[Analyse] Au Cameroun, le piège Kamto
En janvier, l’opposant Maurice Kamto, qui se dit « président élu » depuis la présidentielle de 2018, a célébré ses « cent jours ». Ses équipes étaient à pied d’œuvre, avec une obsession : ne pas finir comme Jean Ping, l’opposant gabonais qui se revendique « président élu » depuis… 2016.
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Mathieu Olivier
Rédacteur en chef adjoint pour l’Afrique centrale. Journaliste politique et d’investigation, spécialiste notamment du Cameroun et de la Centrafrique, il s’intéresse aussi à la politique de la Russie en Afrique.
Publié le 30 mai 2019 Lecture : 1 minute.
Le Cameroun en équilibre instable avant les législatives
Confronté à la crise anglophone, aux attaques de Boko Haram et au ralentissement économique, le Cameroun est dans une position délicate. Dans un tel contexte, les élections législatives de novembre font office de véritable troisième tour, notamment pour le chef de l’État Paul Biya.
Il est vrai qu’en Afrique centrale le destin de l’« élu » est parfois cruel et souvent sans lendemain. Kamto voulait donc écrire un autre scénario en occupant le terrain pour conserver l’élan de la présidentielle. Mais le 28 janvier, deux jours après une « marche blanche » pacifique, il a été arrêté puis inculpé, accusé de rébellion, d’insurrection et d’hostilité à la patrie. On lui reproche notamment d’avoir provoqué le saccage de l’ambassade camerounaise à Paris, le 26 janvier. Ce qu’il nie vigoureusement.
Pression internationale
Pour sortir de la prison de Kondengui, l’ex-ministre délégué à la Justice s’est entouré d’avocats chevronnés, camerounais mais aussi français et gabonais, qu’il a chargés de trouver la meilleure riposte juridique… et médiatique. C’est ainsi qu’en mars par voie de presse, et par la voix d’Éric Dupond-Moretti, ténor du barreau de Paris, il a invité Paul Biya à dialoguer avec lui. Une proposition guère appréciée – c’est un euphémisme – par le chef de l’État.
Le libérer accréditerait la thèse du procès politique et signifierait que Yaoundé cède à la pression
René Emmanuel Sadi, le porte-parole du gouvernement, est rapidement intervenu pour éteindre le début d’incendie, mais il était déjà trop tard. Aujourd’hui, les États-Unis s’inquiètent de la détention de Kamto, l’Union européenne la dénonce, et les Nations unies s’interrogent sur les raisons qui la motivent. Que faire désormais du prisonnier le plus célèbre du Cameroun ? « Le libérer accréditerait la thèse du procès politique et signifierait que Yaoundé cède à la pression, s’inquiète un membre du parti au pouvoir. Mais le condamner ferait de lui un martyr, et cela aux yeux du monde entier. »
Pour la première fois depuis longtemps, le pouvoir doit sortir de sa zone de confort, celle de l’ombre et du silence, au grand dam d’un Paul Biya toujours très attaché à l’image internationale de son pays. Mais en emprisonnant Maurice Kamto, c’est lui qui se retrouve pris au piège.
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Confronté à la crise anglophone, aux attaques de Boko Haram et au ralentissement économique, le Cameroun est dans une position délicate. Dans un tel contexte, les élections législatives de novembre font office de véritable troisième tour, notamment pour le chef de l’État Paul Biya.
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