Tensions résiduelles

Le processus électoral devrait se dérouler dans le calme, même si plusieurs zones sensibles subsistent dans les régions frontalières.

Publié le 25 avril 2006 Lecture : 3 minutes.

« Il n’existe plus de forces non institutionnelles capables de remettre en cause le processus électoral en République démocratique du Congo. » Le lieutenant-colonel Frédéric Médard, porte-parole militaire de la Mission de l’Organisation des Nations unies au Congo (Monuc), se veut rassurant à près de deux mois de la tenue du scrutin. La situation sécuritaire n’a, en effet, plus rien à voir avec ce qu’elle était lorsque les troupes onusiennes sont arrivées dans le pays en 1999. Les opérations conjointes des Forces armées de RDC (FARDC) et de la Monuc ont permis de reconquérir l’essentiel du territoire, les programmes gouvernementaux de sécuriser le vote du référendum en décembre 2005, de démobiliser et commencer à réinsérer des milliers de combattants dans la vie civile. Sont concernés quelque 102 000 Congolais, ainsi que 8 400 soldats étrangers, rapatriés dans leurs pays d’origine (Rwanda, Burundi, Ouganda). Sur le plan politique, malgré les déclarations parfois tapageuses des chefs d’État voisins, il n’existe plus de risque majeur d’intervention d’armées étrangères.
« Il reste beaucoup à faire pour désarmer les derniers combattants et construire une armée nationale reconnue et professionnelle », explique néanmoins un diplomate. Actuellement, le pays dispose de 12 brigades intégrées (de 3 500 hommes chacune) et n’en aura, dans le meilleur des cas, que 14 au mois de juin au lieu des 18 prévues. Le processus de « brassage » de l’armée a pris du retard. « Cela ressemble souvent à du replâtrage. On équipe des ex-combattants et on leur donne une tenue vert olive, mais il faut un peu plus de temps pour en faire de vrais soldats. Il n’est pas facile de fondre dans un même ensemble des troupes régulières, des officiers rebelles et des miliciens sans formation », reconnaît un militaire. Les brigades manquent encore cruellement d’équipements et de soutien logistique. Faute de rations alimentaires et de soldes suffisantes (un première classe touche 20 dollars par mois), les soldats en viennent à vivre sur le dos des populations et se livrent à des actes inadmissibles (tracasseries administratives, vols, viols). La communauté internationale insiste donc sur la nécessité de maintenir des troupes internationales au lendemain des élections.
Sur le plan militaire, les FARDC et la Monuc doivent encore réduire les foyers de tensions et récupérer les nombreuses armes en circulation dans le pays. Il est notamment urgent de neutraliser les combattants Maï-Maï et ceux de l’ex-RCD-Goma (Rassemblement congolais pour la démocratie) dans le Nord-Kivu ainsi que les éléments des Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR), basées dans le Sud-Kivu et composées de soldats des ex-Forces armées rwandaises du régime Habyarimana, de miliciens Interahamwes et d’hommes recrutés dans les camps de réfugiés hutus de l’est du pays après 1994. Autre souci majeur : les milices dans l’Ituri. En mars, elles se sont emparées facilement d’une dizaine de postes contrôlés par l’armée congolaise dans les localités proches des rives du lac Albert, frontière naturelle avec l’Ouganda. Les positions ont depuis été reprises avec l’appui de la Monuc, mais l’incident montre le peu de combativité de certaines unités et le faible moral de leurs soldats. « Ces attaques répétées témoignent des intentions de ces groupes armés de rétablir les voies d’accès avec les pays voisins coupées fin 2005 et par lesquelles transitaient les armes et les produits de leurs trafics », commente le lieutenant-colonel Médard.
Le centre et le nord du Katanga sont également le théâtre de violences qui opposent des unités de l’armée régulière, mal payées et indisciplinées, à des milices tribales armées dès 1998 par le pouvoir de Kinshasa pour lutter contre l’armée rwandaise. Les deux camps s’en prennent aux civils. Ces affrontements ont entraîné le déplacement de plus de 120 000 personnes au Katanga, dont quelque 66 000 dans la région de Mitwaba. Les agences humanitaires tentent d’atténuer les souffrances des populations en distribuant des vivres (semences, farine de maïs et de haricots, huile, sel), des médicaments, du savon, des ustensiles de cuisine et des pagnes pour permettre aux femmes de recouvrer leur dignité après des mois passés à se cacher dans la brousse. Initié en 2004, le programme Désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR), qui a reçu 230 millions de dollars en novembre 2005, est censé offrir, à terme, une solution à quelque 150 000 ex-combattants. Pour toutes les populations de l’est du pays, sa réussite est un impératif de survie.

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