Le Golfe sur le qui-vive après de mystérieuses attaques de drones en Arabie saoudite

Des installations pétrolières ont été la cible d’attaques de drones mardi en Arabie saoudite, faisant monter d’un cran la tension dans le Golfe, deux jours après des « actes de sabotage » contre quatre navires dont deux tankers saoudiens.

Un site de la compagnie pétrolière Aramco en Arabie saoudite. © Bruce Stanley/AP/SIPA

Un site de la compagnie pétrolière Aramco en Arabie saoudite. © Bruce Stanley/AP/SIPA

Publié le 15 mai 2019 Lecture : 4 minutes.

Le porte-avion Abraham Lincoln en 2012. Il navigue actuellement dans les eaux du Golfe. © Carlos M. Vazquez II/U.S. Navy
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Golfe : demain, la guerre ?

Les États-Unis, l’Arabie saoudite, Israël et les Émirats d’un côté. L’Iran et ses alliés de l’autre. C’est le conflit auquel tout le monde se prépare mais dont personne ne veut, tant ses conséquences seraient dramatiques.

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Tôt mardi, deux stations de pompage ont été visées par des « drones armés », ce qui a provoqué un « incendie » et des « dégâts mineurs » à une station, avant que le sinistre ne soit maîtrisé, a précisé le ministre de l’Énergie Khalid al-Falih. Le géant pétrolier Aramco « a interrompu temporairement les opérations sur l’oléoduc » Est-Ouest reliant la Province orientale au port de Yanbu sur la mer Rouge, a-t-il dit, tout en ajoutant que la production et les exportations n’avaient pas cessé.

« Les derniers actes de terrorisme et de sabotage dans le Golfe visent non seulement le royaume, mais aussi la sécurité des approvisionnements pétroliers dans le monde et l’économie mondiale », a averti le ministre. « Ces attaques prouvent une fois de plus qu’il est important pour nous de faire face aux entités terroristes, y compris les miliciens Houthis », a-t-il ajouté.

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Premier exportateur de pétrole au monde, le royaume saoudien a dû cesser ses opérations sur un oléoduc majeur dans la région de Riyad, après ces attaques revendiquées par les rebelles Houthis pro-iraniens s’activant au Yémen voisin, où des forces saoudiennes aident le pouvoir dans sa guerre contre ces insurgés. Principale rivale de l’Iran chiite au Moyen-Orient, l’Arabie saoudite sunnite est un proche allié des États-Unis qui n’ont cessé de durcir le ton contre Téhéran, que ce soit sur le dossier nucléaire ou sur ses actions jugées « déstabilisatrices » dans la région.

Face aux tensions croissantes, les cours du pétrole ont rebondi. Vers 13h10 GMT, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en juillet valait 71,10 dollars à Londres, en hausse de 87 cents. À New York, le baril de WTI pour le contrat de juin gagnait 53 cents, à 61,57 dollars.

Des « actes de sabotage » au large des Émirats

Au Yémen, la chaîne de télévision des Houthis a fait état d’une « opération militaire majeure » avec « l’utilisation de sept drones » contre des « installations vitales » saoudiennes. Il s’agit d’une « réponse aux crimes » de Riyad au Yémen, a déclaré Mohammed Abdelsalam, porte-parole des Houthis – soutenus par l’Iran, qui dément toutefois leur fournir des armes. « Notre peuple n’a d’autre choix que de se défendre de toutes ses forces. »

Deux jours plus tôt, dimanche, deux pétroliers saoudiens ainsi qu’un norvégien et un cargo émirati ont été visés par de mystérieux « actes de sabotage » au large de l’émirat de Fujairah, membre de la Fédération des Émirats arabes unis, selon le gouvernement d’Abou Dhabi. Il n’y a pas eu de victimes et les bateaux endommagés n’ont pas coulé. Ces actions n’ont pas été revendiquées.

Dans un contexte de montée des tensions régionales, des opérations iraniennes limitées contre les Émirats et l’Arabie saoudite pourraient viser à dissuader ces deux pays

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Voisins et alliés de l’Arabie saoudite, les Émirats ont promis une enquête « professionnelle », alors que des zones d’ombre demeurent sur la nature des « actes de sabotage » et l’identité des auteurs et commanditaires. Pour des experts, si la responsabilité de Téhéran est avérée, il pourrait s’agir d’un avertissement de l’Iran à Washington qui a renforcé sa présence militaire dans la région.

« Dans un contexte de montée des tensions régionales, des opérations iraniennes limitées contre les Émirats et l’Arabie saoudite pourraient viser à dissuader ces deux pays et indiquer qu’une guerre avec l’Iran ne serait pas limitée au sol iranien », a fait valoir Alex Vatanka, du Middle East Institute basé à Washington.

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Risque d’un conflit « par accident » dans le Golfe

S’il y a « vraiment eu une tentative délibérée d’endommager ces tankers, alors ce pourrait être un avertissement de l’Iran sur les conséquences d’une quelconque action militaire contre des cibles iraniennes n’importe où dans la région », a noté Neil Partrick, expert du Golfe. L’Iran, placé sur la défensive, a jugé lundi ces actes « préoccupants et regrettables ». Mais sur un ton de défi, le président iranien Hassan Rohani a aussi affirmé que son pays était « trop grand pour être intimidé par quiconque ».

Ces développements surviennent dans un contexte de guerre psychologique entre Washington et Téhéran après le renforcement des sanctions américaines contre l’Iran qui a, lui, suspendu certains de ses engagements nucléaires. Riyad avait promis d’augmenter sa production pour compenser la baisse de l’offre après les sanctions américaines qui empêchent l’Iran d’exporter ses barils.

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La semaine dernière, le Pentagone a annoncé l’envoi dans la région d’un navire de guerre et d’une batterie de missiles Patriot, s’ajoutant au déploiement d’un porte-avions et de bombardiers B-52. Il a justifié ce déploiement par des « signaux clairs montrant que les forces iraniennes et leurs affidés font des préparatifs à une attaque possible contre les forces américaines ».

Selon le New York Times, le ministre américain de la Défense par intérim, Patrick Shanahan, a présenté à des conseillers de Donald Trump un plan selon lequel jusqu’à 120 000 hommes pourraient être envoyés au Moyen-Orient si l’Iran attaquait des forces américaines. Les Européens se sont dits inquiets de ce regain de tension et ont signifié au secrétaire d’État américain Mike Pompeo, de passage à Bruxelles, leur préoccupation face au risque d’un conflit « par accident » dans le Golfe.

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