L’Annonce à Abdou Diouf

Publié le 25 mars 2008 Lecture : 2 minutes.

Au mois de novembre dernier, je prenais l’avion à destination du Laos pour la 23e conférence ministérielle de la Francophonie. Le Laos, comme tout le monde sait, fait partie de la liste des pays francophones, ancien mandat français oblige. Hélas, les Laotiens avaient beau mettre le paquet, mobiliser moines et policiers, sans compter les plus hautes sommités, président de la République en personne, la Francophonie ressemblait à une blague, de bon goût certes, mais une blague quand même, dans ce pays pauvre où la langue de Molière est en perdition devant les langues de la réalité que sont l’anglais et bientôt le chinois.
L’occasion m’a été donnée de tester la santé de dame Francophonie à Abou Dhabi, qui, comme chacun sait, ne fait pas partie de l’OIF. En apparence, la semaine francophone, organisée du 16 au 19 mars, n’intéressait que peu de gens, demeurait en marge, voire décalée. Lamartine battrait-il Lawrence en Arabie ? Voyons, c’est insensé ! Eh bien, vous ne me croirez pas, mais quand les débats furent inaugurés par une brève intervention de la petite-fille de Cheikh Zayed al-Nahyane, 18 ans à peine, voile de rigueur mais accent impeccable des faubourgs parisiens, ce fut tout un symbole !
Deux phrases par une bouche royale et le destin de la Francophonie paraissait scellé. On savait désormais que le français est la langue prisée par la progéniture princière, donc par les générations futures. Que les femmes de haut rang, adeptes du chic parisien et passionnées du roman-feuilleton de l’ex-couple Cécilia-Nicolas, ont un faible pour elle. Que le 11-Septembre et l’invasion irakienne sont passés par là, orientant les curs vers la France et non plus vers le monde anglo-saxon. Si l’on ajoute qu’un Louvre et une Sorbonne viennent d’être achetés par cet émirat à coups de milliards d’euros, l’on se met à penser que l’avenir de la Francophonie n’est probablement plus lié à l’histoire mais à la géographie, moins aux idéologies qu’aux matières premières et que le développement de la langue française pourrait dépendre de la richesse des nations qui voudront bien l’utiliser.
L’équation est simple : étant donné que les élites du Golfe sont composées pour beaucoup de Syro-Libanais et de Maghrébins restés d’indécrottables amoureux de la France, que le gage du luxe dans les palais et les cours est plus que jamais d’y consommer et d’y parler français, que l’élégance de l’esprit ne va pas sans la réactivation du mythe de la culture française, l’on peut supputer que l’avenir de la Francophonie n’est ni en Asie orientale ni en Europe, mais dans les Émirats arabes unis.
C’était la bonne nouvelle à annoncer au secrétaire général de l’OIF, Abdou Diouf : il se peut que la Francophonie soit enceinte de nouveaux bébés, même s’ils se révèlent de père inconnu. Mais, là, au moins, on en est sûr, personne n’a intérêt à parler d’ADN ni de paternité biologique.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires