Landwind Un chinois sans chichi

Ses lignes sont désuètes, ses solutions techniques aussi. Mais l’Europe a tort de rire de ce tout-terrain venu de Chine, vrai 4×4 de labeur qui ne ménage pas sa peine et serre ses prix.

Publié le 25 avril 2006 Lecture : 3 minutes.

Landwind est le nain turbulent d’une industrie automobile chinoise devenue la troisième productrice mondiale. À peine deux modèles au catalogue, 30 000 ventes en 2005, mais toutes les audaces : le Landwind 4×4 restera la première voiture chinoise à avoir franchi les frontières de l’empire du Milieu pour aller tracer son sillon en Europe. Même si sa diffusion relève de l’anecdote, 760 exemplaires distribués en Allemagne, aux Pays-Bas et au Maroc, le symbole est fort : ce 4×4 aux épaules larges et aux traits patauds a ouvert une voie.
S’il pensait être bien reçu, le Landwind n’a pas tardé à comprendre que l’hospitalité n’était pas la première vertu de la Vieille Europe. Les journalistes spécialisés ont rempli leurs encriers de vinaigre pour fustiger ses solutions techniques et sa robe d’un autre temps, rire de ses piètres résultats aux crash-tests pratiqués par l’Adac, l’automobile club allemand, ou s’indigner des émissions polluantes de ses moteurs. Toutes critiques fondées, certes. Mais qui doivent être immédiatement mises en balance avec cette autre vérité : il n’est pas dans le monde de véhicule aussi vaste (4,78 m) proposé à si bas prix, 15 500 euros en version 4×2, 19 300 euros en version 4×4, avec un moteur essence de 2 000 cc !
Peu importe que le Landwind ne réponde pas aux canons de la mode 4×4. Toutes les marques spécialisées en tout-terrain se sont construites après la Seconde Guerre mondiale en déclinant plusieurs décennies durant la Jeep Willys, sous licence ou non. La recette « vieux pot, bonne soupe » a donc fait ses preuves dans une catégorie automobile qui ne cultive pas le genre frivole. Le Landwind ressemble à un Opel Frontera de la décennie 1990 dont il a repris la conception et le design. Ce qui ne rajeunira personne, le Frontera étant lui-même dérivé d’un 4×4 Isuzu des années 1980 Le Landwind s’en tient donc à des solutions techniques rustiques : châssis échelle, essieu arrière rigide et suspensions à lames, boîte de transfert enclenchée par un levier. En conséquence, il se dandine en courbes, mais assure l’essentiel en tout-terrain avec une garde au sol de 22 cm.
Un peu naïvement, il a cru séduire le public européen en lui offrant, de série, des éléments de confort qui peuvent surprendre à ce niveau de prix : sellerie cuir, climatisation, autoradio ! Le Landwind aurait mieux fait d’investir dans la sécurité : un seul airbag, pas d’ABS. Ou de soigner une modularité qui se limite à une banquette arrière fractionnable et rabattable. Enfin, il aurait dû lire avec davantage d’attention les normes européennes en matière de pollution : ses moteurs, 2.0 (115 ch) et 2.4 essence (125 ch) d’origine Mitsubishi, et 2.8 diesel (93 ch) d’origine Isuzu, ne répondent pas aux normes Euro 4, qui deviendront obligatoires cette année pour les véhicules non utilitaires.
Dans ces conditions, l’importateur belge du Landwind s’était déjà ravisé après avoir pris connaissance du rapport de crash-test établi par l’Adac. Les importateurs français, italien et portugais l’ont imité : ils préfèrent attendre une version plus élaborée du Landwind, qui sera présentée à l’automne lors du Salon automobile de Paris et répondra aux normes établies par l’Union européenne. Cette deuxième mouture du Landwind sera-t-elle proposée au même prix ? Sans doute pas
C’est là toute l’ambiguïté des normes européennes. À l’origine, elles procédaient d’un bon sentiment. À l’usage, il est permis de se demander si, en mettant à chaque fois la barre un peu plus haut en matière de sécurité et de protection de l’environnement, l’Europe ne cherche pas à ériger des barrières douanières d’un genre nouveau pour protéger son industrie automobile de la concurrence de véhicules à bas prix venus de pays en voie de développement. Dans sa définition actuelle, et même si ses petits moteurs peinent sous la charge (1 830 kg), le Landwind a l’immense mérite de proposer un tout-terrain neuf de fort volume au prix d’un 4×4 d’occasion. Alors, si l’Europe n’en veut pas, d’autres pays comprendront son intérêt. Car le Landwind répond à un besoin.

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