Tiktaalik, le poisson pilote

Publié le 25 avril 2006 Lecture : 2 minutes.

C’est le chaînon manquant, le fossile qui marque la transition anatomique entre les poissons et les vertébrés terrestres, comme l’Archéoptéryx marquera plus tard la transition entre les reptiles (les dinosaures) et les oiseaux. Il a été découvert dans l’île d’Ellesmere, au nord du Nunavut, territoire de l’Arctique canadien, à 960 kilomètres du pôle Nord, par une équipe de paléontologues de l’université de Chicago et de l’académie des sciences naturelles de Philadelphie.

Le fossile a les nageoires et les écailles osseuses d’un gros poisson de 1,2 à 2,7 mètres de long, mais aussi un crâne aplati d’une vingtaine de centimètres ressemblant à celui d’un crocodile, avec des dents de prédateur et un cou mobile. Il possède aussi, dans les nageoires, des os comparables à ceux du bras, de l’avant-bras, du poignet et de la main des futurs vertébrés terrestres. L’équipe dirigée par Neil Shubin, de l’université de Chicago, a commencé ses recherches dans l’île d’Ellesmere en 1999. C’est une source reconnue de fossiles du dévonien, période qui se situe entre 420 et 360 millions d’années dans le passé. En ce temps-là, Ellesmere faisait partie d’un supercontinent au climat tropical, comparable à celui du delta du Mississippi aujourd’hui. Shubin et son équipe savaient ce qu’ils cherchaient. Leurs repères : le poisson Panderichtys, qui vivait il y a 385 millions d’années, et les premiers tétrapodes (vertébrés à quatre pattes), l’Acanthosega et l’Ichtyostega, qui vivaient, eux, il y a 365 millions d’années.

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Le fossile de l’île Ellesmere a été baptisé « Tiktaalik » après consultation des anciens du Nunavut, ce qui signifie « gros poisson vivant dans un marécage ». On lui a attribué 380 millions d’années (L’Archéoptéryx, quant à lui, a 150 millions d’années. Voir tableau).
En fait, il a fallu plusieurs années de travaux jusqu’en juillet 2004 – pour découvrir le Tiktaalik et deux autres fossiles de la même époque. Et une bonne année de travail « chirurgical » pour détacher les éléments du fossile de la gangue rocheuse dans laquelle il a été conservé.
L’étude rendant compte de ces travaux a été publiée dans la revue Nature au début d’avril. Elle souligne le rôle essentiel qu’a joué le cou du Tiktaalik. Les poissons n’ont pas de cou et doivent bouger le corps entier pour orienter la bouche vers la nourriture qu’ils veulent absorber. Le Tiktaalik avait perdu les opercules qui protégeaient les branchies grâce auxquelles il pouvait vivre dans l’eau : sa tête se trouvait ainsi libérée. Cette « extra-mobilité » lui a permis de respirer hors de l’eau et de prendre ses repères sur une surface solide. Les premiers pas sur la Terre étaient possibles.

Il faudra encore 160 millions d’années pour que les reptiles aient droit de cité sur cette terre, mais Shubin et ses collègues paléontologues sont persuadés d’avoir découvert le poisson pilote, une nouvelle « icône de l’Évolution » sans laquelle la suite des temps n’aurait pas été ce qu’elle a été.

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