Une Image brouillée
Les relations entre la filiale congolaise de TotalFinaElf et le gouvernement
brazzavillois ont connu des jours meilleurs. La brouille prend de telles
proportions qu’elle s’apparente de plus en plus à une affaire d’État (voir
aussi p. 77). L’opérateur pétrolier souhaite la modification du contrat de partage de production passé en avril 1994 avec le gouvernement congolais de l’époque sur le permis qu’il détient en haute mer. Elf Congo veut changer les règles du jeu pour compenser les lourdes charges liées aux investissements nécessaires à l’exploitation des gisements localisés sur ce permis. Les modifications de l’accord demandées par l’opérateur se traduiraient par une réduction à 30 % de la part de production réservée au Congo, contre 70 % pour le groupe pétrolier, alors qu’il prévoyait initialement une répartition à parts
égales, explique un officiel congolais. Simultanément, le gouvernement s’estime lésé :
« Lors du passage au régime
de partage de production, les parts de l’État dans le capital d’Elf Congo, ex-filiale d’Elf Aquitaine, ont été rachetées à vil prix par le groupe. Nous sommes en droit de demander réparation », revendique un ministre qui estime le préjudice subi à 500 millions de dollars.
Qui a tort ? Qui a raison ? Est-ce que le gouvernement de Brazza tenterait, avec opportunisme, de tirer parti de la situation, quitte à remettre en cause le sacro-saint principe de continuité de l’État, en désavouant les décisions prises par ses prédécesseurs aujourd’hui vaincus ? Ou est-ce que la filiale de TotalFinaElf, autrefois propriété d’un groupe à la réputation sulfureuse, aurait profité d’une administration minée par la corruption pour décrocher à moindres frais de faramineux contrats ? Peu importe. Au-delà des conséquences de ces bisbilles pétrolières sur les relations d’affaires franco-congolaises, ce type de contentieux est toujours très mauvais en termes d’image pour les pays d’Afrique en quête d’investisseurs. Si le continent avait meilleure réputation, sans doute parviendrait-il à capter plus d’investissements directs étrangers (IDE) qu’il n’en mobilise actuellement. Pour des multinationales hésitantes, l’issue de ce combat juridique entre pouvoirs publics et opérateurs privés peut se révéler déterminant. Et conditionner à très court terme l’orientation des flux financiers. Plus spectaculaire, la crise ivoirienne vient de prouver que les entreprises privées peuvent réagir très rapidement à la dégradation de l’environnement dans lequel elles travaillent. Dès le 30 janvier, et avant même que le gouvernement français ne commence à évacuer ses ressortissants d’Abidjan, le groupe Bolloré, la Société générale et le Crédit Lyonnais affrétaient un avion pour rapatrier une partie de leurs salariés.
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