Reagan, mieux que Bush

Publié le 25 février 2003 Lecture : 2 minutes.

Au Pentagone, les civils jouent les va-t-en-guerre, mais nombre de militaires se montrent plus circonspects. Des généraux à la retraite comme Norman Schwarzkopf, Anthony Zinni et Wesley Clark n’ont pas hésité à exprimer leur appréhension. « Franchement, je me suis inquiété de certaines déclarations de Rumsfeld, a notamment confié Schwarzkopf au Washington Post. Je pense qu’il faut absolument attendre de voir ce que ramènent les inspecteurs. » Quant à Zinni, il ne se montre pas tendre avec les faucons : « Je ne sais trop sur quelle planète ils vivent, parce que ce n’est pas celle sur laquelle j’ai les pieds. » Dans une conférence donnée au mois d’octobre à l’Institut du Moyen-Orient à Washington, il ajoutait que si les États-Unis ont l’intention de « régler le problème par une action violente, ce n’est pas la bonne solution. D’abord, parce que je ne pense pas que ce soit nécessaire. Ensuite, parce que la guerre et la violence ne doivent être qu’un ultime recours ».
Les faucons comparent volontiers Saddam Hussein à Hitler, laissant entendre que si nous ne l’arrêtons pas à Bagdad, nous le retrouverons demain en Méditerranée. L’analogie est trompeuse : Saddam est peut-être aussi odieux que l’était Hitler, mais il n’a pas les moyens d’envahir ses voisins. Son armée s’étant encore affaiblie depuis le temps où elle était tenue en échec par les forces iraniennes, on voit mal comment il pourrait représenter une menace pour les États-Unis. La comparaison serait sans doute plus judicieuse avec le Libyen Mouammar Kadhafi, dont on faisait le Hitler des années quatre-vingt. Il y a deux décennies, la Libye tentait d’acquérir des armes de destruction massive, perdait des batailles aériennes face aux Américains et finançait le terrorisme. Ses hommes de main organisaient un attentat contre un cabaret de Berlin fréquenté par les soldats américains et faisaient sauter un avion de ligne de la PanAm au-dessus de l’Écosse. La Libye n’a jamais été une puissance militaire de la taille de l’Irak, mais elle était davantage impliquée dans le terrorisme. Il y aurait eu autant de raisons d’envahir la Libye dans les années quatre-vingt que l’Irak aujourd’hui.
Mais le président Ronald Reagan a fort raisonnablement décidé de mener contre la Libye une politique d’endiguement, non de l’envahir. Et cette politique a été couronnée de succès. Qui peut penser que les États-Unis se trouveraient mieux aujourd’hui d’avoir envahi et occupé ce pays, avec cette conséquence que, depuis vingt ans, des soldats américains se feraient tirer dessus dans le désert par des bédouins ?
Il est vrai que, comme Bush l’a indiqué l’autre semaine, Saddam tente de mener l’Amérique en bateau. Mais, dans les années quatre-vingt-dix, les inspecteurs ont amplement démontré leur efficacité : ils ont détruit plus d’armes que les États-Unis pendant la guerre du Golfe. Même si Saddam réussit à cacher certaines armes déjà fabriquées, il n’aura pas les moyens de les entretenir. Et il sera bien incapable de développer des armes nucléaires. Il est relativement aisé de détecter un programme nucléaire, notamment parce qu’il nécessite des usines et des installations électriques de très vastes dimensions. Les inspections sont loin d’être parfaites, mais elles sont amplement suffisantes pour empêcher Saddam d’acquérir des armes nucléaires.

© The New York Times et J.A./l’intelligent 2003. Tous droits réservés.

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