Comment choisir les dirigeants de l’ONU

Publié le 25 avril 2006 Lecture : 4 minutes.

Le secrétaire général de l’ONU a très peu de pouvoir et pas beaucoup plus d’autorité directe, mais il a énormément d’influence. La fin de la guerre froide a entraîné un vaste élargissement du champ d’action et des responsabilités de l’ONU, et une aggravation des menaces et des défis auxquels doit faire face la communauté internationale. Nous demandons désormais au secrétaire général de prévenir des conflits, de négocier des accords sur les différends et d’animer la lutte contre la pauvreté, la maladie, la malnutrition et la dégradation de l’environnement. Nous attendons de lui qu’il fasse marcher une machine bureaucratique complexe qui a des bureaux à New York, à Genève et à Vienne, et quelque seize missions de paix dans le monde, employant 80 000 personnes. Ce n’est pas rien, et cela impose une méthode de recrutement plus systématique et moins aléatoire que celle qui a été utilisée jusqu’à présent.

Dans le courant de l’année, un nouveau secrétaire général sera choisi par l’Assemblée générale sur une recommandation du Conseil de sécurité. La manière dont ce choix est fait et le mandat donné au nouveau titulaire ont autant besoin d’être réformés que d’autres activités de l’ONU qui ont fait l’objet d’une plus grande attention et au sujet desquelles des progrès terriblement lents mais réels sont en train d’être réalisés. Est-il encore raisonnable d’appliquer un système de rotation régionale qui exclut des candidats d’autres régions ? Est-il sage de choisir quelqu’un sans savoir comment il s’adaptera à la fonction et quelles seront ses premières priorités ? Comment arbitrer entre le besoin d’avoir un superdiplomate disposant d’une véritable influence politique et le besoin, non moins pressant, d’avoir un manager et un administrateur dignes de ce nom ? Est-ce qu’un mandat de cinq ans renouvelable est le bon choix ? Ne serait-il pas mieux d’avoir un mandat de sept ans non renouvelable ?
Voici quelques suggestions qui pourraient à la fois renforcer la fonction de secrétaire général et assurer que le mouvement de réforme actuel soit poursuivi dans le nouveau mandat. Premièrement, il ne devrait pas y avoir au départ de préconditions sur la région ou sur le sexe. Les principales régions du monde ont occupé la fonction pendant au moins deux mandats. Le moment est venu d’en finir avec le système de rotation et de choisir le meilleur candidat, d’où qu’il vienne. En deuxième lieu, tous les candidats devraient être invités à présenter publiquement un programme, qui indiquerait brièvement ce qu’ils considéreraient comme les principaux défis qui se posent à la fonction et comment ils se proposeraient de les relever. Non seulement cela contrecarrerait la tendance qu’ont eue les candidats dans le passé à susurrer à l’oreille des dirigeants mondiaux ce que ces derniers avaient envie d’entendre, mais cela donnerait aux candidats choisis une vraie autorité à l’égard des États membres et de la bureaucratie onusienne.
Troisièmement, le nouveau secrétaire général devrait être désigné pour un mandat unique de sept ans, non renouvelable. C’est probablement la bonne durée pour une fonction qui est épuisante, et le mandat unique écarterait la tentation à mi-course de se concilier des faveurs pour briguer un second mandat de cinq ans.
Quatrièmement, la nomination d’un nouveau secrétaire général et de son adjoint devrait être considérée en bloc, même si les procédures de nomination restent, comme il se doit, tout à fait séparées. Plutôt que d’arriver à un équilibre régional ou masculin-féminin en jouant sur les deux postes, il serait mieux d’assurer un équilibre fonctionnel, avec des talents et une expérience complémentaires et, comme l’actuel secrétaire général l’a proposé, une définition précise des responsabilités du secrétaire adjoint.
Cinquièmement, le plan de réforme établi par Kofi Annan, l’actuel secrétaire général, devrait être mis en pratique avant la fin de l’année, ce qui fournirait à son successeur une solide base de départ. Et il faudrait demander à tous les candidats de s’engager à l’avance à appliquer ces réformes.

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Enfin, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité devraient faire savoir qu’ils n’ont pas l’intention d’utiliser, ou de menacer d’utiliser, le droit de veto au sujet de la nomination du nouveau secrétaire général, et qu’ils accepteront les décisions de la majorité à la fois au Conseil de sécurité et, par la suite, à l’Assemblée générale. Aucune de ces suggestions n’impose une modification de la Charte des Nations unies elle-même. Aucune ne créerait un précédent sur lequel on ne pourrait pas revenir si l’expérience prouvait qu’il vaudrait mieux procéder autrement. Adoptées globalement, elles indiqueraient clairement que les membres veulent un secrétariat général fort, compétent et efficace, capable de s’adapter aux exigences de la situation. Est-ce trop demander ?

*Ancien ambassadeur britannique à l’ONU.

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