Pschiiiiit !

Publié le 25 mars 2003 Lecture : 2 minutes.

Youp ! Ziiiim ! C’est la fête, une nouvelle tour de Babel vient de s’écrouler ! De ses ruines fumantes s’échappent des mots contenus depuis des années, réprimés, cachés, étouffés, remisés aux frontières de la littérature. Des mots méprisés, prononcés mais rarement écrits, des mots aux sonorités évocatrices, des mots extensibles à volonté, malléables selon les humeurs. Enfin, les onomatopées sont libres ! Un président de la République française, toujours en exercice, a décidé de leur libération inconditionnelle : pschiiiiit, a-t-il dit de manière tout à fait inattendue et abracadabrantesque pour récuser une accusation ! L’Académie a réagi avec des berkkk, des eurkkk, des arghhhh et quelques ouille, tandis que d’autres, battant des mains, se laissaient aller à des clap clap clap endiablés, riant sous cape : hé hé hé hé oua pfff !
Mais, le croirez-vous ? c’est chez les animaux que la fête fut la plus belle. Fini le temps des meuglements, les vaches peuvent se laisser aller à un bon meuuuuuh des familles. Ouach, ça fait du bien par où ça passe. L’âne qu’on contraignait à braire peut pousser son hi-han hi-han sonore. Le canard peut cesser de cancaner et de nasiller : le coin-coin est libre. Cliticlop cliticlop, le cheval ne hennit plus, il dit hiiiii et frrrrrr des naseaux. Et le cochon ne grogne plus, il dit grouin-grouin ; la chèvre ne bêle plus, elle dit bêêêêê ; le chat abandonne le miaulement pour les miaooouu, les mouek mouek et les ffffff gonflés face aux woufff rouaafff des chiens qui bientôt s’enfuient, kaï kaï ! C’est parti ! Le paon libère ses léon léon, le dindon ses pia pia et ses glou glou, la poule son cot cot, le poussin son piou piou, l’alouette son tireliii, la colombe son coucourou, le coucou son coucou et le courli son courli, le hibou son hou hou, la cigale son cri cri, le crapaud son crou crou, la grenouille son croa croa, l’éléphant son brrrroa, le serpent son bzzzz, le moustique son zzzzzzzzzzzzzzzzz (insupportable !)… Mais badabroum, voilà que résonne l’orage. Qu’importe, la pluie qui tombe plic ploc plic ploc à la surface de l’eau ne change rien au calme légendaire de la carpe qui, au fond du lac, reste muette.

Dictionnaire des onomatopées, Pierre Enckell et Pierre Rézeau, Presses universitaires de France, 588 pp., 32 euros.

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