Algérie : à peine élu à la tête du FLN, Mohamed Djemai déjà contesté

Mohamed Djemai a été élu mardi 30 avril au poste de secrétaire général du Front de libération nationale (FLN), lors d’une session extraordinaire du 10e congrès du comité central. Une issue loin de faire l’unanimité dans les rangs du vieux parti.

Le nouveau président de l’Assemblée populaire nationale et secrétaire général du FLN Mohamed Djemai. © YouTube/Buzz News

Le nouveau président de l’Assemblée populaire nationale et secrétaire général du FLN Mohamed Djemai. © YouTube/Buzz News

Arianna Poletti

Publié le 2 mai 2019 Lecture : 3 minutes.

Un mois après la chute d’Abdelaziz Bouteflika, Mohamed Djemai a été élu à la tête du FLN. Ancien président du groupe parlementaire à l’Assemblée populaire nationale (APN) et député pendant dix-sept ans, le nouveau Secrétaire général (SG) du parti a recueilli 223 voix, devançant largement le favori Djamel Benhamouda (125 voix) et l’ancien président de l’APN Saïd Bouhadja (35 voix). Mohamed Djemai remplace ainsi Djamel Ould Abbès, qui avait démissionné en novembre.

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Aussitôt élu à la tête du FLN, Mohamed Djemai est déjà contesté. Le coordinateur du « mouvement de redressement » Abdelkrim Abada définit le résultat du scrutin comme une « véritable catastrophe pour le parti » et se dit « encore sous le choc ». Dans une déclaration au site d’information algérien TSA, l’ancien dirigeant n’a pas hésité à dénoncer une « mafia qui s’est emparée de la formation ».

« Ceci est le résultat de la politique de [l’ex-secrétaire général Amar] Saadani et de [son prédécesseur Abdelaziz] Belkhadem », a ajouté Abdelkrim Abada. Ce samedi 27 avril, ce dernier a violemment chargé l’ex-président Abdelaziz Bouteflika, l’accusant d’avoir « mené le FLN à sa perte. Il s’est vengé du parti parce que nous l’avons exclu en 1980. Voilà comment on en est arrivés là », a-t-il déclaré. Le directoire du parti, conduit par le coordinateur général et président de l’Assemblée Mouad Bouchareb, se réunira vendredi.

Un « nouveau départ » ?

Politicien expérimenté, Mohamed Djemai (50 ans) est également un puissant homme d’affaires. Député de Tébessa, il est membre de l’une des plus influentes familles de l’est du pays. Ses frères Brahim et Salah sont à la tête de plusieurs entreprises, dont la société algérienne Essalem Electronics. Son élection a été fortement critiquée aussi bien au sein du comité central que sur les réseaux sociaux, où les internautes l’accusent de n’être que « le symbole de l’arrivée de la chkara⁣ [argent suspect] en politique ».

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En effet, en 2015, Mohamed Djemai a été l’un des premiers opposants à la décision portant sur l’obligation de paiement par chèque pour les transactions supérieures à un million de dinars. Une année plus tard, l’homme politique a été fortement contesté par une partie des députés, qui avaient même lancé une pétition contre lui. Depuis son élection, une photo le montrant aux côtés du milliardaire Bahaeddine Tliba fait également polémique.

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Mais Mohamed Djemai nie être impliqué dans toute affaire de corruption. « Je ne suis pas inscrit au registre du commerce et je n’ai pas d’entreprise », a-t-il affirmé. Lors d’une conférence de presse au lendemain de sa victoire, le nouveau SG du parti a dit « soutenir les revendications du mouvement populaire, car on exprime les mêmes exigences que lui ». Il a également demandé « pardon au peuple algérien » : « on prendra un nouveau départ en tirant les leçons de nos erreurs », a-t-il ajouté.

Un congrès « biaisé »

Alors que les Algériens continuent de descendre dans la rue en scandant des slogans contre « le système » et « le clan mafieux du FLN », la session extraordinaire du 10e congrès du comité central avait débuté jeudi 18 avril. Après avoir été reportée à plusieurs reprises, elle a finalement abouti à l’élection de Mohamed Djemai. Rejeté par les manifestants, affaibli par les tensions internes et divisé en factions opposées, le FLN« lutte désormais pour sa survie, après avoir servi de levier politique et idéologique au système qui règne depuis 1962 », confiait à Jeune Afrique un ancien ministre.

Pour l’ancien sénateur Boualem Djaffer, qui a démissionné du parti en signe de soutien au mouvement de contestation, il s’agit du « résultat d’un congrès biaisé qui a été fait sur mesure pour préparer le mandat de Bouteflika ». Cet ancien cadre du FLN passé du côté des manifestants propose de « remettre sur la table l’arrêté du conseil d’État interdisant la réunion du comité central devant conduire au 10e congrès ».

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