2018 – et utilisés pour les municipales – seraient suspects, selon l’analyse de la Cour des comptes. Ceux-ci auraient été versés par des personnes dont les noms ont renvoyé, après consultation des identités et des états civils, à des personnes décédées. Vingt-cinq donateurs seraient même morts depuis trois à onze ans, par rapport à la période de versement des dons.

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Des accusations rejetées en bloc par Ennahdha, dont le porte-parole a évoqué des « erreurs ». « Nous avons présenté des preuves expliquant les erreurs présentées par la Cour des comptes », a ainsi déclaré Imed Khemiri en conférence de presse organisée au lendemain de la publication du rapport. « Ces 68 cas sont en partie expliqués par une non-conformité des noms des donateurs avec les numéros de cartes d’identité saisies », a-t-il poursuivi. Le rapport doit être lu « dans sa globalité », selon lui, et éviter la politisation de ces « omissions ».

Le bureau exécutif du parti a également publié un communiqué dans lequel il a déclaré qu’il « interagira positivement avec tout le rapport ». « Le parti tient à la transparence et au respect de toutes les procédures juridiques régissant les partis et respecte le travail des institutions de l’État, dont la Cour des comptes ».

Ennahdha

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Un oubli de mise à jour ?

L’annonce de la Cour des comptes aurait surpris les membres d’Ennahdha, a précisé à Jeune Afrique Oussama Sghaier, député et membre du bureau central des affaires juridiques au sein du parti Ennahdha, qui a affirmé que les membres ignoraient ces dépassements. « Lorsque l’on a cherché à comprendre l’origine de ces dons, les proches de ces donateurs ont affirmé que leurs parents étaient habitués à donner une certaine somme au parti » depuis longtemps. Les noms n’auraient, selon lui, pas été enlevés de la liste des donateurs après leur mort, ni mis à jour avec celui des descendants. « Cette erreur, que nous assumons, n’a cependant pas influencé le scrutin » des municipales, a-t-il assuré, tout en certifiant que le parti présentera ses comptes.

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« La conférence de presse était claire, a-t-il précisé. Des erreurs de saisie ont été réalisées et nous en assumons pleinement la responsabilité. Nous avons été très réactifs et nous avons appelé la Cour à se présenter au Parlement afin d’exposer nos documents à la Cour et à l’opinion publique ».

>>> À LIRE – Municipales en Tunisie : les leçons du scrutin

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D’autres partis épinglés

D’autres partis ont été visé par le rapport de la Cour des comptes. Plusieurs failles ont été enregistrées dans plusieurs partis, tels que des soupçons sur les donateurs, le non-respect de la parité dans les listes des candidats, et le soutien financier à des listes indépendantes, ce qu’interdit le règlement des élections municipales.

Parmi les visés : Afek Tounes. Le parti a déclaré avoir été surpris de retrouver son nom dans le rapport de la Cour des comptes. « Afek Tounes est un des rares à afficher publiquement tous ses financements sur son site web », a-t-il précisé dans un communiqué publié mercredi.

Afek Tounes est notamment accusé d’avoir soutenu financièrement des listes indépendantes. Dans son communiqué, le parti a néanmoins affirmé que ces soutiens n’avaient pas été d’un ordre financier. « Tous nos dirigeants ont le droit de soutenir des listes indépendantes et nous l’avons déclaré publiquement. (…) Mettre en évidence ce fait est une action ciblée contre les dirigeants et membres du parti, et induit l’opinion publique en erreur », a-t-il déploré.

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